L’hémangiosarcome est le principal responsable des hémopéritoines d’origine non traumatique

Les hémorragies internes au sein de la cavité abdominale peuvent être la conséquence d’une rupture traumatique du foie ou de la rate à la suite d’un accident de la voie publique, par exemple. Elles s’expliquent également par un processus pathologique qui aboutit à un important saignement intra-abdominal, comme la rupture d’une tumeur intra-abdominale, une torsion de la rate ou d’un lobe hépatique, ou encore survenir à la suite d’une coagulopathie. Les auteurs⁽¹⁾ d’une étude rétrospective ont collecté trente-neuf dossiers de chiens, sans historique de traumatisme, pour lesquels un diagnostic ante mortem ou post-mortem d’hémopéritoine avait été établi. Le but de cette étude était d’identifier les signes cliniques et paracliniques et de les confronter au diagnostic.

Plus de la moitié des chiens ont présenté un épisode de collapsus aigu

Dans 54 % des cas, le principal motif de consultation est la survenue d’un collapsus aigu. Les autres troubles rapportés par les propriétaires sont de la léthargie (46 % des chiens), une baisse d’appétit (31 %), une distension abdominale (28 %), une douleur abdominale (16 %), des vomissements (13 %) ou encore une dyspnée (8 %). Les races des chiens étudiés varient et l’âge médian est de dix ans. L’examen clinique révèle des muqueuses pâles et une distension abdominale chez 77 % des animaux. Un peu moins d’un tiers des cas présentent un rythme cardiaque anormalement irrégulier au moment de la consultation. Les autres signes cliniques, répertoriés dans moins de 20 % des cas, sont un pouls faible, des bruits cardiaques assourdis, de la douleur abdominale, une masse intra-abdominale palpable ou du sang frais dans les selles. Un chien est en arrêt cardio-respiratoire à son arrivée à la clinique. Une anémie est mise en évidence chez 90 % des chiens, avec un hématocrite moyen de 20 %, accompagnée d’une hypoprotéinémie et d’une hypoalbuminémie dans la moitié des cas. Une thrombocytopénie est objectivée chez 97 % des animaux. Le comptage plaquettaire varie entre 4 et 540 x 10³/µl, avec un nombre médian de 40 x 10³/µl. Les tests de coagulation sont prolongés, le temps de céphaline activé (84 % des cas), le temps de Quick (58 %) et les produits de dégradation de la fibrine (68 %) sont augmentés. L’échographie s’est révélée plus sensible que l’examen radiographique pour objectiver la présence d’une effusion abdominale. Ainsi, les clichés radiographiques abdominaux révèlent une effusion péritonéale dans 94 % des cas, alors que l’examen échographique la met en évidence à chaque fois. Des masses intra-abdominales, une hépatomégalie ou une splénomégalie, mais aussi des tumeurs métastatiques pulmonaires chez 32 % des chiens sont observées à la radiographie. Plus de 60 % des animaux présentent des nodules ou des masses spléniques et/ou hépatiques lors de l’examen échographique.

Le taux de survie global est faible, avec ou sans intervention chirurgicale

Seize des trente-neuf chiens subissent une intervention chirurgicale. Pour douze d’entre eux, la rate est à la source du saignement. Une splénectomie est alors réalisée chez neuf chiens et l’euthanasie est choisie pour les trois autres.

Par ailleurs, trois chiens sont euthanasiés à la suite de la découverte de masses hépatiques ou mésentériques non résécables. Un rein qui saigne est décelé chez un animal. Une néphrectomie corrige le problème. La période postopératoire est critique et le taux de survie après l’intervention s’élève seulement à 44 %. Parmi les vingt-trois chiens qui ne subissent aucune opération, 61 % sont euthanasiés, meurent à l’arrivée à la clinique ou au cours de l’hospitalisation.

L’hémangiosarcome représente 70 % des causes diagnostiquées d’hémopéritoine et constitue 88 % des néoplasies objectivées.

Un diagnostic de certitude est obtenu pour trente chiens. Dans 80 % des cas, il s’agit d’une néoplasie maligne, avec une large prépondérance d’hémangiosarcomes de la rate. Le suivi des quelques animaux ayant subi une splénectomie pour hémangiosarcome révèle un pronostic sombre, avec une survie médiane de cinquante jours (trente à cent quatre-vingts).

D’autres tumeurs malignes sont identifiées : un mésothéliome, un phéochromocytome, les métastases hépatiques d’un mélanome oral.

Les causes bénignes de l’hémopéritoine sont des hématomes de la rate, un hémangiome de la rate, une intoxication aux rodenticides, la torsion d’un lobe hépatique et une insuffisance cardiaque droite aiguë secondaire à une dirofilariose.

Les auteurs soulignent que d’autres scientifiques, rapportant les résultats de biopsies spléniques et d’échantillons de rate prélevés post-mortem, ont observé une prévalence plus importante d’hématomes et d’hémangiomes spléniques comparativement aux hémangiosarcomes. Cependant, les deux premières entités ne sont associées à un hémopéritoine que dans moins d’un tiers des cas, au lieu des trois quarts pour la tumeur maligne. Il n’est donc pas surprenant d’observer, dans cette étude, une prépondérance d’hémangiosarcomes.

• (1) J. Pintar, E.B. Breitschwerdt, E.M. Hardie et K.A.E. Spaulding : « Acute nontraumatic hemoabdomen in the dog : a retrospective analysis of 39 cases (1987-2001) », J. Am. Anim. Hosp. Assoc., 2003, n° 39, pp. 518-522.