Les cataractes sont évolutives et passent par différents stades - La Semaine Vétérinaire n° 1234 du 15/07/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1234 du 15/07/2006

Travaux récents en ophtalmologie

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Laurent Bouhanna

Fonctions : praticien spécialisé en ophtalmologie à Paris.

Cinq publications abordent le prolapsus de la glande nictitante chez le chat, le syndrome uvéo-cutané, la cataracte chez le chien et les uvéites phacoclastiques chez le lapin.

1 PROLAPSUS DE LA GLANDE NICTITANTE CHEZ LE CHAT.

Les affections de la membrane nictitante sont rares chez le chat et le prolapsus de la glande nictitante est exceptionnel. Hormis un cas rapporté chez un domestic shorthair, tous les cas décrits auparavant concernaient des chats de race burmese, ce qui suggère une prédisposition raciale. Différentes techniques de traitement chirurgical conservateur ont été employées et ont permis une correction avec d’excellents résultats pour tous les cas publiés. Un article récent rapporte trois cas de prolapsus de la glande nictitante, observés chez des chats adultes (âgés de deux ans et demi à six ans) de races variées : un persan présentant un prolapsus bilatéral, un burmese et un domestic shorthair chez lesquels le prolapsus est unilatéral. Pour les trois animaux, l’anomalie est apparue spontanément et aucune autre lésion oculaire, susceptible d’avoir causé ce prolapsus (en particulier une conjonctivite, un traumatisme ou une tumeur), n’est mise en évidence. En revanche, l’apparition tardive n’est pas en faveur d’une origine congénitale. Un traitement chirurgical conservateur (technique de Morgan, dite “de la poche”, qui consiste en un enfouissement dans un repli conjonctival) a permis de repositionner la glande et d’obtenir un résultat esthétiquement satisfaisant. Aucune récidive n’est intervenue.

Ces trois cas montrent que le prolapsus de la glande nictitante peut être une affection primitive de l’œil chez des chats de races variées.

2 SYNDROME UVÉO-CUTANÉ CHEZ DEUX CHIENS.

L’analyse immunohistochimique de prélèvements oculaires et cutanés est réalisée chez deux chiens de race akita inu présentant un syndrome uvéo-cutané (ou syndrome de Vogt-Koyanagi-Harada), afin de préciser la pathogénie de cette affection.

L’examen histologique confirme la panuvéite : une infiltration granulomateuse avec des agrégats lymphoïdes périvasculaires est visible, des mélanophages sont présents dans toutes les lésions et des plasmocytes sont disséminés dans les tissus.

D’un point de vue immunohistologique, les lymphocytes T apparaissent peu nombreux et la majorité des lymphocytes appartiennent à la lignée B.

Les biopsies cutanées effectuées chez les deux chiens semblent correspondre à deux stades de l’affection cutanée.

Chez l’un d’eux, les lésions, bien caractéristiques de ce syndrome, sont une dermatite granulomateuse et une infiltration par des lymphocytes T, s’étendant à l’épiderme. Pour l’autre, les signes d’inflammation sont moins marqués, mais un déficit pigmentaire et une fibrose du derme sont visibles. Aucun dépôt d’immunoglobulines ou de complément n’est observé dans les prélèvements oculaires ou cutanés.

En comparant les profils de production de cytokines, les résultats suggèrent que les lésions cutanées sont liées à une réponse immunitaire Th1 (médiation de lymphocytes T et de macrophages), tandis que les lésions oculaires correspondraient plus à une réponse de type Th2 (lymphocytes B et macrophages).

D’autres études sont nécessaires pour savoir si ces observations isolées sont représentatives de cette affection.

3 RÉGRESSION SPONTANÉE D’UNE CATARACTE DIABÉTIQUE.

Un cocker spaniel âgé de dix ans, traité pour un diabète sucré, est présenté en consultation, car sa vision semble s’altérer. Les examens révèlent une cataracte immature et une iridocyclite bilatérales. Le clignement à la menace est normal. Trois mois après, la cataracte est complète et mature. Le clignement à la menace est devenu négatif. Quatre mois plus tard, l’examen montre que la cataracte de l’œil droit a diminué et que le clignement à la menace est restauré. La résorption se poursuit ensuite et le matériel lésionnel disparaît presque complètement, permettant une restauration de la vision. Seule demeure une opacité d’une petite partie du nucléus, lequel est tombé au fond du sac cristallinien en raison de la liquéfaction du cortex (cataracte de Morgani).

Lors de cataracte hypermature, une liquéfaction plus ou moins marquée des protéines du cristallin (cortex) est systématique ; elle est souvent associée à une régression variable de la cataracte. Ce type de résorption spontanée est relativement fréquent chez de jeunes chiens lors de cataracte d’origine héréditaire, mais il est rarement décrit chez des chiens âgés (de plus de six ans) et la résorption est alors incomplète. La régression spontanée est toutefois un phénomène aléatoire. De plus, elle est toujours accompagnée d’une uvéite phacoantigénique, d’autant plus marquée que le chien est jeune lors de l’apparition de la cataracte.

