Une césarienne réalisée trop tôt est fatale pour les chiots - La Semaine Vétérinaire n° 1226 du 20/05/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1226 du 20/05/2006

Reproduction canine

Formation continue

ANIMAUX DE COMPAGNIE

Auteur(s) : Alexandra Beck

Contrairement à d’autres espèces chez qui l’intervention avant terme est sans risque, le moment de réalisation d’une césarienne est capital chez la chienne.

La césarienne vise à extraire les fœtus par une ouverture pratiquée dans la paroi abdominale et l’utérus quand l’accouchement n’est pas possible par les voies naturelles. Cette intervention a deux objectifs : la survie de la mère et l’obtention de chiots vivants et viables. Ils peuvent être atteints par une décision opératoire judicieuse et une technique opératoire (anesthésie notamment) bien maîtrisée.

La première indication de la césarienne est le dépassement du terme. En effet, cela peut entraîner la mort fœtale (suivie d’une macération) ou la momification fœtale. Toutes deux sont mises en évidence par l’échographie (disparition des battements cardiaques) ou la radiographie (images aériques au bout de six heures, dislocations osseuses après quarante-huit heures). La datation du stade doit donc être précise. La gestation de la chienne dure soixante à soixante et un jours après la fécondation et les variations observées sont liées à la différence entre la date de saillie et celle de la fécondation. Sur vingt jours de chaleurs, la chienne n’est fécondable que pendant deux jours, mais les spermatozoïdes survivent dans le tractus génital cinq jours en moyenne (exceptionnellement sept à huit). La durée de la gestation peut donc varier de cinquante-huit à soixante-huit jours. Il est alors essentiel de connaître la date exacte de la saillie (si des dosages de progestérone ont été effectués) et surtout de savoir si celle-ci a été répétée.

Hormis le dépassement du terme, il existe d’autres indications de césarienne : chiennes en ayant déjà subi une, atonie utérine primaire (après l’échec du traitement médical) ou secondaire, disproportion fœto-maternelle absolue ou relative, présentation simultanée de deux fœtus avec une obstruction à la bifurcation des cornes, chiot engagé nécessitant une manœuvre obstétricale impossible ou dangereuse, existence de signes objectifs de désengrènement placentaire (pertes verdâtres) remontant à plus de six heures ou encore perte des eaux remontant à douze heures sans expulsion de chiots.

La césarienne peut être réalisée d’emblée s’il existe un risque médical pour la mère, si la valeur des chiots est élevée (races naines ou toy) ou s’ils sont nombreux. Elle revêt souvent un caractère d’urgence si l’on désire un maximum de chiots vivants. Une radiographie réalisée une semaine avant le terme présumé, voire juste avant la césarienne, est recommandée pour dénombrer les chiots. Cela permet d’éviter d’en oublier un, particulièrement chez les chiennes de grande taille pour lesquelles il n’est pas possible d’extérioriser tout l’utérus.

L’intervention est à pratiquer après le déclenchement naturel de la mise bas

L’intervention ne doit être entreprise qu’au moment opportun, c’est-à-dire après l’observation des prodromes du part. La “césarienne prophylactique”, assez courante chez la femme, risque, chez la chienne, de provoquer de graves hémorragies placentaires, un retard sensible de l’involution utérine et une entrave à la sécrétion lactée.

Contrairement à d’autres espèces, il n’est pas possible de déclencher l’accouchement ou de pratiquer sans risque une hystérotomie avant terme chez la chienne. Toute intervention réalisée avant le déclenchement naturel prive les chiots du dépôt de surfactant (phosphatidylcholine) sur la paroi alvéolaire pulmonaire et prédispose la portée à une anoxie mortelle. L’hystérotomie ne doit donc pas être entreprise avant le déclenchement de la mise bas. Deux éléments, concomitants, permettent au praticien d’intervenir à bon escient : l’hypothermie prépartum et le dosage de la progestéronémie. La césarienne, notamment de convenance, ne doit pas avoir lieu tant que le taux de progestérone n’a pas chuté en dessous de 2 ng/ml (ou 6 mmol/ml). Ce critère est plus fiable que la chute de température (de 1 °C par rapport à la moyenne, prise matin et soir plusieurs jours de suite), qui ne survient que dans 80 % des cas.

