Le stade de gestation est déterminant pour le pronostic lors de torsion de l’utérus - La Semaine Vétérinaire n° 1268 du 05/05/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1268 du 05/05/2007

Survie de la jument et du poulain

Formation continue

ÉQUIDÉS

Auteur(s) : Gwenola Touzot-Jourde

La torsion utérine est observée durant le dernier tiers de la gestation et constitue une urgence vitale.

Le pronostic de survie de la jument et du poulain, après une correction de torsion utérine, a été évalué dans les années 70 et 80 par deux études rétrospectives qui servent de référence depuis vingt-cinq ans. L’estimation du taux de survie est de 60 à 70 % pour la jument et de 30 à 70 % pour le poulain. Trois universités américaines et une clinique privée ont rassemblé soixante-trois cas de torsion de l’utérus(1) pour revisiter ces indices pronostiques.

54 % des poulains dépassent la période néonatale

Plusieurs races sont représentées dans l’étude, sans préférence. La moitié des juments, âgées de huit à quinze ans, sont entre leur deuxième et leur quatrième gestation. La présentation clinique, dans la plupart des cas, fait état de signes non spécifiques de douleur abdominale. Le sens de la rotation est horaire dans six cas sur dix et inverse pour les autres.

Le stade de gestation a une influence importante sur la survie de la jument et du poulain. Ainsi, une torsion survenant avant trois cent vingt jours est associée à un taux de survie de la jument de 97 %, au lieu de 65 % lors de gestation plus avancée (supérieure ou égale à trois cent vingt jours). La taille du poulain et le poids du tractus reproductif sont mis en cause lors de l’échec de la correction de la torsion. La durée des signes cliniques, le degré de rotation de l’utérus (jusqu’à 180° ou supérieur à 180°), la méthode de correction (roulage, laparotomie par le flanc ou médiane) n’ont pas eu d’incidence sur le taux de survie des juments. De même, l’hématocrite initial, la pression artérielle et la pression partielle en oxygène durant l’anesthésie n’ont pas montré de corrélation avec ce taux. En revanche, la fréquence cardiaque lors de l’examen initial était plus basse chez les juments qui ont survécu (60 battements par minute versus 68 à 80 chez les juments euthanasiées). Les raisons ayant présidé à la décision d’euthanasie ont inclus la confirmation de la mort du poulain pour les mères de moindre valeur que leur progéniture, la présence de tissu utérin dévitalisé assombrissant le pronostic, l’existence d’une lésion gastro-intestinale concomitante, une complication d’éviscération à la suite d’un collapsus soudain pendant le travail lors de la laparotomie par le flanc, ou encore l’échec de la correction de la torsion par roulage. Une jument sur six a présenté une complication gastro-intestinale (lésions du gros, du petit côlon ou du petit intestin, une déchirure du ligament large, un hémopéritoine).

La chance de survie des poulains est divisée par deux à dix mois ou plus

La moitié des poulains ont survécu à la période néonatale, avec une répartition inégale liée au stade de gestation. Lors d’une torsion avant trois cent vingt jours, les poulains ont 72 % de chances de survie, au lieu de 32 % après. Le stade de gestation et le poids correspondant du poulain jouent un rôle important dans le degré d’ischémie et d’hypoxémie utérines et fœtales. L’hypoperfusion de l’utérus et l’exposition du fœtus à une période d’hypoxémie peuvent entraîner la mort in utero, mais aussi des complications néonatales (syndrome de maladaptation du poulain nouveau-né, voir photo) susceptibles de motiver une décision d’euthanasie.

La pression artérielle moyenne (PAM) et la pression artérielle partielle en oxygène (PaO2) des mères durant l’anesthésie, pour correction de la torsion par laparotomie médiane, sont rarement descendues sous le seuil d’hypotension (PAM < 80 mmHg) et d’hypoxémie (PaO2 < 60 mmHg) et n’ont pas révélé de corrélation avec le taux de survie observé chez les poulains.

Pour les torsions survenues avant trois cent vingt jours, la correction avec une laparotomie par le flanc est associée à une plus grande chance de survie pour le poulain que le recours à la laparotomie sur la ligne médiane. La raison de cette différence est inconnue. Toutefois, il est possible que l’anesthésie générale constitue un facteur de risque.

En présence d’une torsion utérine, le stade de gestation est donc à prendre en considération lorsque les risques et le pronostic pour la jument et son poulain sont expliqués au propriétaire. Si la jument sort de la période d’hospitalisation vivante et toujours gestante, il y a une grande chance qu’elle délivre un poulain à terme. Cependant, il est prudent d’informer les propriétaires des risques potentiels de complications durant la période néonatale.

  • (1) K.P. Chaney, S.J. Holcombe, M.M. Le Blanc, J.G. Hauptman, R.M. Embertson, P.O.E. Mueller, W.L. Beard : « The effect of uterine torsion on mare and foal survival : a retrospective study 1985-2005 », Equine Vet. J., 2007, vol. 39, n° 1, pp. 33-36.

VOIR AUSSI

• P. Chavatte : « Septicémies du poulain nouveau-né : bilan et perspectives », Pratique vétérinaire équine, 1999, vol. 31, n° 121, pp. 37-47.

• L. Couetil : « L’anoxie et la réanimation du poulain à la naissance », Pratique vétérinaire équine, 1999, vol. 31, n° 121, pp. 29-35.

• J.-M. Betsch : « Sémiologie du poulain nouveau-né, examen par appareil », Pratique vétérinaire équine, 1999, vol. 31, n° 121, pp. 15-28.

• J.-M. Betsch : « Sémiologie du poulain nouveau-né, recueil des commémoratifs et examen clinique de base », Pratique vétérinaire équine, 1999, vol. 31, n° 121, pp. 9-14.

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