L’encéphalopathie spongiforme bovine est-elle encore une source d’inquiétude ? - La Semaine Vétérinaire n° 1317 du 30/05/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1317 du 30/05/2008

Entre nous

FORUM

Un nouveau mode de surveillance s’impose

Corinne Lasmezas, département d'infectiologie de Scripps Florida (Etats-Unis).

Nous assistons à la fin de l’épizootie d’ESB. Depuis le début de l’année, il n’y a eu que six cas en Grande-Bretagne et deux en France. Cela montre l’efficacité des mesures de contrôle mises en place à l’échelle européenne. Il est peu probable que le succès aurait été tel si elles étaient restées l’initiative de quelques pays. Nous avons aussi eu la “chance” que l’ESB se transmette uniquement par voie alimentaire. Elle doit cependant rester un sujet de préoccupation. En effet, nous savons qu’il existe chez les bovins une forme “atypique” d’ESB, dont l’incidence est faible, mais dont on ignore encore si elle est transmissible à l’homme. Il pourrait s’agir d’une forme spontanée d’encéphalopathie spongiforme transmissible (EST) bovine, présente dans tous les pays du monde. Cela implique de maintenir des mesures de protection telles que le retrait du système nerveux central de l’alimentation humaine. Plus qu’une gestion de l’après-crise, c’est un nouveau dispositif de surveillance active “viable” à long terme qui doit être instauré. C’est ce que l’Union européenne a entrepris avec l’introduction progressive de la TSE roadmap.

Le risque est lié aux contaminations iatrogènes

Jeanne Brugère-Picoux, professeur de pathologie du bétail à l'ENV d'Alfort.

En 1988, un article sur l’ESB m’a été refusé, car il s’agissait d’une « curiosité scientifique sans intérêt pour un journal d’actualités ». A l’époque, j’écrivais : « En raison du risque potentiel de zoonose que représente l’ESB (…), il faut espérer que le mode de transmission de cette affection restera “accidentel” et limité au Royaume-Uni. »(1) Il s’agissait en effet d’un accident et la mise en place des mesures liées à la crise de mars 1996 l’a démontré. Comme annoncé, l’ESB est une maladie rare qui doit le redevenir, après un tournant en 2001 en raison du décalage lié à la durée d’incubation moyenne de cette affection chez la vache (cinq ans). Les cas “atypiques” décelés désormais ne sont que des cas autochtones qui n’ont rien à voir avec la souche d’ESB anglaise. Mais le mal est fait : nos importations d’abats bovins à partir du Royaume-Uni ont été multipliées par vingt à partir de 1988 (soit près de 6 000 t/an) avec des abats à risque jusqu’en février 1990 ! De ce fait, avec seize ans d’incubation en moyenne chez l’homme, il fallait s’attendre à une augmentation du nombre de cas de variants de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vMCJ) à partir de 2004 en France. Le nombre de cas est ainsi passé de six fin 2004 à vingt-trois en 2006 ! Mais qui connaît ces données ou qui s’en inquiète ? L’ESB n’est plus une source d’inquiétude. S’il reste une crainte, elle concerne le Royaume-Uni, en raison des contaminations iatrogènes chez l’homme, notamment par transfusion sanguine. Souhaitons que “l’humanisation” de l’agent de l’ESB ne se produira pas.

Le risque pour la santé publique est minime aujourd’hui

Sarah Kahn, experte de l'Organisation mondiale de la santé animale.

La crise de l’ESB en France et en Europe a montré combien un événement sanitaire grave touchant le règne animal peut avoir des conséquences de dimension mondiale. Ces dix dernières années, les progrès des connaissances scientifiques et de la législation pour le contrôle de l’ESB ont conduit à ne recenser aujourd’hui que des cas sporadiques.

L’affection se caractérise par une période d’incubation extrêmement longue et il est donc important de maintenir des mesures de contrôle en place pour des périodes équivalentes. La France a tiré des leçons de cette crise. L’incidence décroissante des cas sur son territoire le confirme. Elle a instauré un système de surveillance des maladies animales performant, qui repose sur une collaboration étroite et efficace entre les services vétérinaires officiels, leurs homologues privés et les éleveurs.

Des interrogations persistent sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST) au sens large. Les recherches continuent afin de mieux comprendre l’origine, la nature et le mode de transmission de la maladie. On peut maintenant affirmer que la non-consommation par les ruminants de farine de viande et d’os, grâce à une législation adaptée et à des contrôles efficaces, suffit pour éradiquer l’ESB. Faudrait-il davantage s’en préoccuper ? Il existe actuellement d’autres priorités en matière de santé publique vétérinaire en raison des dangers liés à la globalisation et aux changements climatiques. D’autant que les études scientifiques prouvent que le risque de santé publique dû à l’ESB est minime. Aujourd’hui, le nombre de cas humains supposés être d’origine alimentaire n’excéderait pas quatre cents au niveau mondial, alors que des chercheurs en avaient imprudemment prédit des centaines de milliers !

  • (1) Bull. Soc. Vét. Pratique de France, décembre 1989.

  • L’intégralité du témoignage de Jeanne Brugère-Picoux est consultable sur www.wk-vet.fr.

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