Les staphylocoques coagulase négative, mineurs ou émergents, suscitent des questions - La Semaine Vétérinaire n° 1228 du 03/06/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1228 du 03/06/2006

Mammites des vaches laitières

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Catherine Bertin-Cavarait

Leur identification est à approfondir. La prévalence des infections mammaires et la période de la guérison spontanée sont différentes chez les vaches primipares et les multipares.

Pendant longtemps, les staphylocoques coagulase négative (SCN) ont été considérés comme des agents pathogènes mineurs en termes de santé de la mamelle et la guérison des mammites à SCN était censée être spontanée. Un effet protecteur leur a d’ailleurs été attribué via l’inflammation modérée qu’ils induisent. En effet, les infections à SCN occasionnent une élévation modérée de la numération cellulaire du lait. En 2002, notre confrère Belgacem Djabri a estimé l’effet des infections mammaires à SCN sur cette numération par méta-analyse, à partir de quatorze études. Le comptage des cellules somatiques (CCS) du lait est multiplié par deux par rapport aux CCS de quartiers bactériologiquement négatifs, soit une valeur comprise entre 150 000 et 200 000 cellules/ml de lait, en valeur médiane. Néanmoins, une forte variabilité est observée. La numération cellulaire est plus élevée si le quartier a été atteint d’une mammite clinique auparavant.

Actuellement, les SCN sont plutôt considérés comme des agents pathogènes émergents. Bien qu’ils induisent peu de mammites cliniques, ils sont mis en évidence dans 10 à 15 % des prélèvements de lait lors de mammites cliniques chez les vaches, plus particulièrement en début de lactation. En moyenne, une augmentation de la prévalence des infections à SCN de dix points entraîne une hausse de la numération cellulaire du lait de tank de 25 000 cellules/ml. Aussi, lors de prévalence élevée d’infection mammaire à SCN, la limite de pénalité retenue pour le paiement du lait peut être dépassée. Cet impact des staphylocoques sur la qualité du lait a été abordé par notre consœur Nathalie Bareille, de l’unité mixte de recherche “gestion de la santé animale” (UMR GSA) de l’école de Nantes, lors des journées européennes organisées par la Société française de buiatrie en novembre dernier. Ces dernières ont aussi été l’occasion de faire un point sur l’identification des SCN et la prévalence des mammites qu’ils induisent.

La persistance des infections à SCN dépend de l’espèce bactérienne

Les staphylocoques sont divisés en deux groupes selon leur aptitude à coaguler le plasma : les staphylocoques coagulase positive comme Staphylococcus aureus, et les staphylocoques coagulase négative. Contrairement à S. aureus, les SCN ne présentent pas de risques vis-à-vis de la santé humaine. Ils sont identifiés d’après leurs caractéristiques phénotypiques. « Les tests d’identification rapide habituellement utilisés permettent d’identifier 70 à 80 % des isolats de mammites dues aux SCN, avec une probabilité de 90 % », souligne notre consœur Suvi Taponen, de l’université d’Helsinki. Bien que les méthodes moléculaires se développent rapidement, leur emploi est encore limité. D’une part, la discordance entre les phénotypes et les génotypes bactériens perturbe l’interprétation des analyses moléculaires. D’autre part, il n’existe pas encore de consensus quant à une définition du critère d’espèce fondé sur le génotype. Selon Suvi Taponen, le test idéal identifierait rapidement et correctement l’espèce de SCN en cause directement à partir du lait et détecterait le gène blaZ de résistance à la pénicilline.

Si S. chromogenes et S. simulans sont les deux espèces le plus souvent isolées des laits mammiteux bovins, S. hyicus et S. epidermis sont aussi fréquemment rencontrés. « L’espèce dominante isolée chez les génisses est S. chromogenes. Durant la première lactation, et particulièrement lors des suivantes, S. simulans est plus fréquemment isolé », note notre consœur.

Ses travaux montrent qu’au moins la moitié des infections mammaires à SCN détectées en période post partum persistent jusqu’à la fin de la lactation et sont à l’origine de numérations cellulaires élevées tout au long de celle-ci. Les infections par S. chromogenes et S. epidermis disparaissent rapidement après la mise bas. En revanche, les infections par S. simulans durent plusieurs semaines.

