L’enseignement vétérinaire et la pharmacovigilance au cœur des discussions - La Semaine Vétérinaire n° 1228 du 03/06/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1228 du 03/06/2006

Fédération vétérinaire européenne. Assemblée générale à Malaga

Actualité

Auteur(s) : Karin de Lange

La réunion de la FVE a permis d’évoquer la poursuite de son travail d’harmonisation et d’échange d’informations au niveau européen. Elle a aussi été l’occasion d’aborder le mal-être au sein de la profession.

Comme d’habitude, l’édition printanière de l’assemblée générale de la Fédération vétérinaire européenne (FVE) a eu lieu dans l’un de ses pays membres. Après la France (Nice) en juin 2005, les Espagnols ont invité leurs confrères à Benalmadena (Malaga), sur la Costa del Sol, les 19 et 20 mai derniers.

La qualité de l’enseignement vétérinaire a occupé les discussions. L’évaluation des écoles, les débats sur le cursus à deux niveaux (bachelier/master), ou encore le système de sélection et le soutien moral aux étudiants et aux jeunes confrères ont été évoqués par l’assemblée à plusieurs reprises.

L’isolement et l’accès aux médicaments font du suicide une spécialité vétérinaire

Les pressions sont énormes et parfois lourdes de conséquences, comme l’a illustré Jerry Lucke lors de sa présentation. Vétérinaire britannique et directeur de la Veterinary Benevolent Fund, fondation créée pour le soutien moral (et financier) des confrères, il annonce que « la probabilité qu’un vétérinaire se suicide est quatre fois plus élevée que pour la moyenne de la population ». Ce constat a fait la “une” des grands quotidiens britanniques en octobre dernier, à la suite d’une courte communication dans le Veterinary Record(1). « Cela a choqué et surpris le grand public, pour qui nous sommes des gens heureux qui font un métier de rêve. »

Quant aux explications possibles, Jerry Lucke cite l’accès facile aux moyens (médicaments), les pressions du travail, l’isolement social et une perception particulière de la vie et de la mort. L’abattage en masse d’animaux sains dans le cadre de la lutte sanitaire, comme lors de la récente épizootie de fièvre aphteuse, peut également jouer un rôle. Mais il convient aussi de s’interroger sur le système de sélection. Retient-il le bon profil ? « La plupart des aspirants vétérinaires sont intelligents, engagés et motivés. Mais la vie professionnelle se révèle souvent différente : astreignante, épuisante et socialement isolante. La profession et les étudiants doivent être informés de ce risque. » Ce n’est d’ailleurs pas un phénomène typiquement britannique : lorsque l’intervenant demande à l’audience qui a connu personnellement un confrère qui s’est suicidé, la grande majorité de l’assemblée lève la main.

Enseignement et évaluation : la FVE prône un renforcement du contrôle et des sanctions

Plusieurs délégués ont demandé que la FVE rejette le processus de Bologne(2) pour l’enseignement vétérinaire et qu’elle rappelle que la législation européenne stipule que les études vétérinaires doivent se poursuivre pendant cinq ans au minimum.

Les premiers pas vers un système d’accréditation ont également été faits à Malaga. L’assemblée a voté le passage d’une évaluation volontaire à un système obligatoire à deux niveaux. Des quatre-vingt-quinze structures membres de l’Association européenne des établissements d’enseignement vétérinaire (AEEEV), seules trente-sept ont obtenu une visite d’évaluation positive. « Si l’évaluation n’est pas faite ou donne de mauvais résultats, il n’y a aucune conséquence, regrette Marcel Wanner, président de l’AEEEV. Tous les vétérinaires diplômés de ces écoles peuvent travailler partout dans l’Union européenne. Nous avons besoin d’un système puissant, avec des sanctions et un soutien politique. »

Catherine Roy (France) a présenté les résultats d’une enquête sur le rôle des organismes dans vingt-huit pays membres de la FVE. Ils montrent une grande différence sur les rôles, les compétences et le fonctionnement des organismes statutaires. Cet exposé a convaincu l’assemblée de voter en faveur de la mise en place d’un groupe de travail sur les organismes statutaires (comme l’Ordre des vétérinaires). Ce groupe aidera à mettre en place un réseau européen en vue de faciliter les échanges d’informations.

