L’expression clinique de la gale sarcoptique est évocatrice - La Semaine Vétérinaire n° 1333 du 31/10/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1333 du 31/10/2008

Dermatologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Christine Prost

Fonctions : diplomate de l'European College of veterinary Dermatology (ECVD)

La moxidectine se révèle efficace et bien tolérée, y compris chez le colley, race pour laquelle un risque de mutation du gène MDR 1 existe.

Un colley (croisé husky) mâle âgé de cinq ans présente une dermatose fortement prurigineuse, depuis cinq mois. Le chien vit en région Rhône-Alpes et a séjourné plusieurs fois en Espagne. Il vit seul, à l’extérieur (jour et nuit), et a accès à une niche en bois paillée l’hiver. Il est nourri avec des aliments industriels de moyenne qualité, associés à des restes de table. Aucun traitement antipuce régulier ne lui est administré. Il n’a pas d’antécédents pathologiques. Depuis cinq mois, il se gratte intensément, en particulier la face inférieure du corps (cou, région sternale, membres antérieurs et postérieurs, cuisses et queue). Il supporte difficilement le contact et a un mouvement de retrait dès que quelqu’un tente de toucher ses pattes, qui semblent douloureuses. Les lésions se sont étendues et ont évolué rapidement. Elles persistent malgré les traitements instaurés (antibiotiques et corticoïdes). Ces derniers ne soulagent que modérément l’animal, pour une courte durée. Le chien a maigri et ne joue plus. L’un des propriétaires se gratte les jambes.

Les lésions de gale sarcoptique sont localisées sur les parties inférieures du corps

L’examen clinique montre des lésions inflammatoires : un érythème violent, des papules, des croûtes et un état kérato-séborrhéique majeur qui atteint particulièrement les coudes et les jarrets. Toutes les parties inférieures du corps sont touchées. Le dos est épargné. La brutalité d’apparition des signes dermatologiques, l’intensité du prurit, l’érythème violent et les lésions papulo-croûteuses, leur localisation caractéristique et la contagion probable de l’un des propriétaires permettent de suspecter l’évolution d’une gale sarcoptique. La cytologie révèle la présence de polynucléaires neutrophiles et de cocci. Les raclages cutanés sont positifs et montrent des acariens identifiés comme Sarcoptes scabiei. Une analyse sérologique ciblant la leishmaniose est pratiquée par sécurité et se révèle négative.

Il convient d’être prudent quant au traitement des colleys

Le chien est un colley croisé. Il s’agit d’une race à risque pour la mutation du gène MDR 1. Le pelage est dense et long, et l’animal est difficile à manipuler. Le choix se porte sur un traitement facile à appliquer et sans risque pour lui. Un spot on demoxidectine à 2,5 %,combiné à l’imidaclopride, est appliqué sur une zone préalablement tondue au niveau du cou. L’application est renouvelée vingt et un jours plus tard. La niche est nettoyée puis traitée avec un anti-parasitaire acaricide pour l’habitation, à base de perméthrine. La paille est définitivement supprimée. Une antibiothérapie est prescrite pendant vingt jours (céfalexine à la dose de 30 mg/kg/j en deux prises) et un shampooing à la chlorhexidine est pratiqué.

Le chien se gratte beaucoup moins après l’application de la première pipette. La guérison est complète et définitive après la seconde. Il recouvre un pelage normal.

L’environnement doit également subir un traitement acaricide

Ce cas clinique montre l’étendue des lésions cutanées induites par une infestation par Sarcoptes scabiei et la baisse d’état général qui en font une parasitose grave (en particulier lors de gale ancienne ou chez des chiens âgés), l’importance d’un diagnostic précis et rapide, ainsi que l’efficacité de la moxidectine pour la traiter.

La gale sarcoptique est une dermatose fréquente chez le chien et contagieuse pour l’homme. La contagion s’effectue principalement par contact directavec un animal galeux, mais également avec le matériel de couchage (couverture, coussin, tapis) ou de toilettage. Les acariens creusent un tunnel dans l’épiderme de l’hôte pour y pondre. Les œufs deviennent des larves, puis des nymphes, au cours d’un cycle de dix-sept à vingt et un jours. Le cycle parasitaire se déroule entièrement sur l’hôte. Les femelles adultes peuvent survivre jusqu’à dix-neuf jours en dehors de leur hôte, le plus souvent entre deux et six jours dans une habitation. Cela justifie un traitement acaricide de l’environnement en présence d’un animal galeux.