Cette réaction inflammatoire orientée sur les antigènes libérés lors de la liquéfaction du cortex peut entraîner des complications graves (glaucome). L’expectative n’apparaît donc pas comme une alternative satisfaisante à l’intervention chirurgicale lors de cataracte chez le chien.

4 DÉTECTION D’ANTICORPS ANTIPROTÉINES CRISTALLINES LORS DE CATARACTE.

Dans une étude, les anticorps antiprotéines cristallines sont recherchés dans le sérum et l’humeur aqueuse de chiens sains et d’autres présentant une cataracte, afin de savoir si leur concentration varie avec le stade de la cataracte et s’il existe une relation entre cette concentration et la présence d’une uvéite phacoantigénique.

Les groupes sont constitués d’après les résultats des examens clinique et ophtalmologique : 1, absence de cataracte ; 2, cataracte débutante ; 3, cataracte immature ; 4, cataracte mature ; 5, cataracte hypermature ; 6, cataracte diabétique. Les protéines cristallines sont isolées par électrophorèse et les anticorps antiprotéines cristallines sont recherchés par une analyse Western immunoblot et par un test Elisa.

Tous les tests sur les échantillons d’humeur aqueuse sont négatifs. En revanche, les anticorps antiprotéines cristallines sont détectés dans le sérum chez respectivement 59,3 % (16 chiens sur 27), 66,7 % (16 sur 24), 50 % (10 sur 20), 37,9 % (11 sur 29), 28,6 % (6 sur 21) et 26,7 % (4 sur 15) des chiens des groupes 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Globalement, la mise en évidence des anticorps est positive pour 43,1 % des cas (47 sur 109).

L’analyse de ces résultats révèle une corrélation négative significative entre la détection de ces anticorps d’une part, et l’existence et le stade de maturité d’une cataracte d’autre part. En outre, chez les chiens qui présentent une cataracte immature ou hypermature, une corrélation négative significative entre le titre en anticorps et la gravité de l’uvéite est observée.

5 IDENTIFICATION IMMUNOHISTOCHIMIQUE D’ENCEPHALITOZOON CUNICULI LORS D’UVÉITES PHACOCLASTIQUES CHEZ LE LAPIN.

Encephalitozoon cuniculi est un microsporidium susceptible d’infecter de nombreuses espèces de mammifères. Chez le lapin, il peut être la cause de cataractes et d’uvéites phacoclastiques.

Une étude menée chez quatre lapins pour lesquels une uvéite phacoclastique est suspectée cherche à établir, par des techniques immunohistochimiques, la présence d’Encephalitozoon cuniculi et sa localisation dans l’œil de l’animal.

Les quatre lapins présentent une masse dans l’œil et une décoloration de l’iris. Un traitement à l’aide de corticoïdes (topiques), d’atropine et d’enrofloxacine (systémique) est initié, pendant que des tests sérologiques et cytologiques sont entrepris. Une énucléation est finalement nécessaire dans tous les cas.

Des examens histologiques et immunohistochimiques (méthode ABC) sont réalisés (sérum anti-Encephalitozoon cuniculi). Le résultat de l’examen sérologique par immunofluorescence indirecte est positif au titre de 1/32 chez un lapin et les tests ICA sont positifs chez les trois autres(1/5 120 pour un animal et 1/2 560 pour les deux autres). A l’examen histologique, une infiltration pyogranulomateuse intraoculaire, envahissant une partie de la chambre postérieure et contenant une large brèche dans la capsule antérieure du cristallin est observée chez tous les lapins. A l’examen immunohistochimique, des spores (probablement incluses dans des macrophages ou des cellules épithéliales du cristallin), réagissant avec l’antisérum, sont présentes chez tous les animaux.

Cette détection d’E. cuniculi a déjà été entreprise par d’autres méthodes chez des lapins présentant des uvéites phaco-antigéniques. Cette étude montre l’intérêt de la recherche et de la localisation de ce microsporidium par cette technique immunohistochimique.

BIBLIOGRAPHIE

  • • S. Chahory, M. Crasta, S. Trio, B. Clerc : « Three cases of prolapse of the nictitans gland in cats », Vet. Ophthalmol., 2004, vol. 7, n° 6, pp. 417-419.
  • • W. J. Carter, S. M. Crispin, D. J. Gould, M. J. Day : « An immunohistochemical study of uveodermatologic syndrome in two Japanese Akita dogs », Vet. Ophthalmol., 2005, vol. 8, n° 1, pp. 17-24.
  • • E. Gonzalez-Alonso-Alegre, A. Rodriguez-Alvaro : « Spontaneous resorption of a diabetic cataract in a geriatric dog », J. Small Anim. Pract., 2005, vol. 46, n° 8, pp. 406-408.
  • • H. M. Denis, D. E. Brooks, A. R. Alleman, S. E. Andrew, C. Plummer : « Detection of anti-lens crystallin antibody in dogs with and whitout cataracts », Vet. Ophthalmol., 2004, vol. 7, n° 4, pp. 321-327.
  • • C. Giordano, A. Weight, A. Vercelli, M. Rondena, G. Grilli, C Giudice : « Immunohistochemical identification of Encephalitozoon cuniculi in phacoclastic uveitis in four rabbits », Vet. Ophthalmol., 2005, vol. 8, n° 4, pp. 271-275.
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