D’autres thèmes comme la licence vétérinaire, le système disciplinaire ou un Code de déontologie au niveau européen restent à aborder.

Un amateur néerlandais peut débourser jusqu’à 40 € pour faire vacciner deux poules

Pour chacun des deux pays européens ayant opté pour la vaccination des volailles contre l’influenza aviaire, la France et les Pays-Bas, des délégués ont présenté un état des lieux… contrasté. En France, la vaccination a concerné essentiellement des canards à gaver dans les Landes (500 000 têtes pour 130 élevages). Les coûts directs (0,86 €/oiseau) ont été pris en charge par l’Etat.

Aux Pays-Bas, la vaccination n’a interessé que trois élevages commerciaux de plein air, mais aussi environ 10 000 oiseaux de basses-cours tenues par des amateurs. « Cela a constitué un travail non négligeable », se souvient Arjan den Hertog, président de l’Association néerlandaise des vétérinaires pour animaux de rente. Tous les oiseaux à vacciner devaient être identifiés par bague, les propriétaires être enregistrés, et 5 % des élevages (deux animaux au minimum) devaient faire l’objet de deux prises de sang (avant et après la vaccination), et tout cela réalisé par des vétérinaires sans expérience particulière dans le secteur des volailles… « Nous avons donc organisé des formations sur la contention, la vaccination et la prise de sang chez les volailles, et nous avons ainsi formé quelque deux cents confrères. » Et le coût ? « Pour les propriétaires non professionnels, les frais n’ont pas été remboursés. Et, puisque les autorités avaient interdit aux vétérinaires de fixer les tarifs, les praticiens ont simplement additionné l’acte, la visite et le temps passé. Pour un amateur avec deux poules, cela peut facilement atteindre 20 € par animal… » Détail saillant : tandis que la France a opté pour le vaccin néerlandais (Intervet), les Néerlandais ont utilisé le vaccin… français (Merial).

Un formulaire électronique européen de pharmacovigilance sera disponible cet été

Fia Westerholm, de l’Agence européenne du médicament (EMEA), a souligné l’importance de la pharmacovigilance vétérinaire.

« Malheureusement, la communication des effets indésirables n’est pas partout obligatoire, ce qui peut mener à une sous-estimation de l’importance d’un problème. Un incident isolé peut sembler anecdotique, mais s’il y en a plusieurs qui vont dans le même sens, cela change tout. » Elle a présenté le formulaire électronique, identique pour tous les pays membres, qui sera disponible cet été. Le document fait actuellement l’objet d’une étude pilote dans plusieurs cabinets vétérinaires en Europe. Un mode d’emploi pour la déclaration des effets adverses suspectés sera également disponible(3).

L’hygiène alimentaire, le bien-être animal et les médicaments vétérinaires ont fait partie des autres sujets abordés à Malaga. La rencontre a également fourni l’occasion d’une réunion avec le bureau de l’Association mondiale vétérinaire (WVA), avec laquelle la FVE cherche à collaborer plus étroitement.

Rendez-vous aux prochaines assemblées générales, les 17 et 18 novembre 2006 à Bruxelles et les 17 et 18 juin 2007 à Cracovie.

  • (1) R.J. Mellanby :« Incidence of suicide in the veterinary profession in England and Wales », The Veterinary Record, 2005, n° 197, pp. 415-417.

  • (2) Voir La Semaine Vétérinaire n° 1227 du 27/5/2006 en page 20.

  • (3) www.eudravigilance.emea.eu.int/veterinary

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