Optimisation du transfert d’immunité chez le veau
Formation continue
RURALE
Auteur(s) : Paul Perié
Le veau ne peut survivre sans une mise à profit correcte du transfert d’immunité passive. Des techniques simples existent en élevage pour améliorer l’apport de colostrum chez le nouveau-né.
Les veaux nouveau-nés sont dépendants de la tétée du colostrum, qui leur apporte des défenses immunitaires, leur fournit de l’énergie et soutient leur régulation thermique. De plus, l’apport d’un colostrum de qualité assure la bonne efficacité des vaccins administrés à la mère dans le but de protéger le veau. Cet apport est jugé satisfaisant s’il dépasse 10 g/l d’immunoglobulines sériques (à 80 % d’isotope I), ce qui correspond à 55 g/l de protéines totales par litre de sang.
Lors des journées de la Société française de buiatrie, qui ont eu lieu les 22 et 23 novembre derniers à Paris, notre confrère Renaud Maillard, maître de conférences en pathologie du bétail à l’école d’Alfort, a fait le point sur les différents moyens d’améliorer le transfert d’immunité colostrale.
La colostrogenèse débute six à huit semaines avant le part et se poursuit jusqu’à huit heures après. « 500 g d’immunoglobulines sont stockés par semaine si la mamelle est saine », explique notre confrère. Le colostrum contient aussi d’autres effecteurs de l’immunité (cytokines, leucocytes, etc.). Cet aspect ne doit pas être oublié lors de l’utilisation de colostrums lyophilisés ou congelés, qui semblent aussi participer à l’éducation immune du jeune.
De nombreux facteurs sont susceptibles de faire varier la concentration en immunoglobulines du colostrum :
- la race : le colostrum des jersiaises et des guernesiaises est le plus concentré, devant les races allaitantes ;
- l’individu : sa composition est répétable (d’une année sur l’autre) et héritable ;
- l’âge de la mère : le colostrum des génisses est moins riche et moins abondant que celui des multipares, le meilleur étant celui des vaches après deux ou trois vêlages ;
- la durée du tarissement : elle est d’au moins vingt-huit jours et de moins de quatre-vingt-dix jours ;
- la gémellarité : les mères de jumeaux produisent un colostrum moins riche ;
- l’état de santé des mères : les mammites, la fasciolose et les contaminants bactériens ont une influence négative ;
- la conservation : à + 4 °C, le colostrum peut être conservé une semaine, alors qu’à température ambiante, il est à utiliser dans les trois jours. S’il est congelé, il se garde un an, mais les leucocytes qu’il contient sont alors détruits.
En revanche, « l’alimentation pendant la gestation n’a que peu d’influence sur la composition “immunologique” du colostrum. Elle influe surtout sur la quantité produite et sur sa composition minérale, sauf pour les génisses qui semblent plus dépendantes de ces facteurs nutritionnels », estime Renaud Maillard.
Mais les rôles non immunologiques du colostrum ne doivent pas non plus être laissés de côté, car ils sont nombreux : apport énergétique, production d’hormones thyroïdiennes, régulation des acides gras plasmatiques, etc.
La première buvée est la plus importante et a le meilleur rendement d’absorption. Le veau doit ingérer entre 150 et 200 g d’immunoglobulines, ce qui correspond à 2 à 4 l de colostrum avec au moins 50 g d’immunoglobulines par litre. L’absorption n’est possible que dans les trente-six, voire vingt-quatre premières heures de vie.
Les immunoglobulines colostrales sont détectables dans le sang du veau dans les quatre à six heures qui suivent la première buvée. Elles peuvent ensuite persister et être toujours détectables plus de six mois après. « Ce phénomène ne doit pas être oublié lors des recherches sérologiques », rappelle notre confrère.
Différents facteurs font varier le transfert d’immunité passive, tels que la race, le poids de naissance (plus mauvaise absorption chez les individus les plus lourds et les plus légers), les conditions de mise bas, la saison, le lieu de naissance (moins bonne concentration sérique des veaux nés à l’étable, comparée à ceux nés au pré), la méthode de distribution du colostrum (certains préfèrent la tétée et d’autres le drenchage de deux prises de 2 l de colostrum, voire d’une prise unique de 4 l), les qualités maternelles, ainsi que l’acidose du veau, aussi bien respiratoire que métabolique, car elle diminue l’absorption de colostrum.
« Le transfert d’immunité passive repose sur la qualité intrinsèque du colostrum, la quantité ingérée et la précocité de cette ingestion », résume Renaud Maillard.
Le premier paramètre à évaluer est la qualité du colostrum, par exemple à l’aide d’un pèse-colostrum. Le seuil d’alerte est fixé entre 50 et 75 g d’immunoglobulines par litre (à 100 g/l il est considéré comme excellent). A défaut, un réfractomètre peut être utilisé. Il permet aussi de vérifier le transfert d’immunité via le dosage des protéines plasmatiques.
Pour s’assurer de ce transfert, l’électrophorèse des protéines plasmatiques, à partir d’un prélèvement de sang sur un tube EDTA, reste la méthode de choix. Dans le cadre d’un simple dosage d’immunoglobulines par un analyseur, le résultat est considéré comme mauvais s’il est inférieur à 10 g/l à quarante-huit heures. Une alternative est le dosage des GT (gamma glutamyl transferase), présentes dans le colostrum et absorbées par le veau en même temps que les immunoglobulines. Leur concentration doit être supérieure à 300 UI/l au deuxième jour de vie.
Pour établir un diagnostic de déficit en transfert d’immunité passive, une évaluation sur douze veaux de moins d’une semaine et de plus de deux jours et des mesures individuelles de colostrums de première traite sont nécessaires. Ensuite, différentes mesures sont à mettre en place pour améliorer la qualité et contrôler la quantité de colostrum distribuée (voir tableau).
La première chose à faire est d’agir sur le mode de distribution et la première buvée. Il convient de peser le colostrum. Si la concentration en immunoglobulines est supérieure à 70 g/l, une buvée de 2 l est réalisée, sinon un drenchage de 4 l (ou 2 buvées de 2 l espacées de trois à six heures) est pratiqué. Ensuite, une colostrothèque peut être entreprise. Elle nécessite également peu de moyens. Enfin, l’utilisation de colostro-remplaceurs est possible.
Pour le long terme, il peut être envisagé de revoir le tarissement (alimentation, traitements fasciolicides, etc.) ou d’effectuer une sélection sur les qualités maternelles. Mais ces derniers éléments sont beaucoup plus difficiles à contrôler. Pour certains, comme la gémellité ou la race, c’est même totalement illusoire.
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