L’alopécie X est un réel défi diagnostique et thérapeutique - La Semaine Vétérinaire n° 1309 du 04/04/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1309 du 04/04/2008

Dermatologie canine

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Pascaline Pey

Fonctions : interne en clinique des animaux de compagnie à l’école d’Alfort.
Article rédigé avec le groupe de dermatologie-parasitologie de l’ENVA, réuni le 6/1/2008, qui rassemble Geneviève Marignac, Blaise Hubert, Bruno Polack, Odile Crosaz, Céline Hadjaje, Niksa Lemo et Edouard Reyes-Gomez.

Les résultats du traitement de cette affection sont aléatoires.

Le terme “alopécie X”, proposé il y a quelques années, regroupe plusieurs entités(1) dont l’origine est inconnue, mais qui ont en commun une perte initiale des poils au niveau du cou et des flancs, conduisant à une alopécie accompagnée d’une hyperpigmentation cutanée. La pathogénie est encore mal connue. Quelques pistes sont en cours d’exploration. En effet, un déséquilibre des hormones sexuelles synthétisées par les glandes surrénales, des anomalies des récepteurs hormonaux situés au niveau des follicules pileux et une composante génétique sont évoqués. Les races nordiques, le loulou de Poméranie et le caniche nain sont prédisposés et les jeunes mâles sont plus souvent atteints.

Au début, le tableau clinique est dominé par une perte des poils primaires sur les faces latérales du cou, du thorax et des flancs, ainsi qu’une peau hyperpigmentée. La conservation plus ou moins partielle du sous-poil donne au chien une allure de “peluche”. D’autres dermatoses entraînent une présentation clinique similaire : les dysendocrinies (hypercorticisme spontané, hypothyroïdie, hyperœstrogénisme, etc.), les dysplasies folliculaires, certaines affections parasitaires ou à médiation immunitaire (adénite sébacée granulomateuse, pelade, pseudo-pelade, etc.). Pour favoriser le diagnostic histologique, il est préférables que les biopsies concernent les zones d’alopécie, mais aussi la peau saine et la zone intermédiaire. La présence de follicules en flamme est un signe d’appel, mais qui manque de spécificité.

La difficulté à élucider l’étiopathogénie de cette entité s’explique par les faibles connaissances sur la régulation du cycle de croissance du follicule pileux. Certains avancent la présence d’un trop grand nombre de récepteurs à œstrogènes pour expliquer la chute des poils. Chez la souris, ils jouent un rôle dans la transition entre les phases télogène et anagène. Mais des études montrent que le fulvestrant, antagoniste pur de ces récepteurs, n’entraîne pas la repousse du poil chez les animaux atteints d’alopécie X (voir bibliographie 1) et qu’aucune diminution du nombre des récepteurs folliculaires n’est notée lors de la repousse chez les animaux traités avec de la mélatonine (voir bibliographie 2).

Les implants de mélatonine et le trilostane sont des pistes thérapeutiques intéressantes

La mélatonine bloque par ailleurs l’activation des récepteurs à œstrogènes chez la femme dans les cancers du sein. Son efficacité dans le traitement de l’alopécie X (administration toutes les douze heures) reste toutefois douteuse et n’est intéressante que dans certaines formes. Son mécanisme d’action vis-à-vis de cette affection est inconnu (voir bibliographie 4). Le mode d’administration est important. L’utilisation d’implants sous-cutanés de mélatonine chez les caprins permet de réguler la sécrétion hormonale de la glande pinéale. Chez le furet, l’emploi d’implant (inspiré de ce qui est fait dans les élevages de visons) apparaît comme une alternative intéressante (J.-F. Quinton, communication personnelle).

Le trilostane, quant à lui, est intéressant par son action inhibitrice de la 3-β-hydroxystéroïde déshydrogénase, donc chez les chiens qui montrent une stéroïdogenèse anormale. Chez ces mêmes animaux, des concentrations hormonales anormalement élevées sont observées après une stimulation à l’ACTH (la 17-hydroxyprogestérone par exemple). Le rapport cortisol libre sur créatinine urinaire (RCCU) est, lui aussi, augmenté. Dans cette situation précise, le trilostane a prouvé son intérêt et une action périphérique directe sur les récepteurs folliculaires est suggérée (voir bibliographie 3 et 5). Si possible, un dosage de certaines hormones sexuelles, avant et après la stimulation par l’ACTH, est souhaitable, mais les laboratoires qui pratiquent ces dosages sont peu nombreux et ces analyses sont coûteuses. Ainsi, le traitement de l’alopécie X n’est pas codifié. La première étape passe néanmoins par la stérilisation afin de supprimer toutes les autres sources d’hormones sexuelles. Si aucune repousse des poils n’est notée après trois mois, un traitement médical peut être proposé. Ce délai est plus long chez les races nordiques, le cycle pilaire se comptant en années. L’alopécie X relève davantage du domaine de la cosmétologie, car il n’y a aucune répercussion systémique. Les messages à véhiculer au propriétaire sont la difficulté d’établir un diagnostic de certitude, l’aspect aléatoire de la démarche thérapeutique, la repousse possible des poils après la castration (dans 85 % des cas) ou après le traitement médical, mais aussi l’éventuelle rechute à la suite de la stérilisation ou de l’arrêt du traitement.

  • (1) Le déficit en hormones de croissance, le déséquilibre des hormones sexuelles d’origine surrénalienne, les dermatoses répondant à l’hormone de croissance ou à la castration, le déséquilibre gonadique, l’alopécie répondant à la biopsie, la dysplasie folliculaire des races nordiques, l’hyposomatotropisme de l’adulte.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1. L.A. Frank : « Oestrogen receptor antagonist and hair regrowth in dogs with hair cycle arrest (alopecia X) », Veterinary Dermatology, 2007, n° 18, pp. 63-66.
  • 2. L.A. Frank et coll. : « Oestrogen receptor evaluation in pomeranian dogs with hair cycle arrest (alopecia X) on melatonin supplementation », Veterinary Dermatology, 2006, n° 17, pp. 252-258.
  • 3. F. Leone et coll. : « The use of trilostane for the treatment of alopecia X in alaskan malamutes », J. Am. Anim. Hosp. Assoc., 2005, n° 41.
  • 4. L.A. Frank et coll. : « Adrenal steroid hormone concentrations in dogs with hair cycle arrest (alopecia X) before and during treatment with melatonin and mitotane », Veterinary Dermatology, 2004, n° 15, pp. 278-284.
  • 5. R. Cerundolo et coll. : « Treatment of canine alopecia X with trilostane », Veterinary Dermatology, 2004, n° 15, pp. 285-293.
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