La liste rouge des espèces menacées fait l’inventaire de leur état de conservation

Créée il y a plus de quarante ans, la liste rouge des espèces menacées est établie par la commission de sauvegarde des espèces, l’une des six commissions internes de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Forte de plus de sept mille spécialistes aujourd’hui, elle a permis d’établir, à la suite d’un vaste processus de concertation et de validation qui s’est déroulé sur plusieurs années, neuf catégories pour classer chaque espèce ou sous-espèce : en danger critique d’extinction (CR), en danger (EN), vulnérable (VU), quasi menacée (NT), préoccupation mineure (LC), données insuffisantes (DD), non évaluée (NE) et, bien entendu, éteinte à l’état sauvage (EW) et éteinte (EX). Les trois premières catégories regroupent les espèces menacées de disparition et correspondent à l’évaluation de plusieurs critères quantitatifs fondés sur le taux de déclin, la population totale, les zones d’occurrence et d’occupation, le degré de peuplement et la fragmentation de la répartition.

Un outil scientifique qui permet d’alerter le public et les politiques

La liste rouge de l’UICN constitue un inventaire mondial sur l’état de conservation global des espèces animales et végétales. Cet outil, qui s’appuie sur des informations scientifiques précises, permet d’alerter à la fois le public et les responsables politiques sur l’urgence liée aux problèmes de conservation. Elle est d’ailleurs retenue par la Convention sur la diversité biologique comme un indicateur privilégié pour suivre l’état de la biodiversité dans le monde. En effet, pour atteindre l’objectif mondial fixé par ses différentes parties en 2002, qui est de réduire significativement la perte de biodiversité d’ici à 2010, il est nécessaire de disposer de moyens pour évaluer et suivre le déclin des espèces.

Près d’un quart des mammifères sont menacés d’extinction

La liste indique notamment que 12 % des espèces d’oiseaux, 23 % des mammifères, 32 % des amphibiens, 42 % des tortues et un quart des espèces de conifères sont menacés d’extinction à l’échelle mondiale. Si les oiseaux, les mammifères et les amphibiens font l’objet d’une évaluation presque complète, de sérieuses lacunes existent encore pour certains grands groupes d’espèces. Par exemple, les données manquent pour celles d’eaux douces et marines. Plus généralement, les invertébrés sont sous-représentés, ce qui s’explique par leur grand nombre et leur présence dans une multitude d’habitats, du plus profond des océans jusqu’aux plus hautes montagnes. Pour le seul embranchement des arthropodes, les insectes représentent plusieurs millions d’espèces.

Les populations de grands singes subissent un déclin général

La dernière édition de la liste de l’UICN, publiée en septembre 2007⁽¹⁾, a également souligné le déclin général des populations de grands singes, avec en première ligne le gorille de l’ouest (Gorilla gorilla), classé en danger critique d’extinction. Ses populations sont soumises à de fortes pressions causées à la fois par le commerce de la viande de brousse et les épidémies dues au virus Ebola. Les deux espèces d’orangs-outans, celui de Sumatra et de Bornéo, sont pour leur part menacées par la perte de leur habitat due à une exploitation intense du bois et à des défrichages. L’Académie chinoise des sciences a en outre annoncé l’an passé la disparition du dauphin d’eau douce du Yangtze, ou baiji (Lipotes vexillifer).

La situation des oiseaux continue à se dégrader partout, notamment en France

Plus récemment, le 19 mai dernier, la nouvelle liste rouge 2008 concernant les oiseaux mondialement menacés d’extinction a été communiquée à l’occasion de la 9^e réunion des parties de la Convention sur la diversité biologique organisée à Bonn (Allemagne). Cette réévaluation montre que la situation des oiseaux continue à se dégrader dans le monde, notamment en France. D’après Birdlife International, la France métropolitaine et d’outre-mer compte aujourd’hui soixante-quinze espèces menacées d’extinction, soit quatre de plus qu’en 2004. Parmi ces espèces, seulement cinq sont observées en métropole (faucon crécerellette, vautour percnoptère, puffin des Baléares, phragmite aquatique, aigle criard). Parmi les territoires français, la Polynésie abrite le plus grand nombre d’espèces menacées au niveau mondial (trente-cinq), tandis que La Réunion a subi le plus grand nombre d’extinctions (plus d’une dizaine d’espèces décrites ont disparu).

Les collectivités d’outre-mer abritent une diversité biologique exceptionnelle et placent la métropole parmi les dix pays qui hébergent le plus grand nombre d’espèces animales et végétales menacées au niveau mondial. La France a donc une lourde responsabilité en matière de protection des espèces.

• (1) Une dernière mise à jour de la liste vient d’être présentée lors du congrès mondial de la conservation de l’UICN à Barcelone, qui a débuté le 5 octobre et s’achèvera le 14. Pour en savoir plus ou consulter la base de données : http://www.iucnredlist.org et http://www.uicn.fr