L’herpesvirus équin de type 1 peut entraîner une myéloencéphalopathie - La Semaine Vétérinaire n° 1269 du 12/05/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1269 du 12/05/2007

Neurologie

Formation continue

ÉQUIDÉS

Auteur(s) : Isabelle Desjardins

Depuis 1966, l’herpesvirus équin de type 1 (EVH-1) est identifié comme une cause de maladie neurologique chez le cheval en Europe, en Amérique du Nord, et en Australie.

L’herpesvirus de type 1 (EHV-1) est un virus à ADN, à tropisme primaire pour l’épithélium respiratoire. Dans un second temps, il est susceptible d’engendrer des avortements, une mortinatalité ou un syndrome neurologique, selon l’immunité de l’hôte et la virulence de la souche. Les signes neurologiques résultent d’une infection secondaire des cellules endothéliales du système nerveux central, accompagnée de thrombo-embolies, d’ischémie, particulièrement de la moelle épinière.

Depuis les années 80, l’encéphalomyélite à herpesvirus est considérée comme la maladie neurologique la plus fréquente. Jusqu’à présent, les rapports de cas publiés concernaient des épisodes survenus dans de grands élevages, ou les premiers cas décrits dans le pays, ou encore une présentation neurologique inhabituelle de la maladie. Ces descriptions ne permettaient pas de conclure à une prédisposition liée à des facteurs individuels ou environnementaux particuliers.

Une étude rétrospective néerlandaise se penche sur l’encéphalomyélite

Lutz Goehring et ses collaborateurs(1) ont étudié seize lieux où la maladie s’est déclarée, ainsi que quinze cas diagnostiqués à l’université d’Utrecht (Pays-Bas), sur une période de quatre ans (1999 à 2003).

Tout élevage ou écurie du pays qui déclare un syndrome neurologique accompagné de fièvre ou d’avortement fait au moins l’objet d’une visite, afin d’évaluer la taille de l’épidémie, de coordonner le recueil des échantillons nécessaires pour aboutir au diagnostic, et de conseiller des mesures d’isolement, d’hygiène et de traitement.

Un examen neurologique protocolaire est effectué chez tous les chevaux atteints. Le protocole vise à déterminer la présence et la sévérité de la dysmétrie, de l’incoordination et de la parésie. Outre un suivi de température chez tous les chevaux du lieu concerné, des écouvillons nasaux (placés dans un milieu de transport viral) et des prélèvements sanguins (sur tubes EDTA, secs et héparinés) sont collectés à la fois chez les animaux malades et chez ceux exempts de signes cliniques.

Les tests diagnostiques utilisés pour confirmer la maladie sont la polymerase chain reaction (PCR EHV-1) sur un écouvillon nasal et des cellules mononucléaires sanguines ; une culture virale ; des tests sérologiques qui emploient une technique de séroneutralisation ou une technique Elisa, détectant la glycoprotéine G qui différencie les anticorps anti-EHV-1 des anti-EHV-4. En outre, les chevaux décédés ou euthanasiés sont soumis à un examen post-mortem.

Deux groupes de chevaux sont ainsi étudiés. Le lot 1 est celui des animaux capables de se tenir debout, qui présentent des signes cliniques d’ataxie, de dysmétrie sans ou avec une faible parésie. Le lot 2 regroupe les chevaux paraplégiques ou tétraplégiques. La race, le sexe, l’âge, le statut vaccinal et la présence d’œdèmes déclives sont autant d’informations répertoriées. Le recueil des données concerne aussi le nombre de chevaux atteints au début puis à la fin de l’épisode, le type de structure concernée, l’extension de la maladie, la saison. Une analyse statistique permet d’étudier l’influence de ces nombreux paramètres sur l’apparition de l’encéphalomyélite à herpesvirus.

Le premier cas est souvent consécutif au retour d’un cheval dans l’écurie

Sur neuf “épidémies” confirmées, concernant un effectif total de trois cent soixante et un chevaux, l’encéphalomyélite à herpesvirus est la maladie neurologique la plus fréquemment rencontrée, comparée à d’autres, ainsi que la plus susceptible de réapparaître chaque année.

