POUR RECRUTER UN CONFRÈRE, POINT DE CHICHIS NI FORMALITÉS - La Semaine Vétérinaire n° 1221 du 08/04/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1221 du 08/04/2006

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Auteur(s) : Alexandra Beck

Comment les praticiens s’y prennent-ils pour trouver un remplaçant ou un collaborateur ? Quelles méthodes de recrutement emploient-ils ? Sur quels critères repose leur sélection ? En la matière, les avis sont partagés, du côté des recruteurs comme des candidats.

A en juger par le nombre d’annonces qui circulent dans la presse professionnelle (voir carte en page 36), le marché de l’emploi vétérinaire salarié est plutôt actif. En 2005 par exemple, 792 annonces différentes sont parues au moins une fois dans La Semaine Vétérinaire et sur le site Planete-vet.com, dont près des deux tiers pour des postes de remplaçant ou d’aide, soit le double du nombre d’offres pour des cessions-créations de clientèle.

En pratique, les méthodes utilisées pour le recrutement de salariés vétérinaires semblent bien différentes de celles employées par les entreprises. Lettres de motivation, curriculum vitae rédigés selon des règles codifiées, multiples entretiens échelonnés sur plusieurs mois et tests de sélection plus ou moins déstabilisants sont des techniques peu, voire jamais mises en œuvre par les praticiens pour évaluer un candidat. Au contraire, les vétérinaires ont souvent besoin d’un remplaçant au pied levé, qui débute dès que possible (parfois dans les jours qui suivent). Les moyens pour le trouver diffèrent, mais le réseau local semble souvent privilégié en premier choix. « Je m’adresse généralement aux délégués des laboratoires, qui sont une précieuse source d’information sur les vétérinaires de la région en recherche d’emploi, et sont de bon conseil. Je me renseigne aussi auprès des confrères voisins, notamment à l’occasion des soirées de lancement de produits », explique Olivier Tanghe, praticien rural-mixte à La Bruffière (Vendée). « Deux ans après mon installation, j’ai suivi le parcours du chasseur de tête pour trouver des remplaçants. J’ai d’abord opté pour le bouche à oreille auprès des confrères de la région et recherché parmi les candidatures spontanées reçues ou les remplaçants potentiels venus se présenter », explique pour sa part Valérie Carré, praticienne canine à Dinard (Ille-et-Vilaine). Une technique dont Gaëlle Thierry, salariée en clientèle canine à Antony (Hauts-de-Seine), confirme l’efficacité : « A chaque fois que j’ai cherché un poste d’assistante, j’ai trouvé le plus souvent en étant informée par un vétérinaire qu’un confrère cherchait quelqu’un, sinon en répondant à des petites annonces. »

Dans les structures qui emploient des aides de longue durée (ALD), une certaine entraide peut s’observer d’un salarié à l’autre, chacun pouvant recommander un lieu où il a travaillé à ses connaissances. « Lorsqu’un de nos assistants quitte son poste, il n’est pas rare qu’il nous propose lui-même un remplaçant. Si ce dernier convient, il a souvent notre préférence », souligne ainsi Sylvain Abeille, praticien canin à Créteil (Val-de-Marne).

Les praticiens disposent souvent d’un panel de CV reçus spontanément à la clinique

En matière de candidatures spontanées, la technique qui consiste à venir se présenter en personne semble prisée par les vétérinaires en recherche d’emploi, même si ce n’est pas toujours la plus efficace, à court terme du moins. « J’ai procédé en sélectionnant sur une carte toutes les structures à proximité, puis j’ai fait du porte à porte. Je me déplaçais sans rendez-vous, pour remettre mon CV et discuter. J’ai plutôt été bien reçue à chaque fois, mais cela n’a rien donné, puisque les praticiens rencontrés n’étaient pas demandeurs », explique Christine Mendez del Villar, praticienne canine à Prades-le-Lez (Hérault). « Le dépôt en mains propres ou l’envoi de CV, ou encore le “démarchage” individuel n’a jamais fonctionné en ce qui me concerne », confirme Jacques Carreau, remplaçant/collaborateur mixte en Aquitaine. Les CV reçus par les praticiens constituent toutefois une base de recherche pour certains. « Je recrute d’abord à partir des candidatures spontanées reçues à la clinique. J’apporte à tout courrier reçu une réponse, même négative, puis j’effectue un classement chronologique. Les candidats qui ont pris la peine de se déplacer sont reçus systématiquement, et leurs CV rangés à part », explique Vincent Dattée, praticien canin à Antony (Hauts-de-Seine).

