L’analyse quantitative de l’observance en élevage porcin est difficile - La Semaine Vétérinaire n° 1322 du 04/07/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1322 du 04/07/2008

Médecine porcine

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Nathalie Devos

De nombreuses pratiques humaines peuvent générer des écarts entre la prescription et son application sur le terrain.

L’étude de l’observance est relativement récente en médecine vétérinaire par rapport au domaine médical humain. En élevage porcin, les références(1) relatives à ce sujet sont peu nombreuses. Une enquête a été menée en juillet et août 2006 afin d’évaluer l’observance des prescriptions formulées par les vétérinaires auprès d’un échantillon d’éleveurs de porcs du grand Ouest de la France. La sélection s’est effectuée parmi cent quarante-cinq élevages naisseurs engraisseurs de moins de quatre cents truies dans sept groupements, en s’assurant qu’un même vétérinaire ne suivait pas plus de cinq élevages au sein de cette population. Au final, quarante éleveurs ont accepté de participer à cette étude, qui a été réalisée par une étudiante vétérinaire. Comme cela se pratique en médecine humaine, le travail s’est fondé sur les dires, confrontés par la suite aux données disponibles sur la prescription et la consommation de médicaments vétérinaires en élevage, en limitant le champ de l’analyse aux traitements non systématiques. Afin d’éviter les biais dans les réponses, les questions posées aux exploitants ne concernaient pas l’observance elle-même, mais leur rôle en tant qu’infirmiers de leur élevage, un thème plus neutre.

Le rôle d’infirmier apparaît indissociable de la fonction d’éleveur

Dans la première partie de l’étude, les éleveurs ont défini leurs fonctions. Les résultats montrent que seul un sur les quarante interrogés ne se considère pas comme un infirmier en élevage, c’est-à-dire celui qui exécute une prescription qu’il est censé avoir enregistrée et comprise. Les autres, quelle que soit la façon dont ils définissent cette fonction (voir encadré), déclarent s’identifier à cette transposition de la médecine humaine à la pratique. Pour neuf des personnes interrogées, « l’éleveur est un infirmier » et « un infirmier en élevage est un éleveur ». L’enquête met également en évidence le rôle actif que les exploitants entendent jouer dans l’observation des animaux (huit sur quarante), le diagnostic (huit) ou l’intervention (neuf).

Le questionnaire proposait trois conceptions du métier d’infirmier :

- l’infirmier libéral, qui exécute une prescription faite par un médecin et ne dispose d’aucun stock de médicaments ;

- l’infirmier hospitalier, qui peut faire appel aux conseils d’un médecin et à une équipe médicale en cas de besoin, et qui dispose d’un stock de médicaments ;

- l’infirmier urgentiste, qui agit dans l’urgence et devance la décision du médecin.

Les réponses montrent que seul un quart des éleveurs (dix sur quarante) se considèrent proches du statut d’infirmier libéral. La majorité d’entre eux (vingt-six) se situent dans la deuxième catégorie.

La première partie de l’étude montre donc que le rôle d’infirmier apparaît indissociable de la fonction d’éleveur et qu’il est associé à la détention et à l’usage des médicaments.

Les diarrhées sont le motif qui interpelle le plus les éleveurs

Dans un deuxième temps, les exploitants ont été interrogés sur les symptômes qui les conduisent à intervenir en élevage et le type d’actions mises en place, en hiérarchisant trois critères ou signes d’appel principaux. Les diarrhées arrivent en tête des réponses de rang 1, tous secteurs de l’élevage confondus. Elles sont suivies, dans ce même rang, par l’anorexie, la perte d’appétit et la toux.

Lors de diarrhée en maternité, plus de 80 % des éleveurs traitent immédiatement tous les animaux atteints ou une partie seulement, selon le schéma thérapeutique adopté dans chaque exploitation, car ce symptôme génère chez eux de l’anxiété. Les autres préfèrent attendre de voir comment évoluent les symptômes avant d’agir, ou ne font rien.

Ces déclarations ont été confrontées aux comptes rendus de visite d’élevage. Ceux concernant la maternité ont été retenus lorsqu’ils comprenaient les termes coccidiose, colibacillose, diarrhée, diarrhée néonatale, entérite et iléite. Parmi les trente éleveurs pour lesquels toutes les données étaient disponibles, seulement douze ont eu une recommandation écrite à propos d’un cas de diarrhée en maternité dans l’année précédant l’enquête. Par ailleurs, dans les schémas thérapeutiques, seul un éleveur a décrit le protocole exact fourni par son vétérinaire dans les comptes rendus. Les protocoles cités par les exploitants sont donc particulièrement variés et, dans la plupart des cas, ne concordent pas avec les recommandations écrites des prescripteurs.

Les pratiques des éleveurs varient considérablement d’un élevage à l’autre

L’enquête révèle aussi que seulement la moitié des éleveurs affirment adopter une conduite spécifique pour les animaux malades, en les isolant. En outre, 50 % des exploitants interrogés déclarent identifier systématiquement les animaux traités. Les autres ne le font que dans certains secteurs de l’élevage.

L’analyse des questionnaires montre aussi que les éleveurs ne sont qu’un peu plus d’un quart (onze sur quarante) à inscrire systématiquement tous les traitements effectués dans l’élevage. Vingt-six le font de façon occasionnelle et trois jamais.

Comme l’indiquent les résultats présentés dans l’étude, de nombreuses pratiques humaines peuvent générer des écarts entre la prescription et sa réalisation sur le terrain. Elles relèvent d’une part des vétérinaires (manque de formalisation ou de précision dans leur prescription), d’autre part de l’éleveur-infirmier (mauvaise compréhension, pratiques inadéquates, initiatives personnelles, etc.). Les auteurs ne prétendent pas avoir calculé avec exactitude le taux d’observance de la population étudiée. Les données recueillies sont en effet incomplètes, car seuls les achats de médicaments effectués auprès des groupements ont été pris en compte, alors que certains éleveurs s’approvisionnent chez d’autres fournisseurs. Par ailleurs, il n’a pas toujours été facile de confronter les dires des exploitants aux comptes rendus écrits des visites d’élevage, en raison de leur hétérogénéité.

  • (1) Frienship, 1989 ; Jardin, 2000 ; Toulouse, 2007. Source : Coralie Deviers, Pierre Sans, Guy-Pierre Martineau : « De la prescription à son application : une approche de l’observance en élevage porcin », étude présentée lors des journées de l’Association française de médecine vétérinaire porcine (AFMVP), organisées en décembre 2007 à Nantes.

La perception du rôle d’infirmier en élevage

Les réponses des éleveurs de porcs à la question « Qu’est-ce qu’un infirmier en élevage ? » peuvent être classées selon cinq typologies :

- il s’agit tout simplement d’un éleveur ;

- il est là avant tout pour intervenir sur les animaux (soins, manipulations, prise de température) ;

- son rôle est d’essayer de déterminer l’affection dont souffrent les animaux ;

- il doit être capable de détecter les animaux malades, d’établir un diagnostic et de connaître le traitement correspondant ;

- la notion d’infirmier en élevage n’existe pas (une seule réponse correspond à cette typologie).

N. D.
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