L’imagerie est indispensable au bilan lésionnel complet - La Semaine Vétérinaire n° 1308 du 28/03/2008
La Semaine Vétérinaire n° 1308 du 28/03/2008

Syndrome brachycéphale

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : François Jacquet

Deux étapes accompagnent la prise en charge d’un chien atteint d’un syndrome brachycéphale : le bilan lésionnel respiratoire d’une part, digestif d’autre part.

Un bilan clinique complet de l’animal est nécessaire lors de syndrome brachycéphale. Il faut déterminer la gravité de l’affection et identifier les éventuelles complications fréquemment associées, qu’elles soient respiratoires ou digestives. L’apport de l’imagerie est alors essentiel.

Le type brachycéphale provient d’une sélection génétique progressive qui, chez certaines races (bouledogue anglais, bouledogue français, carlin, shi-tsu, pékinois), a conduit à un hypertype hypométrique, ultrabréviligne et ultraconcaviligne. Le cas typique de l’animal atteint d’un syndrome brachycéphale est le bouledogue qui “ronfle”. Cela peut paraître étonnant, car les bouledogues anglais ont été sélectionnés il y a une centaine d’années comme chiens de combat de taureaux, d’excellentes qualités d’endurance étant alors requises. Mais par la suite, la sélection s’est opérée dans un but uniquement esthétique, afin de fournir des animaux de compagnie. Le raccourcissement de la longueur du corps au maximum s’est accompagné de l’apparition d’anomalies comme les vertèbres cunéiformes. La peau, dont la dimension est restée inchangée, est sujette à différentes affections, telles que la sténose des narines. Les plis cutanés prédisposent à certains troubles dermatologiques, par exemple l’intertrigo. Les muqueuses, elles, présentent une hyperplasie relative. Le voile du palais, trop volumineux, entre dans la trachée et provoque une gêne respiratoire. Une hyperplasie pylorique est en outre notée.

La visite est souvent motivée par les signes respiratoires

Les symptômes de l’animal présenté pour un syndrome brachycéphale sont de deux natures. Les signes majeurs, qui motivent généralement la consultation, sont respiratoires : des ronflements, une dyspnée inspiratoire, une intolérance à l’effort, à la chaleur ou au stress et, parfois, une cyanose, des syncopes ou une détresse respiratoire dans les cas les plus graves. Des dysfonctionnements digestifs, dus à un reflux gastro-œsophagien consécutif à la dépression respiratoire, sont aussi fréquemment rapportés. Ils se manifestent par du ptyalisme, des régurgitations ou des vomissements. Ces troubles, étroitement liés, doivent être pris en charge de manière globale. Le recours à l’imagerie est alors essentiel pour ajuster au mieux la démarche médicale et chirurgicale.

L’examen radiographique est la première phase du bilan lésionnel respiratoire

Les anomalies anatomiques de l’appareil respiratoire sont associées au raccourcissement et à l’élargissement du crâne. Le recueil des commémoratifs auprès des propriétaires revêt une grande importance, afin de préciser les signes observés, leur évolution, le mode de vie de l’animal, etc. Différents éléments font l’objet d’une inspection minutieuse. Le signe le plus évident est souvent la sténose des narines. Le voile du palais est allongé, associé à une hyperplasie du palais mou entraînant une compression du naso-pharynx. Une macroglossie est fréquemment observée.

Un examen radiographique thoracique permet la poursuite de l’exploration respiratoire. Deux clichés, avec des incidences latéro-latérale et ventro-dorsale, sont réalisés. Ils peuvent notamment révéler une hypoplasie trachéale, mise en évidence par une diminution du diamètre de la trachée. Toute exploration par trachéoscopie est alors à proscrire, car l’irritation causée peut majorer dangereusement les difficultés respiratoires. La présence de signes de bronchopneumonie, liée à des fausses déglutitions, a une valeur pronostique négative. Une densification des lobes pulmonaires apicaux est alors notée.

Une laryngoscopie permet d’évaluer la longueur et l’épaisseur relatives du voile du palais. Les ventricules laryngés, qui forment normalement de petits sacs invisibles à l’entrée du larynx, peuvent présenter une éversion en raison de l’augmentation de pression liée aux difficultés respiratoires. Une amygdalite ou des ulcères buccaux secondaires aux reflux gastriques acides sont parfois observés. Un collapsus laryngé, consécutif à l’affaissement des cartilages suite à la dépression respiratoire, peut être présent. Aucune solution chirurgicale fiable n’est alors envisageable.