Les mammites à SCN répondent bien aux traitements antibiotiques. Ceux à spectre étroit sont préférés dans les pays nordiques. Le taux de guérison des mammites sensibles à la pénicilline est compris entre 80 et 90 %. Lors d’une étude clinique, notre consœur a observé un taux de guérison spontanée inférieur à 50 %.

Le taux de guérison spontanée des infections à SCN chez les vaches primipares est élevé

Lors d’une étude de prévalence menée dans cinquante-sept élevages de Bretagne et des Pays-de-la-Loire, soit chez sept cent cinquante-quatre vaches primipares de race prim’holstein, Nathalie Bareille a constaté que 71,3 % des infections à SCN présentes avant le vêlage ont disparu en début de lactation, la guérison se poursuivant tout au long du premier mois de lactation. Selon elle, cela s’expliquerait par la vidange périodique de la mamelle lors de la traite.

Ces travaux, menés par l’équipe de l’UMR GSA d’octobre 2000 à octobre 2001, visaient à mettre à jour les connaissances sur la prévalence des infections à SCN autour du vêlage et à évaluer leurs conséquences sur la qualité du lait produit. Les vaches étudiées ont fait l’objet de prélèvements de lait (un par quartier) un à quatre jours avant le vêlage et dix à quinze jours après. Les analyses des prélèvements réalisés avant montrent une prévalence de 51,8 % de quartiers atteints par une infection à SCN, pour une prévalence de quartiers infectés de 64,4 %. Les SCN représentent 76,4 % des infections diagnostiquées (voir graphique 1). Une forte décroissance est constatée deux semaines après le vêlage, avec 20,4 % des quartiers atteints. La proportion des infections reste de 74,2 %. Une grande variabilité entre élevages est notée (voir graphique 2). S. chromogenes est isolé dans 65 % des infections.

Dans cette étude, les élevages n’ont pas été choisis selon un mode aléatoire, d’où des prévalences vraisemblablement plus élevées que la moyenne. D’autres travaux fondés sur le suivi de vaches laitières en péripartum font apparaître une prévalence des infections à SCN comprise entre 14 et 58 % des quartiers. Néanmoins, la plupart d’entre eux ne concernent qu’un nombre limité de troupeaux et d’animaux.

La prévalence chez les multipares est deux fois moindre que chez les primipares

Dans le cadre d’une collaboration avec l’Institut de l’élevage, cinq cent cinquante-six vaches multipares, issues de vingt-huit élevages de l’ouest de la France, ont fait l’objet de prélèvements de lait le jour du tarissement et trois jours après le vêlage durant la période de mai 2003 à septembre 2004, en vue d’un examen bactériologique. La prévalence des infections à SCN au tarissement est en moyenne de 18,8 % des quartiers, soit 57,3 % des infections identifiées. Après le vêlage, cette prévalence n’est plus que de 10,5 % des quartiers dans les élevages qui ont choisi de ne pas traiter, soit 40,4 % des infections. Le taux de guérison spontanée s’élève à 68,2 % chez les vaches non traitées et à 78,6 % chez les vaches traitées. Les niveaux d’incidence des nouvelles infections sont de 6,9 % chez les vaches non traitées et de 6,7 % chez les vaches traitées.

Ces données sont assez proches des prévalences relevées dans la bibliographie (voir tableau). La prévalence tend à diminuer entre le tarissement et le vêlage, même en l’absence de traitement antibiotique. Le taux de guérison en période sèche est particulièrement important, s’échelonnant de 72,7 % à 86 %. Le taux de guérison des lots traités est plus élevé de dix points.

Pour Nathalie Bareille, la dynamique des infections à SCN autour du vêlage est caractérisée, tant chez les primipares que chez les multipares, par un taux de guérison spontanée élevé et une incidence modérée en début de lactation. Chez les vaches primipares, la guérison des infections est tardive, en lien avec le début de la traite, alors que les infections présentes au tarissement ont déjà guéri au vêlage chez les vaches multipares.

Les diagnostics bactériens mettent-ils en évidence une infection de la peau des trayons avec une colonisation du canal ou une infection profonde des quartiers ? Selon notre consœur, plusieurs études militent en faveur d’une localisation glandulaire des infections à SCN, au moins pour celles qui sont présentes en début de lactation. Modifications histologiques de la glande mammaire des génisses infectées, production laitière des primipares infectées réduite par rapport à celle des vaches saines, essais inefficaces de prévention des infections à SCN par la désinfection des trayons sont autant d’arguments qui plaident en faveur d’une infection profonde des quartiers.

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