Le chat est un réservoir de virus, de bactéries et de parasites - La Semaine Vétérinaire n° 1275 du 23/06/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1275 du 23/06/2007

Maladies émergentes félines

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Gwenaël Outters

La médiatisation des risques liés aux maladies infectieuses a mis à la mode le concept d’émergence, même si celui-ci n’est pas nouveau pour la communauté scientifique.

La dénomination “maladie infectieuse émergente” n’est pas nouvelle. Elle est apparue dans les années 80 avec la maladie de Lyme, la légionellose, puis le Sida liéauvirusdel’immunodéficience humaine (VIH) identifié en 1983. Elle est toujours au cœur de l’actualité avec la grippe aviaire ou le chikungunya, les fièvres hémorragiques, les fièvres récurrentes (borrélioses), le virus Hendra ou les autres paramyxoviroses.

En 2003, nos confrères Bernard Tomaet Etienne Thiry définissent une maladie émergente comme celle « dont l’incidence réelle augmente de manière significative par rapport à une population donnée, une région donnée ou une période donnée ». L’émergence vraie est à distinguer de l’émergence apparente qui peut être simplement liée à l’amélioration des outils diagnostiques, des moyens de dépistage et/ou des réseaux d’épidémiosurveillance.

La définition de Mark E.J. Woolhouse, en 2002, inclut un certain nombre de critères constatés dans la plupart des maladies émergentes durant les dernières décennies : présence de virus à ARN ; zoonose avec un large spectre d’hôtes réservoirs, potentiellement transmissible entre hommes ; récepteurs cellulaires conservés entre espèces hôtes ; transmission vectorielle ; aire géographique avec changement écologique, démographique, social agissant comme facteur d’émergence.

Concernant les maladies infectieuses chez le chat, outre la rage qu’il faut garder à l’esprit (un cas félin observé en 1998), la maladie d’actualité l’hiver dernier était la grippe aviaire liée au virus H5N1. La contamination possible du chat était connue dans la communauté scientifique depuis au moins 2004, mais la médiatisation qui a entouré la mort d’un chat en Allemagne (île de Rügen) en février 2006 a diffusé cette information auprès du grand public. Par ailleurs, la contamination et le décès de grands félidés des suites de la grippe aviaire dans un parc zoologique de Thaïlande, après l’ingestion de carcasses d’oiseaux contaminées, ont aussi été médiatisés. Cependant, il n’existe aucun cas de passage de la maladie entre chats ou entre le chat et l’homme.

Le chat joue un rôle potentiel dans plusieurs viroses

Le calicivirus félin (FCV), agent pathogène associé au coryza, est un virus à ARN particulièrement labile. Ces dernières années, un nouveau “syndrome systémique sévère” a été attribué à de nouvelles souches virulentes du FCV. Des cas ont été rapportés aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, mais également à l’école vétérinaire de Toulouse cette année.

Il existe d’autres viroses pour lesquelles le chat joue un rôle potentiel émergent. Le virus Cowpox, plutôt endémique en Europe de l’Ouest, est à surveiller, car s’il est inoffensif chez le chat sain, sa présence est fatale pour les animaux séropositifs vis-à-vis du virus de l’immunodéficience féline (FIV). Les arboviroses, notamment celle due au virus West Nile, sont des maladies exotiques, tropicales, pour lesquelles le chat pourrait être un hôte accidentel, donc un réservoir. Celui-ci pourrait par ailleurs constituer un réservoir ou un cul-de-sac épidémiologique pour le virus du Nil occidental ou les hantavirus. En outre, le virus de Borna provoque chez lui une encéphalomyélite mortelle en deux à quatre semaines. Le diagnostic différentiel avec la rage requiert une analyse histologique.

L’azithromycine est intéressante lors de maladie induite par un agent Ehrlichia-like

Les maladies bactériennes sont majoritairement représentées par les rickettsies au sens large : les bartonelles, les hémobartonelles et les agents Ehrlichia-like. Ces bactéries intracellulaires, difficiles à cultiver, ont fait l’objet d’une nouvelle classification (les Haemobartonella sont devenues les Mycoplasmataceae).

Des bactéries du genre Bartonella (B. henselae et B. clarridgeiae) sont responsables de la maladie des griffes du chat chez l’homme, mais sont rarement symptomatiques chez l’animal. Le mode de transmission le plus plausible fait intervenir des griffes souillées par les déjections contaminées de Ctenocephalides.

De même, les maladies induites par les agents de type Ehrlichia-like (ehrlichiose, anaplasmose, néorickettsiose) sont encore méconnues, mais bien présentes chez le chat. Les vecteurs incriminés sont les tiques dures, bien que la transmission de l’infection n’ait pas encore été démontrée. L’hyperthermie, les syndromes algiques et les troubles hématologiques (anémie, thrombopénie principalement) constituent les symptômes principaux. Chez le chat, leur traitement nécessite l’administration de doxycycline à la dose de 5 à 10 mg/kg/j pendant quatorze jours (au lieu de quatre semaines chez le chien à raison de 10 à 20 mg/kg/j) ou d’azithromycine à la posologie de 5 à 15 mg/kg/j pendant cinq jours. Cette dernière molécule, qui ne nécessite qu’un traitement court, est particulièrement intéressante chez le chat.

Parmi les maladies parasitaires, la leishmaniose reste rare dans l’espèce féline, même si le nombre de cas décrits ne cesse de s’accroître.

Au final, ces maladies émergentes ne font intervenir qu’un faible nombre d’agents pathogènes, mais les connaissances chez le chat n’en sont encore qu’à leurs balbutiements.

Il est d’ailleurs aujourd’hui impossible de savoir si certaines sont des zoonoses. Cependant, ces infections semblent liées au mode de vie du chat et il apparaît que les puces jouent un rôle prépondérant dans leur transmission.

CONFÉRENCIER

Luc Chabanne, maître de conférences en pathologie médicale à l’école vétérinaire de Lyon.

Article rédigé d’après la conférence « Maladies infectieuses émergentes », présentée lors du congrès 2006 de l’Afvac à Bordeaux.

Bibliographie

  • • R. Maillard, H. Boulouis, L. Halos : « Les bartonelloses chez le chat, les chiens et les bovins », Le Point Vétérinaire, 2005, vol. 36, n° 254, pp. 22-27.
  • • L. Halos : « La borréliose de Lyme chez le chien et chez le chat », Le Point Vétérinaire, 2005, vol. 36, n° 253, pp. 48-53.
  • • L. Halos : « Les ehrlichioses félines, des bactérioses émergentes ? », Le Point Vétérinaire, 2004, vol. 35, n° 248, pp. 48-50.
  • • B. Chomel : « Zoonoses bactériennes émergentes », Le Point Vétérinaire, 2000, vol. 31, n° 207, pp. 15-22.
  • • S. Zientara, V. Legeay : « Zoonosesvirales émergentes », Le Point Vétérinaire, 2000, vol. 31, n° 207, pp. 23 à 30.
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