Dans huit foyers sur neuf, le premier cas fait suite à l’arrivée d’un nouveau venu ou au retour d’un cheval d’une compétition ou d’un entraînement à l’extérieur. En général, au bout d’une semaine, d’autres cas apparaissent dans l’élevage ou l’écurie.

La plupart des cas se développent dans des populations de chevaux non vaccinés, où seulement dix animaux sur l’ensemble des effectifs sont complètement ou incomplètement vaccinés. Tous les épisodes surviennent entre mi-septembre et mi-mai. Aucune association n’est constatée entre l’apparition de la maladie neurologique et un changement soudain de température.

Il n’existe pas de prédisposition d’âge dans la présentation de la fièvre ni des signes neurologiques. Toutefois, la maladie n’est pas répertoriée chez les quelques chevaux âgés de zéro à deux ans inclus dans l’étude. Ainsi, les signes neurologiques tendent à être plus sévères chez les chevaux âgés.

Aucune prédisposition de sexe n’est flagrante concernant la survenue de fièvre et de symptômes neurologiques. En revanche, les juments ont plus de risques de présenter des signes neurologiques sévères. Certaines juments gestantes avortent, mais ne sont pas plus souvent affectées par l’encéphalomyélite à herpesvirus que les femelles non gestantes ou en lactation qui évoluent à proximité.

Les trotteurs et les chevaux lourds ont davantage de risques de présenter de la fièvre, contrairement aux poneys rustiques. En revanche, il n’existe pas de prédisposition raciale quant à la sévérité des signes neurologiques.

Entre 17 et 79 % des effectifs touchés présentent de la fièvre

Dans trois foyers sur neuf, un seul cheval présente de la fièvre au départ uniquement ; dans cinq foyers sur neuf, de la fièvre accompagne les signes neurologiques et, dans un foyer seulement, un cheval est trouvé paralysé sans hyperthermie.

Les signes neurologiques évoquent une myélopathie. Les symptômes primaires les plus subtils concernent un léger jetage séreux et une lymphadénopathie. 17 à 79 % des effectifs présentent de la fièvre (au minimum 38,5 °C pendant au moins deux jours) et, moins fréquemment, un œdème ventral. En outre, des avortements sont identifiés dans les six semaines qui suivent l’identification d’un premier cas d’encéphalomyélite à herpesvirus dans cinq élevages sur sept. Globalement, les chevaux à épisode de fièvre récent présentent un risque plus élevé de signes neurologiques et, qui plus est, sévères.

Dans l’une des écuries, le traitement entrepris a ajouté aux anti-inflammatoires non stéroïdiens des corticoïdes et de l’acyclovir, ce qui a pu influencer la sévérité des signes neurologiques, mais pas le nombre total de cas dans l’élevage.

Lors d’une épidémie, il semble impossible de prévoir quel cheval sera atteint d’après la situation du malade au sein de l’élevage ou de l’écurie.

Les chercheurs n’ont pu mettre en évidence aucune séroconversion à EHV-1 chez les chevaux de course au Japon pendant les mois d’été, alors que la séroconversion à EHV-4 se produit toute l’année. Cela souligne l’importance des facteurs de température, d’humidité et d’environnement pour la dissémination du virus.

Les épisodes aux Pays-Bas ont affecté un nombre restreint d’individus à chaque fois et la maladie ne semble pas se transmettre facilement aux autres chevaux en contact.

Des foyers plutôt saisonniers et sporadiques, de deux à trois épisodes par an

Il est suggéré que les avortements à EHV-1 favoriseraient la dissémination de l’infection, mais les foyers sont réguliers et la majorité des poulinages se produisent depuis le milieu jusqu’à la fin du printemps, ce qui ne permet pas d’étayer cette hypothèse.

