HORS EXAMEN CLINIQUE, PASSEZ D’ABORD PAR LA CASE BILAN ANNUEL - La Semaine Vétérinaire n° 1270 du 19/05/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1270 du 19/05/2007

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Auteur(s) : Eric Vandaële

Les règles du jeu du monopoly de la pharmacie vétérinaire viennent d’être modifiées. Pour obtenir des médicaments « hors examen clinique », il faut d’abord passer par les cases « bilan annuel » et « protocole de soins ». Les vétérinaires sortent ainsi de la case « prison ». Et les éleveurs s’arrêtant sur les nombreuses cases « officine » pourront renouveler leurs stocks de médicaments préventifs.

Le nouveau décret “prescription-délivrance-colisage” est paru, avec son arrêté d’application, après huit ans d’attente(1). Il crée un nouvel équilibre, de nouveaux droits pour les praticiens ruraux (et équins) et de nouveaux devoirs pour tous les vétérinaires, canins inclus. Dans les domaines des productions animales et des équidés, les praticiens acquièrent officiellement le droit de prescrire et de délivrer « hors examen clinique ». En contrepartie, les éleveurs et les confrères ont aussi de nombreuses obligations supplémentaires : la réalisation d’un bilan annuel, la rédaction d’un protocole de soins, et au moins une visite de suivi entre deux bilans annuels en sus des visites habituelles. En outre, des quotas d’animaux (10 000 unités gros bovins, 35 000 veaux de boucherie ou 2 000 équidés) ou d’élevages (250 élevages ovins ou porcins, 200 pour les caprins, 400 pour les lapins) empêchent qu’un seul vétérinaire dit « affairiste » contrôle, sur le papier plutôt que dans les exploitations, la prescription et la délivrance de centaines d’éleveurs au détriment de ses confrères. Ces quotas sont d’autant plus importants que ces visites ne sont pas rémunérées par l’Etat, mais sur un mode de libre concurrence entre vétérinaires. Il était donc à craindre une certaine surenchère concurrentielle, que les quotas limitent grandement.

Les représentants des vétérinaires ruraux, qui ont négocié depuis si longtemps ce décret, sont donc globalement soulagés, et même ravis de cette parution le jour même de l’élection du nouveau président de la République(2). Car la non-publication avant la nomination d’un nouveau gouvernement aurait pu être fatale à ce dispositif si longtemps et si âprement défendu.

Une autre avancée majeure est la reconnaissance par la nouvelle réglementation de l’exercice de groupe de la pharmacie vétérinaire. Ainsi, pour la prescription-délivrance « hors examen clinique », les confrères qui partagent la même structure professionnelle peuvent remplacer celui qui a réalisé le bilan, le protocole et la visite de suivi en cas d’absence ou d’empêchement. Le vétérinaire “remplaçant” doit déjà exercer dans la filière concernée, et pas seulement être de garde au comptoir alors qu’il pratique la canine. L’éleveur doit accepter à l’avance les noms de tous les remplaçants. Ces confrères sont donc listés dès la rédaction du protocole de soins, et donc dans le registre d’élevage. Il s’agit ainsi de mentionner davantage les associés ou les assistants plutôt que les remplaçants de quelques semaines.

Dans le nouveau monopoly de la vente du médicament vétérinaire, les pharmaciens représentent l’inconnue. En échange de son accord à une prescription « hors examen clinique », le lobby des pharmaciens a obtenu que les officinaux aient seulement de nouveaux droits leur permettant d’entrer véritablement dans le jeu, mais aucun nouveau devoir.

Le pharmacien peut renouveler l’ordonnance préventive malgré l’opposition du praticien

Les pharmaciens peuvent désormais renouveler pendant un an les ordonnances des médicaments préventifs, c’est-à-dire la quasi-totalité des vaccins, des antiparasitaires, des intramammaires hors lactation, même si les vétérinaires prescripteurs s’y opposent en apposant la mention « renouvellement interdit » sur leurs ordonnances. Dans ce nouveau contexte, il est assez difficile de prévoir si les éleveurs seront ou non tentés de s’approvisionner chez des pharmaciens. Jusqu’à présent, ces derniers n’ont pas tellement brillé par leurs compétences en santé animale ou en pharmacie vétérinaire, mais seulement, pour une minorité (quelques dizaines d’entre eux), par des démarches commerciales attrayantes et des ventes sans ordonnance, le plus souvent en toute illégalité et impunité.

Le nouveau dispositif interdit désormais clairement la prescription-délivrance « hors examen clinique » pour les chiens et les chats. Les praticiens canins, souvent ennuyés par la concurrence diffuse des 22 500 officines, sont ainsi les perdants du système, du moins sur le plan réglementaire. La définition légale donnée à l’interdiction de tenir officine ouverte ne leur permet (théoriquement) plus de délivrer des médicaments vétérinaires, qu’ils soient ou non sur prescription, sans une consultation préalable de l’animal en lien avant le médicament délivré.

Toutefois, après cette consultation, le praticien canin a la possibilité de prescrire des traitements pour de longues périodes (un an au maximum). Il ne peut alors normalement pas délivrer pour plus d’un mois de traitement, jusqu’à trois mois si de grands conditionnements sont adaptés (AINS et IECA). Grâce à cette ordonnance renouvelable, le propriétaire peut alors revenir chez son vétérinaire pour acheter, sans consultation, les médicaments déjà prescrits sur une longue période. Mais il peut aussi, en toute légalité désormais, se les procurer auprès d’un pharmacien.

Une distorsion de concurrence préjudiciable au vétérinaire canin

Enfin, le pharmacien a la possibilité de vendre des médicaments vétérinaires non soumis à prescription pour un chien ou un chat, sans avoir vu l’animal, mais sur la base de la demande du propriétaire. Cela n’est curieusement pas possible pour le vétérinaire canin qui ne peut délivrer ces mêmes substances sans avoir vu l’animal concerné. En cas de non-respect de cette exigence, il pourrait alors être accusé de « tenir officine ouverte » et être sanctionné par une amende de 4 500 € !

Néanmoins, ces modifications réglementaires restent assez théoriques dans le domaine des animaux de compagnie.

Les services de contrôle ne montreront sans doute pas plus d’empressement que par le passé à vérifier et à sanctionner le non-respect de la loi sur la pharmacie vétérinaire en médecine canine ou féline. Car ce sont évidemment les productions animales qui constituent l’enjeu, à la fois économique et de santé publique, de ce nouveau dispositif.

Dans ce secteur, la Direction générale de l’alimentation (DGAL) laisse quelques mois aux vétérinaires et à leurs éleveurs pour mettre en place les bilans annuels et la rédaction des protocoles de soins. Et elle annonce les premiers contrôles à l’automne prochain.

  • (1) Décret et arrêté du 24/4/2007 publiés respectivement le 26/4 et le 6/5/2007.

  • (2) Voir en pages 14 et 15 de ce numéro.

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