Jusqu’où est-il raisonnable d’aller dans les soins aux animaux ? - La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007
La Semaine Vétérinaire n° 1258 du 24/02/2007

Entre nous

FORUM

Mon avis n’a pas à interférer

Rémy Balouka, praticien à Roquebrune- Cap-Martin (Alpes-Maritines).

Ce n’est pas à nous de juger jusqu’où il est raisonnable d’aller dans les soins aux animaux, tant que l’animal ne souffre pas. C’est à son propriétaire de décider ce qu’il souhaite et quelles sommes il est susceptible d’engager. J’essaye de laisser le choix au client en lui présentant toutes les possibilités. Mon avis personnel sur les limites du raisonnable en termes de soins aux animaux n’a pas à interférer avec les différentes options que je lui propose. S’il me demande de quelle façon j’agirais avec mon animal, c’est qu’il a besoin d’être guidé, ce que je fais le plus objectivement possible en lui présentant les bienfaits pour l’animal, les statistiques, etc. Lorsque je constate – assez rarement heureusement – que malgré tout ce qui est mis en œuvre, la douleur ne peut plus être soulagée, j’essaye de raisonner le client en lui conseillant l’euthanasie.

Lorsque nous savons que le propriétaire choisira la solution qui occasionnera le plus d’inconfort pour une survie limitée, nous pouvons être tentés de ne pas présenter toutes les thérapies dont nous disposons. Je ne le fais pas, car je sais que les clients sont de plus en plus informés, grâce au développement de l’Internet, et que de telles méthodes entameraient la confiance qu’ils placent dans le praticien. Je préfère les guider du mieux que je le peux pour qu’ils puissent faire le meilleur choix.

Savoir quand s’arrêter est difficile pour les propriétaires

Delphine Vaucouloux, praticienne à Perpignan (Pyrénées-Orientales).

Je suis résolument contre l’acharnement thérapeutique, car cela ne prend pas en compte la qualité de vie de l’animal. Quand je sais qu’il risque de souffrir inutilement, je conseille aux propriétaires de le laisser partir décemment, plutôt que de lui imposer de nombreux examens complémentaires ou des traitements lourds qui lui assureront une survie de quelques mois au mieux, bien souvent dans des conditions déplorables.

J’ai ainsi eu le cas d’un vieux berger allemand de treize ans qui souffrait de diverses maladies (déplacements possibles seulement avec ses maîtres à cause d’une extrême faiblesse du train arrière, pyodermite chronique, escarre, etc.), amené en état de choc par les propriétaires.

Il présentait une hypertrophie ganglionnaire généralisée et une masse abdominale. Aurait-il survécu à la chirurgie, dans quelles conditions et pour combien de temps ? J’ai convaincu ses maîtres de l’euthanasier afin de lui épargner une fin pénible et pour qu’eux-mêmes ne souffrent pas de le voir se dégrader et souffrir.

S’il s’agit en revanche d’un jeune animal qui peut guérir ou pourra vivre normalement, nous devons tout tenter. Et pourquoi pas une greffe de reins, comme cela se pratique aux Etats-Unis chez les chats ? Savoir quand il est judicieux d’arrêter les traitements est difficile pour les propriétaires.

C’est à nous de les guider, dans leur intérêt et celui de leur animal, mais nous nous devons de respecter leur décision. Je continue ainsi à prodiguer des soins à des animaux, même si j’ai la conviction que ce choix n’est pas le bon, lorsque les clients insistent ou qu’il s’agit de personnes âgées, pour qui l’animal représente le dernier lien qui les rattache à la vie.

Nous ne risquons rien à proposer tout ce qui peut être fait, au client ensuite de prendre sa décision

Olivier Keravel, praticien à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).

Aucun soin ne me semble a priori déraisonnable, à condition d’avoir la conviction d’apporter un véritable plus à l’animal. Parfois, les propriétaires souhaitent engager des traitements qui, selon moi, sont inutiles. Je leur en fais part, mais le choix final leur revient. Je respecte leur décision, si toutefois ils se donnent les moyens de faire le maximum. A l’inverse, surtout s’il n’y a aucun moyen de contrôler la souffrance, il s’agit d’acharnement thérapeutique et j’essaye de les convaincre d’arrêter. En revanche, je ne pense pas qu’il faille omettre de proposer certains examens complémentaires ou traitements, sous prétexte que nous ne les ferions pas subir à nos propres animaux, ou parce que leur coût nous semble exorbitant. Les clients reprochent souvent a posteriori au praticien de ne pas leur avoir parlé d’une option thérapeutique (même si elle est chère et aléatoire et que leurs moyens sont limités). Nous ne risquons rien à proposer tout ce qui peut être tenté. Au client ensuite de prendre sa décision. En outre, avec l’Internet, les propriétaires ont accès à des informations qu’ils ne maîtrisent pas et qu’ils interprètent souvent mal. Notre travail consiste à les aider à faire le tri : il faut discuter des coûts, des risques, expliquer et argumenter scientifiquement les différentes options. D’une manière générale, je les encourage à réaliser les examens complémentaires nécessaires pour l’obtention du diagnostic dès que possible. Le pronostic est alors plus facile à estimer et la décision de traiter ou non est prise en connaissance de cause.

Il faut éviter de se lancer à l’aveugle dans des thérapeutiques lourdes, surtout en cancérologie. Par exemple, commencer une chimiothérapie adjuvante à une chirurgie sans avoir réalisé un bilan d’extension sérieux expose d’une part, à faire du palliatif et d’autre part, à mécontenter le client qui aura l’impression d’agir pour rien. Au contraire, une fois le bilan d’extension effectué, même si des métastases sont présentes, nombreux sont ceux qui souhaitent essayer une chimiothérapie qu’ils savent palliative dès le départ ! De ce point de vue, le scanner peut débloquer les situations en permettant de “visualiser” la maladie. Le client comprend alors beaucoup mieux la notion d’aléa thérapeutique et devient un partenaire pour le vétérinaire.

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