La réactivation d’un virus demeuré à l’état latent, puis sa dissémination dans un second temps, serait le mode de transmission principal des virus EHV-1 à l’intérieur d’une population sensible. Parmi les cas étudiés aux Pays-Bas, il n’est pas possible de déterminer si un contact direct avec un cheval malade en dehors de l’élevage ou de l’écurie est à l’origine de l’épidémie, ou bien si le premier cas déclaré portait le virus à l’état latent.

Une autre explication concernant le caractère sporadique de l’affection serait la combinaison du virus EHV-1 avec un autre facteur, tel qu’un agent infectieux, susceptible de potentialiser la virémie à EHV-1 ou ses effets ischémiques au niveau du système nerveux central.

Dans un même effectif, la répartition des nouveaux cas de fièvre ou de syndrome neurologique est aléatoire et imprévisible, ce qui rend peu probable la transmission du virus par contact direct ou rapproché.

Une explication non vérifiée pourrait être que les chevaux à maladie virale respiratoire subclinique disséminent silencieusement l’EHV-1, formant une chaîne progressive et lente d’extension de l’infection.

Les rapports de cas concernant la séroconversion des chevaux malades et surtout indemnes, au sein d’un même effectif, sont divergents. Les auteurs remarquent que chez quelques cas de l’étude demeurés indemnes (absence de fièvre et d’autres signes cliniques), la séroconversion (mesurée par une technique Elisa spécifique des anticorps dirigés contre EHV-1) n’a pas eu lieu. Il est aussi possible que le virus soit colporté par les palefreniers, les propriétaires et les vétérinaires, sur le lieu d’infection.

Tous les chevaux ne sont pas égaux face au risque d’encéphalomyélite

Toutes les souches d’EHV-1 n’engendrent pas de myéloencéphalopathie. La virulence de la souche mise à part, car elle est identique dans un même élevage, le dose infectante et la réceptivité de l’hôte sont des éléments déterminants.

Dans cette étude, des facteurs de risque en rapport avec l’apparition de signes neurologiques ont été mis en évidence : âge supérieur à trois ans, femelles, trotteurs, chevaux lourds et hispaniques, présence de fièvre. Les juments, les chevaux âgés et ceux qui ont présenté précédemment de la fièvre sont prédisposés à des signes neurologiques sévères.

Donc, aux Pays-Bas, un seul cheval (ou mieux encore un poney) issu d’un effectif à signes neurologiques et sans fièvre, en période d’été, a peu de risques d’être atteint d’une encéphalomyélite à herpesvirus.

Une gestion appropriée de l’élevage, avec des mesures de quarantaine et une stratégie vaccinale adaptée pour les chevaux et les poneys de l’effectif, sont efficaces pour limiter l’extension de la maladie et sa réapparition annuelle.

  • (1) L.S. Goehring, S.C. van Winden, C. van Maanen, M.M. Sloet : « Equine herpesvirus type 1-associated myeloencephalopathy in the Netherlands : a four years retrospective study (1999-2003) », J. Vet. Med. Int., 2006, n° 20, pp. 601-607.

VOIR AUSSI

• Desjardins : « La rhinopneumonie équine est endémique dans les populations de chevaux domestiques », La Semaine Vétérinaire, n° 1256 du 10/2/2007, pp. 38-39.

• C. Laugier, J. Tapprest, N. Foucher, C. Sevin : « Pathologie nerveuse et fréquence des différentes causes sur 3 842 chevaux autopsiés de 1986 à 2004 », Pratique vétérinaire équine, 2006, vol. 38, n° 149, pp. 33-40.

• C. Puyalto-Moussu, G. Fortier, P. Pitel, S. Taouji, A. Saison : « Ataxies et parésies induites par l’herpès virus équin de type I (rhinopneumonie) », Pratique vétérinaire équine, 2002, vol. 34, n° 136, pp. 9-15.

• S. Zientara : « La rhinopneumonie équine », Pratique vétérinaire équine, 2000, vol. 32, n° 125, pp. 77.

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