L'ÉCHANGE DE DONNÉES EST AU CŒUR DE L'EUROPE VÉTÉRINAIRE - La Semaine Vétérinaire n° 1260 du 10/03/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1260 du 10/03/2007

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Auteur(s) : Marine Neveux

Définition de l'acte vétérinaire, Code de déontologie, formation continue, etc. : les enjeux de l'Europe vétérinaire de demain sont nombreux. Pour surmonter les disparités entre les Etats membres, l'instauration de systèmes de communication est nécessaire, notamment au niveau des organismes qui recensent les confrères ou gèrent la déontologie.

Le Traité de Rome fêtera bientôt son cinquantième anniversaire. Le 25 mars 1957 en effet, les représentants de l'Allemagne de l'Ouest, de la Belgique, de la France, de l'Italie, du Luxembourg et des Pays-Bas signent dans la capitale italienne les traités qui instituent notamment la Communauté économique européenne (CEE). Un marché commun se crée grâce à l'abolition progressive des barrières douanières entre les pays membres, à la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux, à l'instauration d'une politique agricole commune (PAC), etc.

En 2007, l'Europe est plus que jamais d'actualité. En France, les candidats à l'élection présidentielle en ont d'ailleurs fait leur cheval de bataille. Dans ce contexte, quelle sera l'Europe vétérinaire de demain ? Elle sera déterminée par les choix relatifs à des sujets majeurs pour la profession comme l'acte vétérinaire, la délégation des actes, la formation continue, l'enseignement, le rôle des confrères et consœurs dans le secteur sanitaire, ainsi que les flux de vétérinaires. Dans ce dernier domaine, si les échanges existent, ils sont souvent limités par la barrière linguistique ou l'aspect financier, notamment pour les praticiens des pays de l'Est qui souhaitent s'installer dans d'autres Etats membres. « Il est regrettable que l'accession de nouveaux pays [à l'Union] n'ait pas été précédée d'une réflexion sociale et économique », souligne ainsi Christophe Buhot, président de l'Union européenne des vétérinaires praticiens (UEVP), qui évoque également la faiblesse des flux migratoires vétérinaires. Ils ont lieu le plus souvent dans le cadre d'un exercice transfrontalier, comme en témoigne l'augmentation du nombre de confrères espagnols et belges installés aux frontières de la France (mais aussi ailleurs dans le pays) et qui génèrent parfois des difficultés : concurrence déloyale, importations illégales de médicaments, notamment à la frontière espagnole, etc.

Les disparités entre pays s'effacent souvent pour parvenir à un accord

Heureusement, dans la plupart des cas, les échanges s'effectuent sans problème et des liens se tissent progressivement entre les pays de l'Union.

« Nous disposons d'accords bilatéraux entre la Suisse et l'Union européenne, explique Charles Trolliet, président de la Société vétérinaire suisse (SVS). Il existe une reconnaissance des diplômes. Les confrères peuvent pratiquer à titre indépendant. Mais il n'y a pas de flux migratoire important en termes d'exercice libéral en Suisse, quelle que soit la frontière limitrophe considérée. Les Allemands qui travaillent dans notre pays sont plus enclins à le faire dans le corps enseignant. En outre, dans le Tessin, nous remarquons l'intérêt de certains confrères italiens à pratiquer également sur le territoire suisse. » « Mais cela peut parfois soulever des questions au niveau de la législation du médicament », poursuit-il.

Par ailleurs, les échanges entre les pays membres et la mutualisation des compétences peuvent se révéler intéressants à plusieurs titres, notamment dans un cadre sanitaire, par exemple pour soutenir des pays qui ne disposent pas de possibilités de formation suffisantes. Dans ce cas, les disparités entre les Etats sont surmontées. Car force est de constater qu'elles existent, en raison des spécificités de chacun, comme la régionalisation marquée en Espagne, l'instabilité du contexte politique en Italie, etc. Toutefois, un point d'accord est en général trouvé par les délégations nationales représentatives au niveau de l'Europe, mais aussi au-delà. Car « les problématiques ne sont plus seulement européennes, mais mondiales, estime Christophe Buhot. Il est intéressant de travailler avec l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE). Nous ne pouvons pas envisager, aujourd'hui, de construire une Europe étanche ».

Les organismes qui recensent les confrères ou gèrent la déontologie sont nécessaires

Dans les mois à venir, une réelle ouverture européenne se dessinera pour la profession. En effet, la directive relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles(1), adoptée en octobre 2005, devra être retranscrite d'ici à octobre prochain au plus tard. En outre, la directive sur les services dans le marché intérieur(2) et les décisions adoptées lors de la conférence d'Edimbourg sur les professionnels de santé entrent aussi en compte.

Les objectifs sont multiples. L'un d'eux est l'instauration d'une démarche proactive de l'échange d'informations entre les organes de régulation afin d'assurer ainsi la sécurité du service rendu aux consommateurs.

La coopération des organismes qui recensent les confrères ou gèrent la déontologie est nécessaire et se développe dans ce cadre. Il s'agit des statutory bodies, terme reconnu par l'OIE pour désigner les structures d'habilitation à l'exercice (pour la France, ce rôle est assuré par l'Ordre des vétérinaires). Le working party (groupe de travail) de ces instances au sein de la Fédération des vétérinaires européens (FVE) est dirigé par notre confrère Christian Rondeau, président de l'Ordre.

