DES IDÉES PRATIQUES POUR RÉFORMER L’ORDRE - La Semaine Vétérinaire n° 1310 du 11/04/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1310 du 11/04/2008

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Auteur(s) : Agnès Faessel

La réforme de l’Ordre des vétérinaires est en marche. Doucement, mais sûrement, les premières étapes sont franchies. Les quelques avis recueillis auprès des praticiens via l’enquête réalisée l’an passé sont riches d’enseignements et d’idées pratiques de renouvellement. Mais ce ne sont que des pistes, que les instances ordinales promettent de prendre en considération dans leur projet de réforme, dont la finalisation exige encore un long travail.

Seul un faible nombre de praticiens s’est mobilisé pour répondre à l’enquête réalisée l’an passé par l’Ordre des vétérinaires pour préparer sa réforme(1). Les résultats font apparaître deux avis lapidaires : « L’Ordre devrait être supprimé » et « il est trop mauvais pour être perfectible ». Mais les répondants ont joué le jeu et l’analyse des questionnaires montre la perception que les vétérinaires ont de l’institution, et ce qu’ils attendent ou redoutent d’une réforme. Celle-ci est en marche depuis 2006 (voir encadré « Historique de la réforme »). Elle mobilise les membres de trois groupes de travail, auxquels les résultats de l’enquête ont été présentés le 21 janvier dernier (voir encadré « Les acteurs de la réforme »). Ils seront également communiqués prochainement aux confrères cotisants dans une lettre-bilan adressée par courrier.

Les confrères plaident pour un volet préventif plus important dans le rôle de gendarme

Le premier enseignement concerne les rôles de l’Ordre. Le volet disciplinaire est l’essentiel de ce que retiennent les vétérinaires des rapports qu’ils entretiennent avec lui. D’une manière générale, « ils le perçoivent souvent comme trop sévère », résume l’analyse. En fait, ils souhaiteraient un Ordre plus juste, avec des dispositions plus équitables, notamment plus permissives en matière de communication autour de leur activité (signalétique, accès aux sites Internet de la structure, etc.), mais aussi une discipline parfois plus stricte, par exemple « en faisant appliquer correctement les peines ». De nombreuses propositions techniques évoquent le besoin d’une gestion plus indépendante des litiges, via une délocalisation de l’instruction des affaires, suggèrent certains. Une séparation des appareils administratif et disciplinaire est également évoquée. Si l’idée est intéressante, les conseillers régionaux, qui s’expriment également dans l’enquête, la jugent difficilement applicable sur le terrain, en raison des moyens humains disponibles. Les questionnaires font aussi apparaître la nécessité d’une meilleure défense des accusés et du respect de la présomption d’innocence, à travers des propositions telles que l’interdiction des plaintes anonymes, l’imputation du coût de la procédure au plaignant ou encore l’application de sanctions financières en cas de plainte infondée.

Les affaires disciplinaires sont difficiles à vivre. La création de cellules d’aide psychologique, dans ce cadre, fait ainsi partie des suggestions lancées pour prévenir la dépression, voire le suicide. Pour ne pas en arriver là, favoriser la conciliation (ou même la rendre obligatoire avant tout dépôt de plainte) et développer la prévention sont quelques-uns des souhaits exprimés. Ainsi, un confrère estime qu’une procédure de prévention des infractions au Code de déontologie, sur plusieurs mois, serait appréciable. Elle suivrait plusieurs étapes (d'information, d’enquête et de sollicitation à la mise en conformité) avant le contrôle et la sanction, le cas échéant.

L’Ordre dans sa forme actuelle souffre également d’une image négative, car il manque de représentativité, selon les confrères. Il serait ainsi trop éloigné de sa base. Ceux qui ont répondu à l’enquête suggèrent de nombreuses pistes pour améliorer cette situation. Elles touchent aux modalités d’élection, instaurant une obligation pour les candidats d’être en exercice (à mi-temps au moins), une limite d’âge et/ou du nombre de mandats (deux au maximum par exemple, y compris pour le président du Conseil supérieur), la prise en compte des votes blancs, l’application du scrutin universel pour l’élection des membres du Conseil supérieur, etc. Une proportionnalité, voire des quotas (selon le type d’activité, mais aussi l’âge et le sexe) sont proposés pour assurer le reflet de tous les profils d’exercice, pour mieux représenter les femmes et les jeunes praticiens. Une plus large information sur les missions des conseillers pourrait aussi améliorer leur recrutement. Un « service ordinal obligatoire », à tour de rôle, est également évoqué. Mais la motivation des représentants, donc leur efficacité, ne risquerait-elle pas d’en souffrir ? Une utilisation plus régulière de la voie du référendum pour les prises de décision importantes est par ailleurs suggérée.

