Plusieurs voies d’éradication de l’infection par le virus de la BVD sont utilisées en Europe - La Semaine Vétérinaire n° 1224 du 06/05/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1224 du 06/05/2006

Epidémiologie de la diarrhée virale bovine (BVD)

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Catherine Bertin-Cavarait

Le succès des actions mises en œuvre dans les pays scandinaves est à relier à la réduction de l’incidence initiale de l’infection et à la maîtrise des facteurs de risque propres à ces pays.

Il y a treize ans, les quatre pays scandinaves (Norvège, Suède, Danemark, Finlande) ont décidé l’éradication de l’infection des troupeaux bovins par le virus de la diarrhée virale bovine (BVD).

Actuellement, l’incidence annuelle des nouvelles infections par le virus de la BVD est inférieure à 0,01 %. Bien que ces pays aient en commun l’interdiction de la vaccination contre la BVD, situations de départ, cheminement, rapidité d’assainissement et motivation des éleveurs ont été différents pour chacun d’eux. A l’exception de la Finlande, l’adhésion des éleveurs aux plans de lutte est une obligation réglementaire. Dans ce pays, deux programmes d’assainissement coexistent, l’un piloté par le ministère de l’Agriculture et l’autre par l’industrie laitière. Seul le premier permet l’obtention d’une qualification.

Avec des prévalences initiales de niveau variable (assez faible en Norvège, très faible en Finlande, mais élevé en Suède et au Danemark), l’élevage laitier de ces pays est caractérisé par un certain nombre d’atouts au regard des facteurs de risque d’élevage en lien avec l’infection par le virus de la BVD (voir ci-dessous).

Au sein de l’Europe, fréquences d’infection par le virus de la BVD et stratégies de lutte sont hétérogènes (voir carte). En matière d’éradication de l’infection par le virus de la BVD, deux méthodes sont employées : la voie sanitaire, via l’absence de vaccination et le respect de règles de biosécurité strictes, et la voie médicale, par la vaccination. Quel que soit le type de prophylaxie engagé, le point de départ de l’ensemble des plans de maîtrise repose d’une part sur la connaissance du statut infectieux des élevages, et d’autre part le dépistage systématique des animaux infectés permanents immunotolérants (IPI) et leur élimination.

En outre, la mise en œuvre des programmes de lutte collectifs constitue un point clé, incontournable, de l’efficacité de la maîtrise de la circulation interélevage du virus de la BVD. Cette efficacité a été largement démontrée par l’histoire des plans de lutte engagés depuis dix ans, comme celui développé par l’Union bretonne des groupements de défense sanitaire.

Lors des journées européennes organisées par la Société française de buiatrie en novembre dernier, notre consœur Christine Fourichon(1) a présenté les situations épidémiologiques des pays européens vis-à-vis de la BVD, les différentes stratégies de contrôle de la maladie en Europe et les résultats.

Les prévalences de l’infection BVD sont inférieures à 0,1 % dans les pays scandinaves

Les données épidémiologiques des pays scandinaves, en particulier pour les troupeaux laitiers, sont précises et nombreuses, les facteurs de risque de la contamination des troupeaux sont majoritairement identifiés et un bilan des actions de maîtrise peut être établi. Actuellement, la prévalence de l’infection est inférieure à 0,1 %.

En Finlande, la prévalence initiale d’infection par le virus de la BVD était faible. En 1993, seulement 1 % des troupeaux laitiers présentaient des sérologies de lait de tank positives. En 2003, 28 troupeaux sur 18 400 (0,15 %) avaient des sérologies de lait de tank positives. En 2003, aucun animal IPI n’a été dépisté, et en 2004, seuls 3 élevages bovins non indemnes étaient enregistrés.

Avec une prévalence initiale des troupeaux présentant un lait de tank séropositif égale à 27 %, la Norvège bénéficiait d’une situation favorable. Seulement 7,1 % de ses troupeaux avaient un taux d’anticorps dans le lait de tank très élevé, indiquant une circulation récente du virus. A la fin 2002, 6 % des troupeaux présentaient des laits de tank séropositifs et 0,3 % des taux d’anticorps élevés. Début 2004, seulement 8 troupeaux étaient soumis à des restrictions. Dix ans plus tôt, ils étaient 2 950.

Le Danemark et la Suède présentaient la prévalence initiale la plus élevée des pays nordiques. Au début des années quatre-vingt-dix, le taux d’élevages laitiers danois possédant un animal IPI était estimé à 39 %. La prévalence des troupeaux séropositifs variait de 65 à 90 %. Dans ce pays, l’adhésion obligatoire au programme de lutte a été réglementée dès 1996. En mars 2003, l’infection était confirmée pour 152 troupeaux (sur 26 500), soit 0,06 % des troupeaux. Huit nouveaux cas d’infection ont été enregistrés au cours de la même année. En 2005, le taux d’infection était inférieur à 0,5 %.

