LA RÉVOLUTION THÉRAPEUTIQUE EST EN MARCHE INTERROMPUE DEPUIS TRENTE ANS - La Semaine Vétérinaire n° 1285 du 05/10/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1285 du 05/10/2007

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Auteur(s) : Eric Vandaële

Médicaments plus efficaces, plus sûrs ou plus faciles d’emploi : l’arsenal thérapeutique récent s’est élargi tous azimuts et a souvent, mais pas toujours, remplacé les bons vieux produits.

Nous regardons souvent avec nostalgie vers le passé. Ainsi, il est habituel d’entendre que « les bons vieux produits disparaissent et ne sont pas remplacés » ou que les « laboratoires pharmaceutiques n’innovent plus ». En résumé, « hier, c’était mieux qu’aujourd’hui » et « demain sera pire ». Les laboratoires participent parfois à cette morosité lorsqu’ils soulignent qu’un tiers de leur budget de recherche en Europe est consacré, non pas à l’innovation, mais à la défense des médicaments anciens.

Pourtant, depuis la loi sur la pharmacie vétérinaire de 1975 et son décret d’application de 1977, il y a tout juste trente ans, les nouveautés n’ont pas manqué (voir tableau). La prévention comme le traitement de la majorité des maladies ne se font plus avec des produits des années 60, mais avec ceux postérieurs aux années 80. Des classes thérapeutiques sont apparues et ont contribué au développement de nouveaux marchés, particulièrement chez les animaux de compagnie. Même dans les trois classes thérapeutiques vétérinaires historiques (les antibiotiques, les antiparasitaires, les vaccins), les spécialités les plus utilisées sont aussi les plus récentes, car elles apportent souvent un bénéfice supplémentaire.

Trois sources d’innovation : la pharmacie, l’agrochimie, les biotechnologies

Le succès rencontré par certains poids lourds de ces innovations, comme celles de 1981, l’année des premières autorisations de mise sur le marché (AMM) pour un endectocide (ivermectine) et un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) vétérinaire (flunixine), a d’ailleurs conduit au développement de nombreux concurrents et génériques. Depuis 2001, les trois quarts des nouvelles AMM ne sont pas accordées à des produits innovants, mais à des génériques (copies ou AMM bis) de médicaments majeurs existants. A contrario, moins d’un quart des AMM attribuées chaque année correspondent à des molécules ou à des vaccins nouveaux.

L’innovation en santé animale dispose de trois sources principales : la recherche pharmaceutique, agrochimique et la biologie avec les biotechnologies. Le screening pharmaceutique a d’abord bénéficié à l’antibiothérapie. Même si la quasi-totalité des nouveaux antibiotiques ne sont pas disponibles chez l’homme, ils sont issus de la recherche humaine et appartiennent à des classes antibiotiques déjà utilisées en médecine. Cela alimente d’ailleurs l’éternel débat sur l’impact des usages vétérinaires sur l’antibiorésistance en santé humaine. Ainsi, l’arsenal vétérinaire s’est enrichi de céphalosporines de troisième et quatrième générations à partir de 1992, de fluoroquinolones de troisième génération à compter de 1997.

Les trous se comblent peu à peu et des molécules se démocratisent

La recherche humaine a permis de combler quelques “vides thérapeutiques” chez les chiens et les chats. Des molécules, autrefois connues des seuls spécialistes, sont devenues accessibles à tous, notamment les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA ou “pril”), de nombreux AINS, un inhibiteur de la pompe à proton, un immunomodulateur, des traitements du comportement, des affections endocriniennes (diabète, hyperthyroïdie féline, hypothyroïdie canine, syndrome de Cushing, etc.). Il est vrai que, parfois, le coût de ces nouveautés a pu malheureusement en réduire la diffusion.

La recherche agronomique et phytopharmaceutique est aussi à l’origine des nouveaux antiparasitaires, en particulier les antipuces ou les antitiques. L’Institut national de la recherche agronomique (Inra) a par ailleurs participé au développement de programmes de maîtrise de la reproduction dans les productions animales.

