Une sérotine enragée est recueillie et soignée par des promeneurs en Gironde - La Semaine Vétérinaire n° 1325 du 05/09/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1325 du 05/09/2008

Zoonose. Rage des chiroptères

Actualité

Auteur(s) : Michel Bertrou

L’Institut Pasteur a confirmé, le 28 août dernier, que la sérotine commune (Eptesicus serotinus) qui avait mordu au doigt la personne qui l’avait recueillie, le 13 août à Saint-Médard-en-Jalles (Gironde), était porteuse du virus de la rage. Il s’agit d’une souche de type EBLV 1a (european bat lyssavirus subtype 1a).

Tous les membres de la famille qui a recueilli l’animal ont immédiatement reçu un traitement antirabique. Leur chien, qui était à jour pour la vaccination antirabique, reste sous surveillance à domicile et sa revaccination est demandée par les services vétérinaires. La préfecture du département a lancé un appel à la vigilance. Un périmètre de surveillance de 5 km environ est délimité dans la commune, à l’intérieur duquel les résidents sont particulièrement mis en garde. Les personnes ayant eu un contact avec l’animal malade entre le 30 juillet et le 13 août doivent consulter un médecin. Les propriétaires ayant vu leurs animaux avec une chauve-souris au cours de la période à risque sont également tenus de se signaler.

Il s’en est fallu de peu que ce cas de rage passe inaperçu. La personne mordue a continué de prodiguer des soins au petit mammifère en le nourrissant à la seringue et en lui capturant des insectes. Elle l’a emporté avec elle en vacances dans les Deux-Sèvres où elle a eu la bonne idée de prendre contact avec le centre de sauvegarde de la faune sauvage de Torsac, en Charente. Une bénévole avisée l’a informée du risque de rage avec les chauves-souris et lui a conseillé de se faire vacciner. La sérotine était déjà morte lorsque la famille l’a apportée au centre, le 19 août dernier. Son cadavre a alors été remis aux services vétérinaires qui l’ont envoyé à l’Institut Pasteur.

Le vétérinaire a une mission de vigilance et d’information du public

La sérotine commune est l’une des trente-trois espèces de chiroptères qui vivent en France. Elle est répandue à travers toute l’Europe. De taille moyenne pour une chauve-souris européenne, son poids ne dépasse pas 30 g. Insectivore, elle attrape les insectes en vol et chasse rarement au sol. Elle est anthropophile, vivant dans les villages, mais également dans des agglomérations plus importantes, se logeant volontiers dans les combles et les greniers. L’espèce est sédentaire, fidèle à son gîte principal qu’elle peut partager avec d’autres espèces comme la pipistrelle commune. C’est dans un grenier qu’en Vendée, en novembre 2007, un chat enragé avait vraisemblablement été contaminé par une chauve-souris(1).

Une chauve-souris atteinte par la rage ne devient pas forcément plus agressive, mais son comportement peut changer, se laissant alors approcher ou ayant des difficultés à voler. Cela semble avoir été le cas en Gironde, l’animal ayant été trouvé volant à terre, lors d’une promenade. Les personnes qui l’ont recueilli ont également rapporté des symptômes d’automutilation sur une blessure.

Lorsqu’elle est capturée, la chauve-souris a tendance à mordre pour se défendre. La meilleure prévention contre le risque rabique vis-à-vis de ces petits mammifères sauvages consiste à ne pas les manipuler, comme le prévoit leur statut légal de protection. Toutes les espèces de chauves-souris sont protégées en France(2) comme en Europe et, à ce titre, il est interdit de les tuer, de les capturer, de les transporter (vivantes ou mortes) comme de les commercialiser. Quand la manipulation est indispensable, il convient de se munir de gants épais et de recouvrir l’animal d’un chiffon ou d’une boîte en carton. Si l’animal peut voler, il doit être relâché. En cas de morsure, griffure ou léchage, la plaie doit être lavée au savon, abondamment rincée, puis traitée avec un antiseptique. Il faut ensuite prendre contact avec un médecin ou un centre antirabique.

Il n’est pas superflu de rappeler aux particuliers qu’il convient de signaler au vétérinaire tout cadavre de chauve-souris. La profession est une référence vis-à-vis de la rage animale et, quelles que soient les espèces concernées, les informations et les règles de précaution que les praticiens pourront communiquer seront utiles.

Dans son éditorial de juillet dernier, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé animale, notre confrère Bernard Vallat, aborde la question de la « surveillance de la faune sauvage pour mieux la protéger et mieux nous prémunir des maladies qu’elle nous transmet ». La surveillance des chauves-souris en est un modeste, mais bon exemple.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1292 du 30/11/2007 en page 19.

  • (2) Article L.411-1 du Code de l’environnement et arrêté de préservation du 23/4/2007.

A SAVOIR

Lorsqu’il y a une suspicion de contamination humaine, la recherche virale sur les chauves-souris est effectuée à l’Institut Pasteur, à Paris. Dans les autres cas, elle est confiée au Laboratoire d’études et de recherches sur la rage et la pathologie des animaux sauvages de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), à Nancy.

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