Dans le cas particulier des Dom-Tom (les offres outre-mer représentent 16 % du total annuel des offres de remplacement-assistant), le recours aux petites annonces implique souvent de prendre en charge le déplacement du candidat depuis la métropole. Le réseau local constitue donc une piste d’autant plus importante. « Depuis que je suis installé à La Réunion, j’ai réussi à chaque fois à trouver quelqu’un sur place, car il y a quelques remplaçants qui circulent sur l’île, plus ou moins régulièrement. Malgré tout, savoir si l’on va parvenir à trouver un remplaçant reste toujours un souci majeur, car ils sont rares et, comme partout, recherchés par tout le monde en même temps (surtout en décembre-janvier à La Réunion) », souligne Patrick Durand, praticien canin à Saint-Denis. L’une des difficultés sur l’île relève de la concentration des praticiens installés. Selon notre confrère, le nombre de libéraux est passé d’une douzaine lors de son installation en 1980 à près de quatre-vingts aujourd’hui. Un phénomène entretenu par l’installation sur place de certains remplaçants, séduits par l’environnement.

Le recrutement via les petites annonces vient après le bouche à oreille

Globalement, lorsque ni le réseau local ni les candidatures spontanées ne donnent satisfaction, les employeurs se tournent vers les petites annonces parues dans la presse professionnelle. Les salariés aussi optent pour cette solution, souvent dans un second temps, comme en témoigne Christine Mendez del Villar : « Après avoir moi-même passé une annonce, j’ai reçu deux réponses, dont l’une a débouché sur un travail à l’essai (quarante-huit heures) concluant. Par la suite, cette personne a fait de nouveau appel à moi et, surtout, a diffusé mon nom autour d’elle, ce qui m’a permis d’être contactée par d’autres. » Même cas de figure pour Jacques Carreau qui, après vingt ans d’exercice libéral, a opté pour les remplacements et les collaborations depuis 2002. L’insertion d’annonces de recherche d’emploi lui a permis de se constituer peu à peu une clientèle de huit à dix vétérinaires (certains par le bouche à oreille), qui l’ont d’abord mis à l’épreuve et le rappellent désormais plus ou moins régulièrement. « Je n’effectue pas d’assistanat de longue durée (uniquement des missions ponctuelles) et je fonctionne ainsi depuis quatre ans. Je parcours toujours attentivement les petites annonces de la presse professionnelle, sans en passer de nouvelles depuis un moment. Je dispose par ailleurs des coordonnées de quatre ou cinq confrères de ma génération susceptibles de répondre favorablement aux demandes que je ne peux satisfaire. En revanche, ce qui m’horripile le plus dans la recherche d’emploi, ce sont les “annonceurs” qui ne répondent pas aux CV envoyés ou déposés sur l’Internet… et dont les annonces récurrentes laissent présumer qu’ils ne sont pas fidèles à leurs employés-confrères. »