Le rôle de représentation de l’Ordre est également l’objet de critiques. Certains considèrent que l’institution manque d’ouverture sur l’extérieur, en particulier sur l’interprofession et au-delà des frontières, car la fonction européenne de l’Ordre est quasiment systématiquement reconnue. L’enquête confirme qu’une partie des praticiens attend que l’instance « assure la promotion de la profession et des compétences vétérinaires auprès du public ». « Ne pourrait-elle pas communiquer sur la qualité de la formation, l’intérêt des bilans de santé annuels, mais aussi la majoration des tarifs par l’application d’une TVA ? » L’Ordre est souvent jugé trop proche de l’Etat, certains estimant qu’il ne soutient pas assez ses ouailles face aux exigences de ce dernier. Ce rôle de défenseur des intérêts de la profession, habituellement dévolu aux syndicats professionnels, ne fait toutefois pas l’unanimité. Plusieurs avis appuient ainsi le principe de cantonner l’Ordre à sa mission de défenseur de l’éthique et de garant de la qualité de service.

Certains suggèrent de confier à l’Ordre la mission de réguler la concurrence

Pour améliorer le fonctionnement de l’institution, une augmentation des moyens humains et matériels est aussi souhaitée. L’emploi de permanents pour gérer les dossiers techniques fait partie des suggestions. Mais, par ailleurs, les vétérinaires s’expriment fortement contre une hausse de leur cotisation (ils souhaitent plutôt qu’elle diminue). Des propositions à visée économique sont d’ailleurs rapportées : une centralisation de l’administratif, la réunion des “petites régions”. Les évolutions devront donc se raisonner à budget constant. L’enquête fait aussi apparaître la nécessité d’une plus grande transparence dans la gestion budgétaire, avec le souhait de connaître en détail les coûts de fonctionnement des conseils régionaux, l’indemnisation financière des élus, etc.

La participation de l’Ordre au maillage territorial vétérinaire est une autre proposition pratique, en lien avec les préoccupations quotidiennes des praticiens. Il pourrait ainsi « tenir une carte géographique des implantations vétérinaires, des zones blanches, de la densité animale, des revenus vétérinaires, etc. » et même se voir confier la mission de réguler les installations selon la concurrence.

L’ensemble de ces idées, nouvelles ou anciennes, constituent « des pistes de travail », explique Ghislaine Jançon, coordinatrice du groupe “communication et information” (voir l’entretien ci-dessous). Car si la réforme est clairement décidée, « il reste encore beaucoup de travail jusqu’à son aboutissement ».

  • (1) Voir aussi La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/2/2007 en page 19 et n° 1259 du 3/3/2007 en pages 14 et 15.

  • (2) Ordonnance 2005-1040.

Historique de la réforme

Le projet de réforme de l’Ordre des vétérinaires est d’abord issu du constat de l’inadéquation des textes fondateurs, inchangés depuis sa création en 1947, avec les contraintes de terrain. Elle est concrètement entamée en 2006, poussée par le contexte législatif français et européen. En France, une ordonnance du 26 août 2005(2) prévoit en effet la réorganisation des Ordres de certaines professions de santé et de leur fonctionnement (médecins, dentistes, sages-femmes, pharmaciens, etc.). Il était logique de s’en inspirer. Mais surtout, les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), en mars 2006, incitent à la création d’organismes nationaux indépendants habilités à évaluer des acteurs de la santé animale (dont les services vétérinaires), à exercer une autorité sur les vétérinaires et les professions parallèles, et à garantir, entre autres, leur formation.

• Le 21 novembre 2006, une réunion préparatoire arrête la méthodologie à suivre pour mener la réforme, prévoyant notamment une consultation de la base, et crée trois groupes de travail.

• De janvier à mars 2007, les praticiens sont invités à répondre à une enquête sur la réforme.

• Le 21 janvier 2008, les résultats de l’enquête et l’état d’avancement de l’activité des groupes de travail sont présentés au groupe plénier. La nécessité de compléter la consultation, pour obtenir l’avis d’élus ordinaux, de juristes, de représentants des vétérinaires inspecteurs et des professions paravétérinaires, en concertation avec l’ensemble des organismes professionnels vétérinaires, est jugée indispensable à la finalisation du projet de réforme.

Agnès Faessel

Les acteurs de la réforme

Trois groupes de travail se partagent la préparation de la réforme de l’Ordre des vétérinaires.

• Le groupe “analyse de l’existant” est dirigé par Michel Baussier, vice-président du Conseil supérieur, et comprend essentiellement des conseillers régionaux. Il a en charge l’étude de la législation actuelle (le Code rural notamment), afin de proposer une évolution des textes « à périmètre constant », c’est-à-dire en s’intéressant aux seules compétences actuelles de l’Ordre.

• Le groupe “acteurs et missions” est sous l’égide de Christian Rondeau, président du Conseil supérieur. Il s’agit du plus étendu. Il renferme par exemple des représentants de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), du Conseil général vétérinaire, des syndicats professionnels, des écoles vétérinaires, des associations ayant une mission de formation, etc. Il mène une réflexion sur l’évolution de l’exercice et l’éventuel élargissement des prérogatives de l’Ordre.

• Le groupe “communication-information” est coordonné par Ghislaine Jançon, secrétaire générale adjointe du Conseil supérieur. Sa mission est de récolter les avis de la base et de diffuser l’information.

Le groupe plénier réunit ces groupes opérationnels et inclut des représentants de la Direction générale de l’alimentation.

A. F.
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