Le cancer cutané du diable de Tasmanie pourrait être lié à une pollution chimique - La Semaine Vétérinaire n° 1310 du 11/04/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1310 du 11/04/2008

Devil facial tumour disease

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FAUNE SAUVAGE ET NAC

Auteur(s) : Caroline Goutal

Selon certains scientifiques, les biphényls seraient en grande partie à l’origine de la maladie.

La devil facial tumour disease chez le diable de Tasmanie(1), le plus grand marsupial carnivore connu aujourd’hui, engendre des conséquences terribles pour cette espèce menacée d’extinction et entraîne des répercussions sur l’écosystème tasmanien. Les scientifiques semblent franchir des pas significatifs dans la connaissance de l’affection, même si le mystère de ce cancer aux allures contagieuses est encore loin d’être élucidé. Il faut notamment déterminer si la pollution en est une cause ou un facteur aggravant.

Des taux élevés d’hexabromobiphényl et de décabromodiphényl sont observés

Le National Measurement Institute du gouvernement australien a récemment réalisé une étude chez seize diables de Tasmanie vivants ou décédés, atteints de devil facial tumour disease. Des prélèvements de tissus graisseux ont été effectués pour permettre le dosage de différentes substances polluantes, potentiellement carcinogènes. Les résultats mettent en évidence des taux particulièrement élevés d’hexabromobiphényl et de décabromodiphényl. Ces composés chimiques sont des agents ignifuges, généralement utilisés dans le traitement des textiles, des appareils électroniques et des meubles. Hautement polluants, leur emploi par les industries est soumis à une réglementation stricte.

De tels produits ont été testés expérimentalement chez des souris. Leur pouvoir cancérigène chez cette espèce semble indéniable. Il reste à savoir s’il en est de même chez le diable de Tasmanie. Comme ce dernier est un animal charognard et qu’il fouille notamment dans les poubelles pour se nourrir, certains scientifiques estiment que les hautes concentrations découvertes dans les tissus graisseux proviennent probablement d’une ingestion orale massive de biphényls.

La pollution pourrait entraîner une immunosuppression favorable à l’affection

Il convient de déterminer les conséquences réelles de cette pollution, qui divisent les scientifiques. Pour certains, il s’agirait d’un facteur immunosuppresseur qui accroîtrait la vulnérabilité du diable de Tasmanie. Selon eux, la devil facial tumour disease résulterait d’une mutation initiale datant de l’apparition de ce cancer, il y a plus de dix ans (les cellules tumorales sont toutes identiques et semblent issues du clonage d’une seule et même cellule initiale). Les efforts pour en déterminer la cause seraient donc vains.

Aucune différence de concentration de polluants entre animaux sains et malades

Pourtant, des données plus récentes, fournies par des spécialistes en toxicologie, aboutissent à des résultats opposés ! L’étude du Save the tasmanian devil program, dirigée par le gouvernement tasmanien, a intégré cinquante-cinq individus. L’affection était diagnostiquée chez vingt-trois d’entre eux. Les échantillons destinés aux dosages de substances chimiques polluantes ont été prélevés dans les tissus graisseux ou hépatiques. Selon les auteurs, les taux mesurés, quelles que soient les substances chimiques concernées (dioxine, cadmium, polybromodiphényls évoqués précédemment, etc.), ne sont en aucun cas alarmants. Des valeurs élevées étaient attendues en raison de la haute position du diable de Tasmanie dans la chaîne alimentaire. Par ailleurs, les résultats ne montrent pas de différence réellement significative entre les taux retrouvés chez les individus atteints de devil facial tumour disease et les animaux sains. Aucune conclusion sur une quelconque relation entre la maladie et la pollution ne peut donc être hâtivement émise, d’après les auteurs de l’étude. Mais d’autres scientifiques persistent à croire que les biphényls seraient en grande partie à l’origine de l’affection. Des fonds sont actuellement récoltés pour mener d’autres tests plus poussés.

Les recherches se tournent désormais vers la biologie moléculaire

Des recherches génétiques sont actuellement en cours pour mieux appréhender et comprendre la devil facial tumour disease, si particulière. Son mode de transmission se rapproche du type “allogreffe”. Les scientifiques suspectent donc la nécessité d’un contact proche (combats, morsures, etc.). Pour comprendre ce mécanisme, l’équipe scientifique du Cold Spring Harbor Laboratory Research travaille désormais au niveau moléculaire, en étudiant le séquençage génomique des cellules tumorales. En effet, une fois celui-ci entièrement complété, il permettrait probablement d’identifier en grande partie l’origine et le mode d’évolution de la maladie. Mais, au-delà de cette compréhension, cela permettrait surtout de mettre en place des mesures efficaces pour prévenir la diffusion de la maladie et d’élaborer des traitements et des vaccins. Le séquençage fournirait également des informations capitales quant aux précautions à prendre dans les centres de reproduction.

L’étude moléculaire est donc essentielle à la survie de l’espèce. Ces travaux semblent aussi avoir un réel intérêt en termes de biologie tumorale humaine et pourraient déboucher sur des applications chez l’homme.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1282 du 14/9/2008 en page 49.

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