Petite illustration des méfaits d’une loi européenne en faveur du trafic animal

Il y a peu de temps, j’ai été invité par la direction départementale des services vétérinaires à contrôler l’identification de chiots destinés à une vente exceptionnelle au sein de la jardinerie de la ville où j’exerce. Je pensais alors rencontrer une sympathique éleveuse venue vendre les quelques produits de son propre élevage. Au lieu de cela, je me retrouve à contrôler quarante chiens, âgés d’un mois et demi à trois mois, dont quatre semblaient effectivement venir de l’élevage en question. Les trente-six autres étaient des “membres” de notre chère Union européenne, c’est-à-dire des chiots de toutes races, originaires de Hongrie, de république Tchèque, de Pologne et de Belgique, identifiés avec des puces provenant d’Europe de l’Est (chaque chiot étant vendu entre 500 et 800 €). Me voilà donc à contrôler les passeports de ces charmants toutous. Bien entendu, comme vous vous en doutez, ils étaient parfaitement en règle, joyeux, vifs et ne cessaient de s’agiter dans leur cage d’exposition. Bien évidemment – cela n’étonnera personne – les vaccins antirabiques étaient également à jour et légalement pratiqués chez des animaux de moins de trois mois, comme le permet la législation harmonisée de l’Union ! Une fois le contrôle terminé, sourire forcé à l’éleveuse et retour au cabinet.

Les suites de cette vente furent assez “classiques” : huit chiots ont été conduits au cabinet la semaine qui a suivi la vente. J’ai pu constater quatre diarrhées hémorragiques, dont deux ont entraîné la mort des animaux, trois rhinites, quatre toux de chenil. Des cas similaires m’ont en outre été rapportés par des confrères aux alentours. Bref, le bonheur !

Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous, mais je trouve cette situation totalement inadmissible. Des chiots âgés de moins de trois mois entrent sur notre territoire. Leur socialisation est donc médiocre et ils subissent un stress important lié au transport à cet âge plus que sensible ! Certains sont même vaccinés avant l’âge de trois mois, car le protocole appliqué est celui du pays d’origine et non celui du pays d’importation ! Une fois en France, la législation permet que ces animaux soient vendus sans délai et sans quarantaine préalable !

Rappelons que la France est aujourd’hui indemne de rage, et que les seuls cas découverts ces dernières années concernaient des animaux importés. Rien n’oblige notre pays à se satisfaire des règlements généraux européens qui régissent les échanges commerciaux d’animaux domestiques. Il est tout à fait possible de légiférer afin de durcir les contrôles à l’importation et les règles de vente de chiots importés (notamment pour rendre obligatoire l’affichage de la provenance des animaux sur les cages). Pourtant, nous laissons faire sans protester. Alors permettez-moi, aujourd’hui, de pousser un “coup de gueule” et de tenter d’interpeller le Conseil national de l’Ordre des vétérinaires pour le sensibiliser à ce problème afin que les choses changent enfin.