Une réaction d’hypersensibilité peut être associée à l’infestation

Les acariens entraînent une action délétère locale mécanique et chimique par le biais de l’inoculation de protéines vasodilatatrices et anticoagulantes. Une réponse immunitaire cellulaire et humorale se produit également. La réponse humorale peut être associée à une hypersensibilité aux ectoparasites à l’origine d’une réaction inflammatoire sévère.

Cliniquement, un prurit intense, associé à des lésions de type érythème, papules et croûtes, est observé. La topographie lésionnelle est caractéristique, avec une atteinte de la face, en particulier du bord libre des pavillons auriculaires, des coudes, des jarrets, de la région sternale et de l’abdomen. Des signes généraux sont fréquemment constatés, comme un amaigrissement, de l’anorexie et une hyperthermie.

Le diagnostic de certitude d’une gale sarcoptique peut être difficile

Des raclages cutanés profonds sont nécessaires, en particulier au niveau des coudes, des jarrets et des oreilles, afin de trouver les acariens ou leurs œufs. Des dosages d’IgG spécifiques sont disponibles, mais il est nécessaire de les interpréter avec prudence. En effet, des résultats faux négatifs sont possibles dans le premier mois qui suit l’infestation, car le titre d’immunoglobulines adéquat n’est pas atteint. Des résultats faux positifs sont en outre obtenus chez certains chiens atopiques fortement sensibilisés aux acariens de poussière de maison du genre Dermatophagoides. Des réactions croisées sont clairement décrites entre Sarcoptes et Dermatophagoides. Comme la gale sarcoptique fait partie du diagnostic différentiel de la dermatite atopique canine, il n’est pas recommandé d’utiliser ces tests sérologiques dans ce cas.

Les titres d’anticorps baissent généralement en quelques semaines après la guérison, mais cela peut être plus long (jusqu’à six mois).

Le traitement topique nécessite une tonte préalable. Un shampooing kératomodulateur est appliqué avant la réalisation de frictions acaricides à l’amitraz, une fois par semaine pendant trois semaines. Cela n’a pas été réalisé dans le cas décrit qui concerne un grand chien au pelage dense. La contrainte imposée ne convenait pas aux propriétaires.

Pour sa part, le traitement systémique repose sur l’utilisation des lactones macrocycliques. Cette famille d’antiparasitaires comprend les avermectines (ivermectine, doramectine et sélamectine) et les milbémycines (milbémycine oxime et moxidectine). L’ivermectine et la doramectine sont contre-indiquées chez le colley, le shetland, le bobtail et le bearded collie. La sélamectine, la moxidectine en spot on et la milbémycine per os peuvent être utilisées chez ces races à risque.

Dans le cas clinique décrit, la prudence s’imposait, puisque l’animal est un colley croisé. Il s’agit d’un chien de grande taille. Le coût du traitement est alors un facteur limitant. Advocate®, qui associe l’imidaclopride et la moxidectine, dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour traiter la gale sarcoptique du chien, y compris chez le colley. Il est recommandé à une dose unique, deux fois à quatre semaines d’intervalle. La forte lipophilie de la moxidectine permet son stockage dans les tissus adipeux afin de maintenir une concentration élevée pendant trois à quatre semaines. Sa distribution est systémique. Dans les cas d’échec, rapportés de manière anecdotique dans la littérature, trois applications à quinze jours d’intervalle peuvent être recommandées.

Les acariens morts et leurs produits sont antigéniques et un prurit peut persister en l’absence d’acariens vivants pendant quelques semaines. Les complications infectieuses sont à gérer durant cette période et des antihistaminiques peuvent être associés. L’usage des corticoïdes doit être raisonné sur une courte période.

  • Pour en savoir plus : « Infectious and parasitic dermatoses » in Proceedings of the Bayer pre-congress symposium, Germany, ESVD/ECVD, 2007.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr