Plus de la moitié des bovins bretons sont garantis non infectés permanents immunotolérants - La Semaine Vétérinaire n° 1223 du 22/04/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1223 du 22/04/2006

Epidémiologie de la diarrhée virale bovine (BVD)

Formation continue

RURALE

Auteur(s) : Catherine Bertin-Cavarait

Diminution de la pression virale, fichier des animaux garantis non infectés permanents immunotolérants (IPI) et indicateurs prédictifs du dépistage des IPI signent les quatre premières années de maîtrise collective de la BVD.

A l’échelle de la Bretagne, où 80 % des élevages bovins sont des élevages laitiers, la maîtrise de l’incidence clinique de la diarrhée virale bovine (BVD) est menée collectivement, depuis juin 2000, par l’Union bretonne des groupements de défense sanitaire (UBGDS). L’objectif est le dépistage précoce des bovins infectés permanents immunotolérants (IPI) et leur élimination en vue de la maîtrise de la circulation intra-élevage et interélevages du virus de la BVD.

En effet, en 1996, les GDS bretons ont fait le constat de la limite de la politique d’assainissement mise en place exclusivement à la suite d’une expression clinique de la BVD (maladie des muqueuses, avortements, etc.). Entre 1990 et 1996, l’incidence annuelle de l’affection était de 3 %. 10 % de ces nouvelles contaminations étaient une recontamination d’élevages précédemment assainis.

Les études préalables à l’instauration du plan de maîtrise collective ont duré quatre ans, de 1996 à 2000. Indicateurs, seuils et méthodologies ont été établis et affinés. Un bilan de quatre années de maîtrise collective, de février 2001 à février 2004, a été présenté au titre de l’UBGDS, par Alain Joly, vétérinaire au GDS du Morbihan, à l’occasion de la Journée bovine nantaise du 6 octobre 2005 et des Journées européennes organisées par la Société française de buiatrie, les 22 et 23 novembre derniers.

75 % des élevages avec un IPI sont D avec un lait de petit mélange de primipares positif

Le dépistage des IPI en élevage bovin laitier a pour point de départ la connaissance du statut de l’élevage au regard de la BVD. Celui-ci est déterminé à partir de trois sérologies Elisa consécutives, réalisées sur lait de tank (voir tableau 1). Toutes les étapes de la méthode utilisée sont détaillées dans le schéma ci-contre. Un plan d’assainissement dure en moyenne deux ans. C’est le temps nécessaire au contrôle de trois générations consécutives.

Pour les élevages bovins allaitants, le profil infectieux est défini par la réalisation, sur les sangs de prophylaxie, d’une sérologie de mélange (de cinq à dix animaux) pour les deux catégories d’âge (entre vingt-quatre et trente-six mois et entre trente-six et quarante-huit mois).

La stratégie de mise en œuvre de la méthode varie selon les quatre départements bretons. Un assainissement par zone a été choisi dans le Morbihan et les Côtes-d’Armor. L’assainissement des élevages qui ont un statut D a été prioritaire dans le Finistère. En Ille-et-Vilaine, l’assainissement était fondé sur le volontariat de l’éleveur, sans incitation particulière.

La mise en place du plan de maîtrise collective a permis d’éliminer des animaux IPI dans environ 10 % du total des troupeaux. Les données cumulées des années 2003 et 2004 ont mis en évidence les profils prédictifs de la présence des IPI. 75 % des élevages qui détiennent un IPI sont de statut D avec un lait de petit mélange (LpM) de primipares positif. En outre, dans les troupeaux B, un LpM positif est prédictif de la présence d’un IPI parmi les génisses.

Les taux de survie et de transition attestent d’une baisse de la pression d’infection

De 2001 à 2005, le taux d’élevages bovins laitiers probablement indemnes de BVD (statut A) a augmenté de 11,6 points. Il est passé de 40 à 51,6 % pour l’ensemble de la région. Quant au taux d’élevages fortement infectés (D), il a baissé de douze points : de 32,9 à 20,8 % (voir graphiques). Le pourcentage d’élevages faiblement contaminés (B) est resté stable, à 24,7 %.

Les taux de survie et de transition à partir du statut initial permettent d’évaluer la dynamique de l’infection. Le nombre de cheptels assainis est supérieur au nombre de ceux nouvellement contaminés, « ce qui n’était pas le cas avant la mise en place du plan de maîtrise collective », souligne Alain Joly. La comparaison des deux périodes (février 2001 - février 2005 et octobre 1998 - février 2000) montre que 42,7 % des élevages D sont passés en B versus 22 %, 23,8 % sont passés en A versus 2 %. 30,40 % sont restés classés D versus 74 % (voir tableau 2).

L’analyse des résultats intradépartementaux montre l’efficacité supérieure des mesures d’incitation à l’adhésion au plan d’assainissement. « Dans le département du Morbihan, pour la période 2003-2005, le taux de survie en A est de 92 %, atteste Alain Joly. Pour la période 2001-2003, il était de 82 %. »

En outre, le nombre d’élevages A suspects de séroconversion est passé de 229 en février 2001 à 86 en février 2004, puis à 87 en février 2005, toujours pour la région Bretagne.

Parallèlement à l’assainissement, l’anticipation du risque en matière de recontamination a été organisée. Une enquête récente montre que le facteur de risque “voisinage” est mis en évidence dans 62 % des nouvelles contaminations, l’achat sans garanties dans 45 %. Dans 15 % des cas, la réponse reste hypothétique, soit, en valeur absolue, quelques cheptels par département et par an.

Devant cet état de fait, un outil de prévention de ces risques a été développé par l’UBGDS via le fichier des animaux garantis non IPI (FAG). En effet, un animal non IPI le reste toute sa vie.