Des vaccins toujours plus nombreux, plus sûrs, plus efficaces

La troisième source importante d’innovations pour la santé animale, ce sont les biotechnologies et la recherche biologique. La liste des maladies infectieuses, qui peuvent être de mieux en mieux maîtrisées par la vaccination, n’a cessé de s’allonger chez toutes les espèces animales, jusqu’aux poissons. Le débat sur la complémentarité de la prophylaxie médicale avec les mesures sanitaires redevient aussi d’actualité dans le cadre des maladies réglementées, en France ou en Europe, et l’émergence de la fièvre catarrhale ovine ou de l’influenza aviaire. Les adjuvants, essentiels à l’efficacité des vaccins inactivés, mais aussi à l’origine de réactions locales ou générales, ont également progressé, tout comme la sélection des antigènes plus concentrés ou performants, voire insérés dans des vaccins recombinants.

Des rapports bénéfice/risque plus favorables ou, surtout, mieux évalués

A quoi servent toutes ces nouveautés ? Les vraies innovations n’apportent pas seulement un choix, une concurrence supplémentaire par rapport aux médicaments existants, mais un bénéfice ou une praticité supplémentaire et/ou un risque réduit. Le premier objectif des nouveautés est de combler des “vides thérapeutiques” : des médicaments curatifs, surtout chez les chiens et les chats, mais aussi préventifs, avec de nouvelles valences vaccinales pour toutes les espèces. Parfois, ces vides sont comblés par des extensions d’AMM de produits plus anciens, comme pour quelques intramammaires étendus au tarissement des brebis, les anticoccidiens (diclazuril, toltrazuril), un IECA élargi aux chats insuffisants rénaux, etc.

Dans certains cas, les nouveaux médicaments en concurrencent de plus anciens par une meilleure efficacité ou innocuité. D’autres produits ne sont pas plus efficaces, mais seulement mieux évalués au niveau de l’indication, notamment par rapport à des spécialités humaines (les IECA, la lévothyroxine, ou encore la vitamine K1). Aujourd’hui, l’absence d’anticancéreux vétérinaires, qui oblige à recourir aux spécialités humaines, représente un risque élevé pour l’animal, son propriétaire et le vétérinaire. Le développement d’anticancéreux vétérinaires, sans être plus efficaces ou moins toxiques que leurs équivalents humains, serait néanmoins bénéfique.

Des effets indésirables diminués compatibles avec de nouvelles pratiques

L’intérêt des nouveaux produits peut aussi porter sur l’innocuité. Le dernier dermocorticoïde, l’acéponate d’hydrocortisone, a pour principal atout la quasi-absence d’effets indésirables pour l’animal. Les bénéfices des nouveaux AINS (préférentiels cox 2, dual AINS ou coxib) portent surtout sur la tolérance digestive. En productions animales, la tolérance locale des nouveaux antibiotiques à longue action est meilleure.

C’est parfois la sécurité du consommateur (ou de l’industrie laitière) qui est accrue avec, par exemple, un antibiotique comme le ceftiofur et son délai d’attente dans le lait nul, sans risque d’inhibiteurs. A l’inverse, l’absence d’innovation est une source d’insécurité, pour l’animal comme pour le consommateur, par l’obligation d’extrapoler l’usage de médicaments existants.

Des stratégies pour faciliter l’administration ou diminuer la contention

Particularité vétérinaire, la facilité d’emploi est aussi une grande source d’innovation devant les difficultés de contention des animaux ou d’administration des produits. Les traitements à longue action sont souvent couronnés de succès : antibiotiques, antiparasitaires rémanents ou sous forme de bolus, d’implant, etc. L’objectif est d’éviter d’avoir à répéter les administrations. Le développement de vaccins multivalents, de protocoles avec moins d’injections, de médicaments à large spectre anti-infectieux (parfois avec un AINS) ou antiparasitaire, répond à cette même attente de simplification des protocoles et de baisse du coût lié à l’administration de plusieurs médicaments.

La facilité d’emploi passe aussi par une diminution de la contention. Cela fait le succès des formes spot-on chez les chats et les chiens et des pour-on chez les bovins. En outre, l’utilisation facilitée des formes orales est aussi étudiée, avec une meilleure dissolution des poudres solubles en élevages hors sol, le développement des pâtes orales pour chevaux ou la multiplication plus récente des comprimés appétents pour les chiens ou les chats.

Les innovations répondent en outre à des attentes sociétales, voire politiques. L’apparition de certains vaccins a diminué l’usage d’antibiotiques. De nouveaux protocoles réduisent aussi le risque d’antibiorésistance pour les fluoroquinolones. La souffrance animale est prise en compte avec l’apparition de nouveaux analgésiques. Au bilan, le rapport bénéfice-risque-praticité s’est amélioré, parfois, il est vrai, au détriment du coût. Et il reste encore tant à faire…

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