L’exploration respiratoire se termine par une fibroscopie des voies aériennes supérieures, effectuée chez un animal placé en décubitus sternal. Elle permet d’évaluer la longueur du palais mou par rapport au bord dorsal du cartilage épiglottique, d’examiner le larynx (éversion des cartilages laryngés) et d’estimer la présence d’une macroglossie, d’une amygdalite, d’un collapsus laryngé ou de polypes nasopharyngés.

Dans une étude, 97,3 % des chiens atteints présentent des lésions digestives

Lors d’anomalies digestives, les propriétaires rapportent souvent des épisodes de régurgitation pendant les phases d’activité, et des vomissements, parfois deux jours après le repas. D’après la littérature, 75 % des animaux brachycéphales présentent des signes cliniques, 97,2 % des troubles œsophagiens ou gastriques, et 98 % une gastrite chronique à l’examen histologique. Un traitement digestif antiacide améliore alors les symptômes respiratoires. Une fibroscopie digestive haute est donc indiquée chez tout animal présenté pour un syndrome brachycéphale. Une biopsie de la muqueuse digestive peut être réalisée.

Une étude a été menée chez 73 chiens atteints d’un syndrome brachycéphale(1). La plupart sont des bouledogues français (67 %, 49 sur 73), les autres races représentées étant le bouledogue anglais (13), le carlin (5), le pékinois (2), le sharpei (1), le lhasa apso (1), le boxer (1) et le boston terrier (1). Une endoscopie digestive haute est réalisée chez chacun d’eux, afin de déterminer l’étendue des lésions digestives. Presque tous les animaux (97,3 %, soit 71 sur 73) présentent des lésions digestives, qui se situent au niveau de l’œsophage, de l’estomac ou du duodénum. Concernant l’œsophage, une anomalie est notée chez 60,3 % des chiens (44). Une œsophagite distale est identifiée chez 37 % des individus (27), une atonie cardiale (cardia anormalement ouvert) chez 38,4 % (28), un reflux gastro-œsophagien chez 31,5 % (23), une déviation œsophagienne (œsophage en “S”) chez 16,4 % (12) et une hernie hiatale chez 4,1 % (3). Le bilan lésionnel de l’estomac révèle des anomalies chez 97,3 % des animaux (71 sur 73). Une gastrite est notée chez 89 % d’entre eux (65). 86,3 % (63) présentent une hyperplasie du pylore, liée à un orifice pylorique trop petit ou à des plis surnuméraires. Une stase gastrique (les animaux étaient à jeun depuis vingt-quatre heures au moment de l’examen) est observée chez 31,5 % des chiens (23). Les autres anomalies sont une sténose pylorique chez 30,1 % (22), un reflux duodéno-gastrique chez 8,2 % (6) et une atonie pylorique (pylore anormalement ouvert) chez 5,4 % (4). La visualisation endoscopique du duodénum est impossible chez 7 sujets en raison de la sténose pylorique. Une duodénite est identifiée chez 53 % des autres (35 sur 66).

Le recours à l’imagerie médicale est donc nécessaire dans le cadre de la prise en charge du syndrome brachycéphale, pour réaliser un bilan lésionnel complet, aussi bien respiratoire que digestif. L’objectif est d’établir un plan de traitement précis et d’annoncer un pronostic au propriétaire. En pratique, une seule anesthésie doit permettre la prise en charge médicale et chirurgicale. Les radiographies thoraciques sont réalisées en premier lieu chez l’animal vigile pour détecter toute complication potentielle (bronchopneumonie, hypoplasie trachéale, insuffisance cardiaque, etc.). Le traitement médical dépend des observations endoscopiques et histologiques.

  • (1) Cyrill Poncet et coll. : « Prevalence of gastrointestinal tract lesions in 73 brachycephalic dogswith upper respiratory syndrome », Journal of small Animal Practice, 2005, n° 46, pp. 273-279.

CONFÉRENCIER

Cyrill Poncet, diplomate de l’European College of Veterinary Surgeons (ECVS), praticien au centre hospitalier vétérinaire Frégis (Arcueil, Val-de-Marne).

Article rédigé d’après la conférence « Apport de l’imagerie dans la prise en charge du syndrome brachycéphale », présentée au congrès de l’Afvac 2007.

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