Les entretiens d’embauche pour des remplacements sont souvent informels

Une fois quelques candidats listés, comment s’effectue le recrutement à proprement parler ? Les vétérinaires ne semblent pas particulièrement portés sur les entretiens au sens strict, comme en témoigne Olivier Tanghe : « Je fixe un rendez-vous, souvent en dehors du cabinet. Je ne fais pas nécessairement visiter les locaux. Je me contente de présenter mon mode de fonctionnement, en une vingtaine de minutes. Cela n’a rien d’un entretien formel, mais je me rends assez vite compte si ça “colle” ou non. Je ne demande jamais à voir un CV ni un quelconque diplôme. J’estime que le candidat peut se cacher derrière. D’ailleurs, la seule fois où j’ai recruté un confrère qui était venu en mettant en avant son CV, cela s’est finalement mal passé et nous n’avons pas fait affaire. » Une approche que partage également Patrick Durand qui n’est « pas attiré par les CV trop étoffés. Je n’ai rien contre les débutants ou les anciens, je me méfie surtout des “super vétos”… ».

La plupart proposent toutefois, a minima, une rencontre de visu, si possible avec l’ensemble des associés. Notre confrère Vincent Dattée, pour sa part, a une méthodologie de recrutement plutôt élaborée. Il établit d’abord un contact par téléphone, durant lequel il décrit le poste. Si cela convient au candidat, un entretien sur place est fixé. « Je demande toujours un CV, qui permet d’initier la conversation. Si je pense retenir le candidat pour l’étape suivante, je lui propose une visite de la structure, généralement avec une auxiliaire, pour avoir les impressions d’un autre membre de la clinique et m’assurer de l’intégration de la personne dans l’équipe. J’annonce aussi à la recrue que je lui demanderai de rédiger, dans les jours qui suivent, un résumé de ce qu’elle a retenu de la description du poste et de l’esprit de la clinique. Cette mesure permet d’éviter les malentendus. Une fois tous les “résumés” reçus, je propose aux candidats sélectionnés un second entretien, pour aborder le salaire, la période d’essai, etc. »

Un candidat débutant motivé est préféré à un “super compétent”

En matière d’exigences, l’expérience du candidat ne semble pas être le premier critère de sélection. « Nous sommes surtout sensibles à sa volonté de s’intégrer dans l’équipe et de profiter de notre expérience. La sienne est secondaire », affirme Sylvain Abeille. « Je ne teste pas les compétences. J’attends juste que la personne soit correcte, assure la permanence de soins et fasse au mieux, quitte à référer en cas de difficultés », souligne Patrick Durand. « Au début, j’attendais avant tout que le confrère recruté soit autonome, car l’objectif était de me remplacer. Mais j’ai changé d’approche après avoir été confrontée plusieurs fois à des remplaçants qui avaient deux ou trois ans d’expérience et n’acceptaient aucune remarque. Désormais, je privilégie quelqu’un récemment diplômé, sérieux, et preneur de conseils et d’expérience. Tout compte fait, cela se passe mieux ainsi », remarque, pour sa part, Valérie Carré.

Côté salarié, Jacques Carreau témoigne avoir généralement été sélectionné avant tout pour sa disponibilité, puis d’après son CV et ses “prétentions”. En revanche, il affirme ne jamais avoir été soumis à un entretien préalable, ni à un quelconque test pratique ou théorique. Laurent Dapoigny, salarié à Draveil (Essonne), confirme n’avoir jamais eu à présenter son CV. Toutefois, selon lui, la situation vue par les employeurs devrait évoluer, car les étudiants font de moins en moins de pratique à l’école et sont, par ailleurs, de plus en plus exigeants en termes de salaire (notamment eu égard aux minima horaires fixés par la convention collective). Les recruteurs seront donc en droit d’être davantage sélectifs, en demandant par exemple un minimum de qualités et d’implication.