En Suède, la prévalence des troupeaux bovins laitiers qui présentent une sérologie de lait de tank positive est passée de 52 % en avril 1993 à 2 % dix ans plus tard. Fin 2003, 152 troupeaux laitiers et 301 troupeaux allaitants faisaient l’objet d’investigations. A cette même période, le taux de nouvelles infections était estimé à 0,14 %, soit 34 nouveaux cas répertoriés parmi les 24 000 troupeaux bovins suédois. Au total, depuis 1993, 3 500 troupeaux ont été assainis.

Mettre en œuvre des mesures préventives strictes de biosécurité est essentiel

Les modalités de contamination ou de recontamination des troupeaux scandinaves ont été analysées. Les achats d’animaux contribuent pour 20 à 60 % aux contaminations des troupeaux et les contacts au pâturage pour plus de 40 %. Néanmoins, l’origine de 10 à 25 % des cas d’introduction du virus dans un troupeau reste indéterminée.

Si les achats sont une source majeure de contamination en Suède, Finlande et Autriche, la contamination liée aux contacts entre les troupeaux est prédominante en Norvège et en Autriche. Au Danemark, les contaminations sont majoritairement liées à l’homme (mauvaise gestion de la biosécurité).

La persistance du virus dans les troupeaux détectés positifs est liée à des facteurs humains au Danemark, en Norvège, en Suède et en Finlande et à des défauts de dépistage en Norvège.

Une enquête bretonne met en évidence comme facteurs de risque de contamination des troupeaux les achats d’animaux, en particulier s’il s’agit de bovins viande ; l’absence de précautions à l’achat en matière tant de dépistage que de pratique de la quarantaine ; les contacts au pâturage, en particulier pour les génisses ; la présence d’un atelier veaux de boucherie et l’utilisation de la monte naturelle.

L’importance épidémiologique d’autres facteurs de risque reste à préciser, comme le rôle de la faune sauvage ou celui des taureaux séropositifs produisant une semence viropositive. Récemment, notre confrère Bernard Guérin, directeur du Laboratoire national de contrôle des reproducteurs, a ainsi suivi pendant six mois un taureau séropositif produisant une semence viropositive à chaque éjaculat.

Avec des prévalences élevées, l’Allemagne privilégie l’utilisation de la vaccination

L’Allemagne, compte tenu des prévalences élevées (voir carte), a choisi d’associer la vaccination au dépistage et à l’élimination des IPI. Selon notre confrère Renaud Maillard(2), maître de conférences à l’école d’Alfort, « la mise en place d’une vaccination à grande échelle, dans une région où la séroprévalence initiale était de 70 %, a permis, en trois ans, de diviser par quatre la prévalence de troupeaux comprenant au moins un IPI (de 36 à 6 %) et le taux d’animaux virémiques (de 8,2 à 2,5 %) ».

Pour Volker Moennig, professeur à l’école de médecine vétérinaire de Hanovre, la forte prévalence de l’infection par le virus de la BVD et la densité élevée des troupeaux rendent le modèle scandinave inapplicable en Allemagne. Par ailleurs, depuis 2005, un programme obligatoire limite la commercialisation des animaux selon le statut BVD des troupeaux. Aussi, la première phase du programme national allemand d’éradication de la maladie prévoit la vaccination de toutes les femelles, avant leur première gestation, avec un vaccin conférant une protection fœtale. Cette étape est temporaire. Lorsque la pression infectieuse due aux animaux IPI aura suffisamment diminué, la vaccination sera interdite. Depuis 2004, la déclaration des animaux IPI est obligatoire en Allemagne.

Les bilans économiques présentés sont en faveur d’une éradication de l’infection par le virus de la BVD. En Norvège, le coût de l’éradication sur cinq ans s’élève à 4,4 millions d’euros pour une rentabilité estimée à 6 millions d’euros. Au Danemark, les coûts sur trois ans sont estimés à 27 millions d’euros, puis à 3,5 millions d’euros par an, avec un montant des pertes initiales évalué à 20 millions d’euros. En Bretagne, le coût de la maîtrise de la BVD est estimé à 3 € par année et par animal présent à l’inventaire (2 151 089 bovins en 2004(3)), soit 6,4 millions d’euros.

  • (1) Maître de conférences à l’unité mixte de recherche Ecole nationale vétérinaire de Nantes-Institut national de recherche agronomique sur la gestion de la santé animale.

  • (2) Le Point Vétérinaire, n° 249, octobre 2004, pages 48-50.

  • (3) Source ARSOE.

POUR EN SAVOIR PLUS

• Le Point Vétérinaire n° 249, octobre 2004.

• « Bovine viral diarrhea (BVD) control », Preventive Veterinary Medicine, vol. 72, n° 1-2, pages 1-220 (15/11/2005).

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