Comment gérer les paroles ou les écrits diffamatoires ? - La Semaine Vétérinaire n° 1266 du 21/04/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1266 du 21/04/2007

Limites de la liberté de propos

Gestion

QUESTIONS/RÉPONSES

Auteur(s) : Céline Peccavy

La diffamation constitue un délit pénal. En effet, sous couvert de liberté fondamentale d’expression, il n’est pas permis de tenir, d’écrire et de publier n’importe quels propos.

1 QUELLE EST LA DÉFINITION DE LA DIFFAMATION ?

Elle est donnée par la loi du 29 juillet 1881 qui dispose, dans son article 29, que « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés ». Un délit pénal est normalement constitué de deux éléments, l’un matériel, l’autre intentionnel. En matière de diffamation, pas moins de cinq éléments sont nécessaires à la constitution de l’infraction. Il faut ainsi :

- que l’allégation ou l’imputation concerne un fait déterminé ;

- que la diffamation porte atteinte à l’honneur et à la considération de la personne ;

- qu’elle vise une personne déterminée ;

- qu’elle soit faite de mauvaise foi ;

- qu’elle soit publique.

2 EN QUOI CONSISTE L’ATTEINTE À L’HONNEUR ET À LA CONSIDÉRATION ?

Cette condition de la diffamation représente l’essence même de l’infraction. Tout d’abord, l’appréciation de l’atteinte à l’honneur se fait de manière objective. En d’autres termes, l’opinion de la victime n’a pas d’importance. Peu importe qu’un préjudice résulte ou non des propos. Cependant, s’il y a préjudice, la victime pourra obtenir des dommages et intérêts. L’atteinte à l’honneur peut ensuite être constituée dès lors qu’est imputée à une personne la réalisation d’une infraction, d’un acte contraire à la morale, à la probité ou aux bonnes mœurs. Dire d’un praticien qu’il a l’habitude de prendre le volant après des soirées bien arrosées revient à lui imputer de se rendre coupable du délit de conduite en état d’ivresse. Il y a donc diffamation. La considération a un domaine un peu plus large que celui de l’honneur, car il s’agit de l’idée que les autres se font d’une personne. Au final, est répréhensible toute imputation de nature à faire penser qu’une personne ne respecte pas les règles de bonne conduite qui font l’honnête homme et le bon père de famille. Les atteintes peuvent donc être extrêmement variées. Elles peuvent ainsi concerner l’imputation d’une infraction ou être en relation avec un mode de vie. Par exemple, ont été jugés diffamatoires les propos insinuant qu’une personne aurait été hospitalisée non à la suite d’une vraie fausse tentative de suicide, mais d’une overdose (cour d’appel de Paris, 28 mai 1999).

Quant à l’atteinte à la considération professionnelle, elle suppose la mise en cause personnelle de l’individu et non, comme en matière industrielle et commerciale, simplement celle des produits et des services.

En matière médicale, il est admis que le public conserve le droit de critiquer les traitements des praticiens dans la mesure où il n’est pas porté atteinte aux qualités essentielles nécessaires dans cette profession. La dénonciation du caractère mercantile d’une clinique et de la mauvaise qualité des soins peut ainsi constituer une diffamation. De la même manière, le fait de dire d’un vétérinaire qu’il méprise la souffrance des animaux qu’il soigne est diffamatoire.

3 QU’EN EST-IL DE LA PUBLICITÉ ?

Tous les moyens de publicité sont susceptibles de donner lieu à diffamation. Ainsi, si cela concernait surtout les journaux auparavant, il est maintenant clairement établi, notamment depuis une loi du 21 juin 2004, que la publicité peut résulter de propos tenus sur l’Internet, notamment sur un forum de discussion.

4 QU’EST-CE QU’UN FAIT DÉTERMINÉ ?

La référence à un fait déterminé et précis est nécessaire pour valider le caractère diffamatoire d’un propos. Les imputations doivent se présenter sous la forme d’articulation de faits de nature à être sans difficulté l’objet d’une preuve et d’un débat contradictoire.

5 LA PERSONNE VISÉE DOIT-ELLE ÊTRE NOMMÉE ?

La diffamation suppose l’identification suffisante de la victime. Cette dernière doit être identifiable. Cela suffit. Elle n’a pas besoin d’être précisément nommée.

6 COMMENT DÉFINIR L’INTENTION COUPABLE ?

En matière de diffamation, il existe une présomption de mauvaise foi, car le droit considère qu’il est impossible de dire du mal de quelqu’un sans en avoir nécessairement conscience. Il s’agit cependant d’une présomption qui peut être renversée en démontrant sa bonne foi.

7 QU’EST-CE QUE L’EXCEPTION DE VÉRITÉ ?

Si le prévenu parvient à prouver la réalité des faits allégués, les poursuites seront déclarées irrecevables. Les juges restent cependant libres d’apprécier la valeur des preuves avec leur intime conviction, comme dans tout procès. En outre, les preuves ne peuvent être produites que dans les dix jours qui suivent la première signification de la citation introductive d’instance.

8 DANS QUEL DÉLAI AGIR ?

Celui qui s’estime victime doit saisir la justice dans les trois mois qui suivent le jour où la diffamation a été commise. Sur l’Internet, le délai commence ainsi à courir à compter de la première mise en ligne des propos litigieux.

Questions fréquentes

• La publication d’un rectificatif fait-elle disparaître le délit ?

Non. Le fait d’avoir inséré et publié, après la diffusion d’une diffamation, une note rectificative ou une mise au point ne supprime pas l’intention coupable. Cela ne constitue qu’un repentir actif qui pourra éventuellement être pris en compte dans l’appréciation des dommages et intérêts.

• Une réponse à une première diffamation peut-elle constituer une diffamation ?

Oui. La diffamation ne perd pas son caractère parce qu’elle est une réponse à une autre diffamation. La réponse à une diffamation ne dispense pas de respecter une certaine mesure et la prudence.

• Si la victime a provoqué les propos diffamatoires, y a-t-il encore infraction ?

Non. On considère qu’il n’y a pas d’intention coupable si c’est la victime des propos qui a mis en demeure l’inculpé de les formuler. Il en est ainsi de la personne qui, ayant tenu non publiquement des propos diffamatoires, est sommée de les répéter en public.

C. P.
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