Certains candidats prennent la peine de s’initier aux habitudes de la structure

Les tests concernant les compétences pratiques et techniques du futur remplaçant ou collaborateur sont rarissimes. Toutefois, le vétérinaire employeur peut poser quelques questions théoriques, comme l’a expérimenté Gaëlle Thierry, salariée : « Généralement, les employeurs m’ont demandé de retracer mon parcours et m’ont interrogé sur mes éventuelles spécialités ou mes domaines de compétence particuliers. Certains m’ont posé des questions plus spécifiques, par exemple : “Comment gérez-vous un diabète acido-cétosique ?” ou “êtes-vous abonné à une revue vétérinaire, laquelle et pour quelles raisons ?”. » Toutefois, selon notre consœur, l’entretien est généralement assez informel et consiste, pour le candidat, à décrire ce qu’il a fait, ce qu’il sait et aime faire. D’après elle, les vétérinaires recherchent avant tout un assistant ou un remplaçant motivé et autonome. Par ailleurs, lorsqu’elle est retenue pour un poste, elle demande à passer, si possible, quelques heures dans la structure. « Je préfère prendre mes marques avant de commencer, connaître les protocoles habituels, le mode de fonctionnement, etc. »

Tous les salariés ne font pas preuve du même sérieux, comme le souligne Laurent Dapoigny : « Certains étudiants qui viennent pour effectuer des gardes se présentent à peine quelques minutes avant qu’elles commencent, voire en retard. Ils ne savent rien des habitudes de travail de la clinique et n’ont parfois jamais assisté à une journée de consultation au sein d’une structure privée. J’ai l’impression que le système repose sur la confiance et la motivation que l’on inspire ou non. Un remplaçant se voit confier du jour au lendemain les clés de la clinique, les animaux, la clientèle, etc., parfois uniquement à la suite d’un bref entretien téléphonique, voire parce qu’il a été recommandé par un étudiant qui travaille déjà sur place ! » A l’inverse, Christine Mendez del Villar a le sentiment que bon nombre de vétérinaires prennent des remplaçants sans trop regarder leur CV ni laisser de consignes précises sur ce qu’ils attendent, notamment en termes de responsabilité confiée. « Cela peut être déstabilisant pour un novice qui se retrouve seul dans la structure avec une responsabilité a priori totale. »

Le contrat, obligatoire, n’est pas toujours proposé, notamment pour des gardes

Pourtant, dans la pratique, c’est ainsi. Le système repose beaucoup sur la confiance. Le principe qui consiste à se renseigner sur le candidat en appelant ses précédents employeurs, par exemple, recueille des avis partagés. Notre confrère Olivier Tanghe n’y est pas favorable. « Peut-être est-ce naïf de ma part. Peut-être me tromperai-je un jour. Mais en me fiant aux échos des délégués des laboratoires, je parviens souvent à me faire une idée à peu près cohérente », estime-t-il. En revanche, certains utilisent cette technique en cas de doute sur un candidat, comme Valérie Carré, qui dit appeler souvent un ou deux anciens employeurs. Ces derniers répondent volontiers, sans diffamation ni langue de bois le plus souvent. Si des points négatifs sont soulevés, cela lui permet d’en tenir compte dans son approche de la future collaboration.

Une fois un candidat retenu, qu’en est-il de la rédaction du contrat, en principe obligatoire ? Sur le terrain, force est de constater qu’un contrat écrit n’est pas toujours proposé aux salariés, notamment pour des postes qui consistent uniquement à assurer des gardes. A l’inverse, « il m’est arrivé de me voir proposer un contrat à durée déterminée (CDD) pour une semaine ou deux de remplacement seulement, remarque Laurent Dapoigny. Une preuve que certains font les choses dans les règles ! ». Du point de vue des employeurs, les avis sont une nouvelle fois variés. « Au début, je réalisais des contrats de longue durée d’emblée, ce que j’ai regretté ensuite. Aujourd’hui, je propose d’abord un CDD de six mois, suivi d’un CDI. La première période laisse le temps aux gens de se révéler et permet de vérifier d’éventuelles incompatibilités majeures », explique Valérie Carré. En revanche, Olivier Tanghe souligne qu’il fait systématiquement signer un contrat assorti d’une période d’essai. Ses recherches correspondant à un besoin réel et urgent, la période d’essai a toutefois peu de risque d’être rompue, car ça ne peut pas ne pas marcher.

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