La prévention de la “recontamination” est gérée via le fichier des animaux garantis non IPI

Outre la gestion des non-recontaminations, l’intérêt du FAG est économique. Il évite la répétition des analyses de laboratoire pour un animal déjà reconnu non IPI, à l’occasion d’une vente, d’un concours, d’un regroupement de cheptel, etc. Ensuite, l’intérêt est technique, via l’acquisition d’un outil qui atteste du statut non IPI d’un bovin avec une probabilité supérieure à la valeur prédictive positive(1) (VPP) du test de laboratoire le plus communément employé.

Le test classiquement utilisé pour dépister un animal IPI est l’antigénémie. Or celle-ci possède plusieurs inconvénients. Sa sensibilité et sa spécificité ne sont pas connues précisément, en raison de l’absence de laboratoire de référence, et sa VPP est médiocre. En effet, pour une prévalence de 2 % et une spécificité de 98 %, la VPP est égale à 66,7 %, soit une chance sur trois de se tromper en considérant que l’animal est un IPI. Le niveau d’erreur est donc important et coûteux.

Bien que la PCR ait une meilleure sensibilité et probablement une meilleure spécificité que l’antigénémie, elle présente l’inconvénient de dépister les virémiques transitoires, d’où une VPP médiocre quant au dépistage des animaux IPI.

L’objectif visé, lors de la création du FAG, était de limiter la marge d’erreur à moins d’un animal sur dix mille inscrits dans le fichier. Les critères d’inclusion des animaux, les modalités de définition et de traitement des anomalies ont fait l’objet d’un travail rigoureux. Pour ce faire, en plus de ses partenaires habituels (URGTV, FNGDS) l’UBGDS s’est entourée des écoles vétérinaires de Nantes et de Toulouse.

L’exploitation du fichier des animaux non IPI répond aux principes de l’assurance qualité

Les critères d’inclusion des animaux dans le FAG sont de différente nature. Soit l’animal a bénéficié d’une analyse qui lui est propre (sérologie, antigénémie, analyse RT-PCR), soit il bénéficie d’un résultat issu d’une analyse de mélange (PCR de mélange, sérologie de mélange), ou encore de résultats indirects, comme les génisses de plus de dix-huit mois qui appartiennent à un troupeau super A(2). Actuellement, plus de la moitié des animaux bretons sont inscrits dans le FAG(3).

Les procédures de contrôle qui permettent de détecter les anomalies inhérentes au FAG ont également été présentées par Alain Joly, puisque l’objectif est de tendre vers une fiabilité de 99,999 %. A la question relative à la prise de responsabilité lors d’une garantie à tort d’un animal non IPI, notre confrère répond que les GDS prendront leurs responsabilités et indemniseront les éleveurs victimes d’un préjudice.

Eleveurs et vétérinaires peuvent consulter le fichier via le site Internet de l’UBGDS. D’autre part, une étiquette autocollante est apposée sur l’attestation sanitaire à délivrance anticipée (Asda) de chaque bovin éligible (voir photo).

Depuis sa mise en place à l’automne 2003, une cinquantaine d’anomalies ont été détectées. Huit animaux, qualifiés de non IPI, étaient de vrais IPI. Ils appartenaient à un lot de bovins entièrement séronégatifs constitués exclusivement d’IPI. L’expression clinique a permis de les déceler. Trois animaux ont été intégrés à la suite d’une erreur de saisie. Pour les autres, il s’agissait de virémiques transitoires, qualifiés à tort d’IPI, pour lesquels l’antigénémie était positive.

Le code des échanges optimise leur gestion sanitaire au regard de la BVD

En 2003, la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire (FNGDS) a initié l’idée « d’un code des échanges établissant des règles claires, fixées et acceptées par l’ensemble des GDS, en matière de garanties exigibles à l’égard de la BVD lors de mouvements de bovins entre cheptels », a expliqué notre confrère Hervé Petit, vétérinaire à la FNGDS. Ce code des échanges est fondé sur le statut individuel “bovin non IPI” des animaux échangés, déterminé d’après les critères élaborés dans le cadre du FAG. A la date du 15 septembre 2005, trente-neuf départements s’étaient engagés à le faire respecter. Les animaux éligibles sont référencés via le logiciel Sigal, et une attestation individuelle est rédigée pour chaque bovin.

En conclusion, Alain Joly a souligné l’efficacité du partenariat praticien-éleveurs-GDS quant aux résultats sanitaires acquis à l’issue de ces quatre années. Les pistes de travail futures concernent l’évaluation du statut des bovins âgés de huit jours et du statut sanitaire des bovins allaitants, l’opportunité de la prise d’un arrêté préfectoral, les mesures à l’introduction, l’évolution du classement des troupeaux vers la présence ou l’absence de virus.

Sans un volet économique, ce bilan serait incomplet. Le coût de l’action est estimé à 1,5 € par année et par animal présent à l’inventaire pour le GDS. Le coût à la charge de l’éleveur est identique, soit un total de 3 € par année et par animal présent à l’inventaire.

  • (1) Valeur prédictive positive : probabilité qu’un animal infecté le soit.

  • (2) Une génisse “super A” est née sur une exploitation pour laquelle quatre sérologies sur lait de tank consécutives, réalisées tous les six mois, sont négatives, sous réserve que les résultats des sérologies du lait de tank de l’année 2003 aient été égaux à 000 ou 001, soit un total de six sérologies du lait de tank égal à 0.

  • (3) Voir aussi Le Point Vétérinaire n° 262, en pages 12 et 13 et n° 263 en page 51.

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