Les dystocies fœtales et/ou maternelles sont diagnostiquées par l’examen clinique, la radiographie ou l’échographie. Le toucher vaginal met en évidence une dilatation incomplète, une malformation congénitale du vagin (atrésie, bride) et une lésion des tissus mous (tumeur, polype, etc.). Il doit en outre déclencher des contractures réflexes de l’utérus chez une parturiente au stade expulsif et permet de diagnostiquer une éventuelle inertie utérine. L’échographie détecte précocement une souffrance ou une mort fœtale par l’observation des battements cardiaques (voir encadré). La radiographie permet d’expliquer la dystocie. Deux clichés (face et profil) sont indispensables pour mettre en évidence le nombre de fœtus restant dans l’utérus, la disproportion fœto-maternelle absolue ou relative, une anomalie de position fœtale, des malformations congénitales comme l’hydrocéphalie, la mort fœtale, une lésion du bassin.

La césarienne peut parfois conduire à pratiquer une ovariohystérectomie

Selon les cas, le traitement d’une dystocie est médical ou chirurgical. Lors d’atonie utérine, l’hystérotomie ne doit être envisagée qu’après l’échec d’une thérapeutique médicale visant à provoquer ou renforcer les contractions du myomètre. Il est important d’éviter le recours systématique à l’ocytocine et, en première approche, d’utiliser le gluconate de calcium (0,5 à 1 ml/kg, maximum de 10 à 15 ml). En cas d’échec, l’hystérotomie s’impose, mais il convient d’attendre l’élimination des effets de l’ocytocine (trente minutes environ).

Par ailleurs, au cours de l’intervention, l’observation de certaines lésions ou anomalies doit orienter vers une ovariohystérectomie. C’est le cas d’une infection utérine (en cas de suspicion clinique, il est déconseillé d’inciser l’utérus), d’une déchirure ou nécrose de l’utérus, d’une hémorragie des zones d’insertion placentaire (à la fin de l’intervention, une hémorragie intra-utérine importante est observée, qui se traduit parfois par l’augmentation du volume des cornes utérines nécessitant une transfusion sanguine, voire une opération), d’une involution utérine nulle (à la fin de l’intervention, une nette involution utérine doit être notée, si le diamètre de l’utérus ne se modifie pas et que sa tonicité n’est pas augmentée, il est préférable de pratiquer l’ovariohystérectomie, notamment chez une chienne âgée ou quand le nombre de fœtus est trop important).

Un nouveau protocole, à l’étude, permettrait de déclencher la mise bas au 58e jour

Contrairement à ce qui se pratique chez la femme, le déclenchement de la mise bas a longtemps été impossible et non souhaitable chez la chienne, les chiots prématurés de plus de quarante-huit heures n’étant pas viables. Un protocole de déclenchement est toutefois proposé depuis peu. Il consiste à associer un produit pour ouvrir le col, l’aglépristone (Alizine®), qui pourrait accélérer la maturation des chiots, et l’injection d’utérotoniques (ocytocine ou prostaglandines).

Après le 58e jour de gestation (déterminé par la visualisation échographique des anses intestinales ou radiographique des dents du fœtus, ou encore la connaissance du jour de fécondation par un suivi de chaleurs complet), l’expulsion des chiots vivants est obtenue dans les trente-six heures qui suivent l’injection d’Alizine®. Une étude sur la viabilité des chiots est en cours.

Ce protocole permettrait de planifier la mise bas ou la césarienne chez la chienne. Dès qu’un dosage (à effectuer matin et soir à partir du 58e jour) confirme que la progestérone est inférieure à 2 ng/ml, une injection d’aglépristone est effectuée (15 mg/kg par voie sous-cutanée). Une césarienne est alors pratiquée douze à vingt-quatre heures après. Si la chute du taux ne s’est pas produite au 60e jour, l’aglépristone est injectée pour provoquer une maturation. Si l’objectif est de déclencher une mise bas, de l’ocytocine est injectée à raison de 0,15 UI/kg (soit 0,015 ml/kg) toutes les deux heures. La mise bas survient trente-six heures après l’administration d’aglépristone.

CONFÉRENCIER

Philippe Mimouni, centre de reproduction du Sud-Ouest (L’Isle-Jourdain, Gers).

Article réalisé d’après la conférence « Indications de la césarienne » présentée lors du congrès annuel de l’Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie (Afvac), du 2 au 4 décembre 2005 à Toulouse.

Fréquence cardiaque fœtale

La fréquence cardiaque fœtale normale en fin de gestation est de 170 à 230 battements par minute (bpm). Une fréquence de 150 à 160 bpm indique un stress. Un fœtus présentant moins de 130 bpm a peu de chance de survivre et doit être sorti sous deux à trois heures. Un fœtus avec moins de 100 bpm nécessite une intervention immédiate.

A. B.
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