Les maladies vectorielles canines n’ont pas fini de faire parler d’elles - La Semaine Vétérinaire n° 1266 du 21/04/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1266 du 21/04/2007

Epidémiologie. Impact des changements climatiques sur les affections

Actualité

Auteur(s) : Carole Ballin

Depuis plusieurs années, les maladies vectorielles font l’objet d’une attention particulière, notamment dans le cadre des conséquences du réchauffement climatique. Le risque d’extension de la répartition des vecteurs et leur accroissement est alors souvent évoqué. Plusieurs spécialistes se sont récemment réunis à Paris autour de Gilles Bourdoiseau (ENV de Lyon), modérateur, pour détailler les réels impacts des modifications climatiques.

Notre confrère Patrick Bourdeau, professeur de parasitologie à l’école de Nantes, en se limitant à l’Europe et aux carnivores domestiques, a présenté les principaux vecteurs et les agents pathogènes transmis. Des enquêtes menées à l’échelle nationale, qui recensent le nombre de cas de leishmaniose, de babésiose, de borréliose, d’ehrlichiose et de dirofilariose canines, ont été réalisées afin de mieux connaître les zones endémiques et faire un état des lieux de la situation actuelle. Une probable extension géographique de la leishmaniose canine vers le sud-ouest et une intensification dans la vallée du Rhône sont observées (Bourdeau et coll., 1988 et 2002). Les principales manifestations cliniques notées par les praticiens lors de l’enquête incluent des signes généraux (maigreur, adénopathie, mauvais état général), cutanés (alopécie, squames), ainsi qu’une fréquente atteinte de la truffe. La prévalence de la babésiose, maladie vectorielle la plus fréquente en France, est globalement stable, mais elle a tendance à s’étendre vers le nord-est. Si la maladie était totalement exotique dans certains pays du nord de l’Europe, des foyers sont aujourd’hui observés en Allemagne (Munich, 2000 ; Berlin, 2006), en Belgique et aux Pays-Bas (2006). La situation évoluera probablement. B. canis vogeli, présent en Espagne et en Italie, pourrait par exemple s’installer dans le sud-est de la France, où Rhipicephalus, son vecteur, est déjà présent.

Leishmania infantum apparaît, depuis les années 80, comme un parasite opportuniste au cours de l’immunodépression, surtout chez les patients infectés par le VIH, a rappelé le professeur Jean-Pierre Dedet, du Centre national de référence des Leishmania. Espèce pléiotropique, elle est responsable, dans les régions endémiques, de nombreuses infections asymptomatiques, de quelques cas de leishmaniose viscérale, de rares cas de leishmaniose cutanée et de cas muqueux exceptionnels.

Les foyers de leishmaniose sont intégrés étroitement à l’environnement

Les changements environnementaux, d’origine anthropique et climatique, se répercutent sur les leishmanioses en termes d’incidence et d’extension géographique. L’aire de répartition de la principale espèce vectrice en France, Phlebotomus perniciosus, qui dépasse largement celle de l’agent pathogène, laisse présager une extension de la maladie vers le nord, selon Jean-Pierre Dedet. Celle-ci, déjà constatée dans l’Hexagone au sein de la population canine, s’observe aussi dans le nord de l’Italie. Certains auteurs prévoient même l’arrivée de la leishmaniose dans le sud de l’Angleterre vers 2025, lorsque le climat sera similaire à celui enregistré à l’heure actuelle dans le sud de la France. Cependant, l’intervenant a rappelé que si la hausse des températures peut entraîner une extension géographique de la maladie, la réalité apparaît plus complexe, car le développement des phlébotomes dépend, entre autres, des températures minimales, à la fois hivernales et estivales (Kuhn, 1999).

Fièvre catarrhale, bartonellose et borréliose sont aussi évoquées

Afin de mieux comprendre l’impact potentiel de changements globaux, notamment climatiques, sur la répartition et la dynamique des maladies vectorielles animales, Fabienne Biteau-Coroller, épidémiologiste au Cirad(2), a présenté l’étude de l’émergence de la fièvre catarrhale du mouton en Europe à partir de 2000. Elle rappelle qu’il convient de s’intéresser à la fois aux diverses sources possibles d’introduction de l’agent pathogène (échanges internationaux d’animaux, diffusion de vecteurs par les vents ou par les moyens de transport), aux facteurs d’amplification, ainsi qu’aux conditions qui permettent la pérennisation d’une maladie pour mieux appréhender les phénomènes d’émergence.

Michael R. Lappin, professeur de médecine interne à l’université vétérinaire du Colorado, a, pour sa part, passé en revue les problèmes cliniques émergents associés aux infections par les espèces du genre Bartonella et les hémoplasmes (anciennement Haemobartonella) chez les carnivores domestiques. Si une étude réalisée en Caroline du Nord chez des chats errants révèle une séroprévalence à Bartonella de 93 % (F.B. Nutter et coll., 2004), cette présence d’anticorps n’est pas corrélée avec des syndromes cliniques. La raison pour laquelle certains animaux développent une maladie et d’autres non reste floue. La borréliose de Lyme, anthropozoonose transmise par les tiques du genre Ixodes, est relativement méconnue en France, selon Luc Chabanne, professeur de médecine interne des carnivores à l’école de Lyon. Les connaissances, à la fois épidémiologiques et cliniques, sont actuellement insuffisantes et méritent de plus amples recherches. Dans les conditions naturelles, environ 5 % des chiens infectés développent des symptômes deux à cinq mois après la piqûre. Outre les signes généraux (fièvre, asthénie, anorexie), une atteinte oligo-articulaire, migratoire et intermittente est classiquement associée. Son diagnostic reste relativement complexe et nécessite une confrontation de signes cliniques, épidémiologiques, d’une bonne réponse au traitement, de l’exclusion d’autres causes selon les symptômes et un diagnostic biologique.

Une bonne prophylaxie sanitaire, qui consiste à limiter l’infestation du chien par les tiques, les puces et les autres phlébotomes, apparaît toujours aussi essentielle pour prévenir ces multiples maladies vectorielles.

  • (1) « Maladies vectorielles canines : un sujet d’actualité et d’avenir », symposium Bayer organisé le 10/4/2007 à Paris.

  • (2) Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement.

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