La technique du questionnement permet de relancer le dialogue sur des bases claires - La Semaine Vétérinaire n° 1271 du 26/05/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1271 du 26/05/2007

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Auteur(s) : Gil Wittke

Dans le dernier numéro(1), nous avions laissé Aymeric et Jean-Bertrand en pleine discussion sur l’analgésie, le second se sentant agressé et ayant l’impression que ses pratiques en la matière étaient remises en cause. Face à cette situation, et pour parvenir à persuader son associé de la justesse de ses vues, Aymeric choisit de changer de tactique.

« Jean-Bertrand, je souhaite que nous développions l’analgésie, car je suis convaincu qu’on n’en fait jamais trop dans ce domaine. En quoi mon discours te laisse penser que tu fais mal ?

Mais c’est évident. Tu veux me faire croire que si je ne bourre pas un animal de morphine, je suis un ringard et que je le torture.

Est-ce que j’ai employé le mot “ringard” ?

Non. Mais tu déboules toujours avec tes nouveautés et tes “y a qu’à” et “faut qu’on”, et tu veux que nous fassions tous comme tu as dit.

Excuse-moi si je t’ai choqué. Qu’est-ce qui te gêne dans l’idée d’utiliser de la morphine ?

Je voudrais surtout que cela ne mette pas tous mes protocoles en l’air.

Qu’est-ce que tu entends concrètement par “mettre tes protocoles en l’air” ?

Par exemple, s’il y a des interactions avec la médétomidine… »

Explorer le monde de l’autre permet de clarifier la situation

Dans cet échange, Aymeric emploie à bon escient la loi des variabilités requises et décide de ne plus chercher à convaincre Jean-Bertrand en utilisant de nouvelles références bibliographiques et des sentences d’experts ou en rebondissant face aux attaques. Il reformule et questionne, parvenant ainsi à désamorcer le conflit qui pointait. Il a un objectif bien défini (développer l’analgésie) et il suppose que l’opposition de Jean-Bertrand est d’abord liée à sa méconnaissance des antalgiques morphiniques et apparentés. Il utilise alors le questionnement, qui lui permettra d’explorer le monde de son associé pour découvrir ce qui pose vraiment problème. Le but de cette démarche est d’obtenir un ou plusieurs renseignements. Dans le cadre des relations interpersonnelles, il est aussi un outil de clarification qui permet de :

- décrypter les “nominalisations”, ces mots fourre-tout dont chacun se fait une idée et qui empêchent donc de résoudre les problèmes. Par exemple : « Je veux plus de liberté », « ce n’est pas honnête », « c’est dangereux, c’est grave », « je suis ringard, je fais mal », etc. ;

- retrouver l’univers du factuel : quand Aymeric entend les mots « mettre mes protocoles en l’air », il comprend, d’une part que Jean-Bertrand est inquiet (et qu’il faut accepter cette inquiétude), et d’autre part que l’expression est floue. Après sa question, arrivent alors les explications concrètes, c’est-à-dire « les interactions avec la médétomidine », auxquelles il est plus aisé de répondre.

Trois types de questions permettent de faire avancer la discussion

Pour mener à bien l’étape du questionnement, il est possible de faire appel à plusieurs types de questions.

• Les questions ouvertes appellent une réponse argumentée et non cadrée : « Qu’est-ce qui… ? », « qu’y a-t-il ? », « qu’avez-vous vu ? », « que penses-tu de… ? » Il existe une question ouverte spécifique particulièrement efficace pour les nominalisations et pour éviter les incompréhensions : « Que veux-tu dire concrètement par… ? »

• Les questions exploratoires : c’est le fameux hexamètre de Quintilien, autrement désigné par son acronyme CQQCOQ (P), qui permet de définir précisément une situation, une idée ou un projet, comme dans un examen médical : C (comment ?), Q (qui, avec qui ?), Q (quoi ?), C (combien ?), O (où ?), Q (quand ?). Le P (pourquoi ?) est parfois ajouté, mais il peut être dangereux, car cela tend à amener l’interlocuteur à se justifier et à créer un lien de cause à effet. Ainsi, Aymeric aurait pu poser la question « pourquoi ne veux-tu pas utiliser la morphine ? ». Il aurait pu recevoir comme réponse : « Parce que c’est dangereux, c’est connu ! ». Il aurait alors fait face à une nominalisation (que veut dire concrètement « dangereux » ?), sans avoir avancé.

• Les questions fermées sont celles qui ne présentent qu’une alternative : oui/non, blanc/noir, au-dessus/en dessous, demain à 15 h ou après-demain à 18 h, etc.

Dans notre exemple, Aymeric utilise alternativement les questions ouvertes et fermées et se garde bien de répondre ou d’argumenter tant que n’ont pas émergé les raisons du blocage et tant que Jean-Bertrand reste dans le flou. Mais dans un questionnement, même mené dans les règles de l’art, il est possible que surgisse une difficulté, c’est-à-dire un blocage. Un prochain article détaillera comment procéder dans un tel cas de figure.

  • (1) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1270 du 19/5/2007 en page 56.

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