Notre consœur Catherine Roy, missionnée conjointement par l'Ordre et le Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL), a réalisé deux enquêtes auprès des pays de l'Union pour dresser un état des lieux des systèmes d'habilitation à l'exercice et des dispositifs disciplinaires (voir graphiques en page 37). Les premiers résultats révèlent des disparités de l'un à l'autre. Ainsi, l'autorité compétente a parfois une fonction centralisatrice (comme l'Ordre en France) : « Dans ce cas, il est facile de savoir si un professionnel qui se réclame du titre de vétérinaire l'est réellement et s'il a le droit d'exercer. Un Code de déontologie, un système disciplinaire et une liste de praticiens habilités existent. » Mais parfois, trois instances sont en place : l'une pour le diplôme, une autre pour l'enregistrement et la dernière pour la discipline. « Disposer de toutes les informations est alors plus difficile », témoigne Catherine Roy. Et notre consœur d'évoquer d'autres cas : « [Dans certains Etats], il existe des Ordres régionaux, mais aucune liste nationale recensant l'ensemble des vétérinaires. Quant aux Codes de déontologie, ils peuvent ressembler à celui que nous connaissons en France, mais ils peuvent aussi être plus développés ou, au contraire, ne compter que quinze lignes… Et en matière de systèmes disciplinaires, lorsqu'ils relèvent d'un ministère en raison de l'absence de statutory body, la gestion est particulièrement libérale et politique. »

Des décisions prises à la suite de recommandations de l'OIE

« L'article 56 de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles impose aux autorités compétentes d'échanger les informations qui concernent les sanctions criminelles ou disciplinaires et toutes les autres circonstances sérieuses et spécifiques qui peuvent avoir des conséquences sur le droit à l'exercice et la poursuite des activités professionnelles », explique Catherine Roy.

Par ailleurs, « l'OIE recommande, dans l'un des chapitres du Code sanitaire, une évaluation de l'organisme statutaire pouvant porter sur ses objectifs et ses fonctions, ainsi que sur les normes minimales de formation nécessaires à la reconnaissance de l'enregistrement des titulaires du diplôme de vétérinaire. Cette réflexion s'étend aux paraprofessionnels. L'évaluation nécessite l'existence d'informations détaillées sur les procédures disciplinaires », souligne Christian Rondeau. La réforme lancée récemment par les instances ordinales françaises et l'élaboration d'un Code de déontologie vétérinaire européen s'intègrent à ce contexte. Les confrères et consœurs rejoindront ainsi d'autres professionnels, comme les avocats et les architectes, qui ont déjà élaboré leur code européen.

Pour répondre à ces enjeux de communication, la Commission européenne a développé un système d'échange d'informations entre les autorités des Etats, axé sur le marché intérieur, l'IMI (voir ci-dessous). Ce dispositif permettra aux autorités de communiquer directement entre elles par une voie électronique sécurisée, en profitant de plusieurs atouts : possibilité de poser des questions, traduction simultanée.

L'obligation de formation continue se dessine en Europe

Une réflexion européenne est engagée dans plusieurs domaines qui intéressent directement l'exercice professionnel des vétérinaires, comme la formation initiale et continue. Faut-il créer un lien entre la formation et l'autorisation d'exercice ? Certains Etats membres subordonnent déjà le renouvellement de l'autorisation d'exercice à la formation continue. Dans ce domaine, l'UEVP considère qu'une qualification professionnelle ne donne pas droit à l'exercice à vie sans la mise à jour des connaissances et sans contrôle. « Nous considérons que cela doit être obligatoire pour les spécialistes et ceux qui se prévalent d'un domaine de compétence », explique Christophe Buhot.

En France, de nombreux confrères suivent déjà une formation continue. Cette formation pourrait devenir obligatoire d'ici à trois ou cinq ans, comme elle l'est dans d'autres pays de l'Union. Elle s'envisage alors en crédit d'heures. Plusieurs associations professionnelles françaises fournissent d'ailleurs des points ou crédits d'heures aux praticiens qui suivent leurs enseignements. « Une autorité compétente doit être désignée pour enregistrer les organismes agréés et les formations validantes et comptabiliser l'acquisition des heures de formation continue », souligne Catherine Roy. Ces dernières pourraient être comptabilisées sur une carte professionnelle électronique. C'est l'un des enjeux de celle développée par le Conseil supérieur de l'Ordre.

A côté de la formation, l'enseignement vétérinaire s'inscrit aussi dans un contexte européen. « L'UEVP estime qu'un vétérinaire doit être issu d'une école accréditée pour être autorisé à exercer dans un autre pays », explique Christophe Buhot. Mais à l'heure actuelle, si l'Association européenne des établissement d'enseignement vétérinaires (AEEEV) a mis en place un système d'accréditation des écoles fondé sur un cahier des charges, aucune sanction ne s'applique lorsqu'il n'est pas respecté.

  • (1) Directive 2005/36/CE.

  • (2) Directive 2006/123/CE.

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