La grippe aviaire continue sa progression en Afrique - La Semaine Vétérinaire n° 1218 du 18/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1218 du 18/03/2006

Influenza aviaire. Virus H5N1 hautement pathogène

Actualité

Auteur(s) : Nathalie Devos

Le Cameroun est le quatrième pays africain touché par la maladie. Aider l’Afrique à lutter contre la grippe aviaire, c’est aussi protéger le reste de la planète.

Après le Nigeria, le Niger et l’Egypte en février dernier, le Cameroun a annoncé avoir lui aussi détecté la présence du virus H5N1 de l’influenza aviaire hautement pathogène sur son territoire, le 12 mars 2006. Il a été retrouvé dans trois élevages de canards domestiques à Maroua, dans l’extrême nord du pays, près de la frontière nigériane. L’enquête épidémiologique en cours permettra de déterminer si l’origine de la contamination est due à une importation d’oiseaux, à des achats sur le marché local ou à des oiseaux sauvages. A l’heure où nous mettons sous presse, la grippe aviaire est également suspectée en Ethiopie, au Gabon, en Sierra Leone et au Burkina Faso.

Si le rôle des oiseaux migrateurs fait débat, le printemps reste une période critique

Dans les quatre pays d’Afrique cités précédemment, le virus est identifié dans des élevages domestiques (l’importation de poussins contaminés en provenance de Chine est l’hypothèse avancée pour expliquer le premier foyer recensé au Nigeria). Mais aucun cas de contamination d’oiseaux sauvages n’est officiellement rapporté. En Afrique comme sur les autres continents, ces derniers font l’objet d’une surveillance à laquelle participe activement le Cirad(1). Depuis l’automne 2005, cette organisation effectue des prélèvements chez les oiseaux sauvages, notamment dans les régions du lac Tchad et dans la vallée du Rift, fréquentées par nombre de ces oiseaux, parmi lesquels figurent des migrateurs. Pour l’heure, les premiers résultats sur les quelque 8 000 à 9 000 prélèvements effectués n’ont pas mis en évidence le virus H5N1 de souche asiatique. En outre, aucune mortalité anormale n’est pour le moment signalée parmi ces volatiles. Ces derniers peuvent aussi se contaminer au contact d’élevages domestiques atteints.

Le rôle des oiseaux migrateurs dans la propagation de la maladie sur de longues distances fait l’objet d’un débat scientifique. Mais, selon le Cirad, il est maintenant prouvé que certaines espèces d’oiseaux sauvages, en particulier les canards, sont capables de survivre à l’infection et d’excréter le virus pendant suffisamment longtemps pour le transporter sur d’importants trajets.

Une situation dramatique pour l’Afrique, qui aura des répercussions sur les autres continents

Si les récents cas de grippe aviaire rapportés en Europe de l’Ouest ont pour origine des oiseaux sauvages contaminés qui ont “fui” les pays d’Europe orientale en raison de températures plus basses qu’à l’accoutumée, le rôle éventuel d’oiseaux migrateurs potentiellement contaminés en provenance d’Afrique durant le printemps n’est pas à écarter. Ces derniers débutent actuellement leur migration vers le nord de l’Europe (en Scandinavie et dans le nord-ouest de la Russie) pour leur période d’estive, cette migration devant se terminer en mai. Les premiers canards pilet, qui hivernent notamment au Niger, sont déjà observés en baie de Somme. Quoi qu’il en soit, le virus semble donc continuer inexorablement sa progression en Afrique. Une situation plus qu’alarmante. En effet, dans de nombreux pays du continent, les services vétérinaires, les infrastructures et le personnel nécessaires à la lutte contre la maladie sont insuffisants ou quasi inexistants, ce qui rend son contrôle pratiquement impossible. En outre, dans ces régions, les volailles représentent un revenu d’appoint pour des millions de petits propriétaires et une source majeure de protéines animales. Sans indemnisation, il est inévitable que des cas éventuels de grippe aviaire soient cachés. Par ailleurs, le contrôle de l’interdiction d’importations de volailles (potentiellement contaminées) dans les pays touchés se révèle difficile. Par exemple, le Nigeria partage une frontière commune de 1 800 km avec le Cameroun.

Un autre problème de taille concerne les contacts particulièrement rapprochés des personnes avec les volailles dans les élevages familiaux, une situation similaire à celle observée en Asie. Cela favorise le risque de transmission du virus à l’homme sur un continent où, qui plus est, le virus immunodépresseur du Sida, particulièrement présent, augmente la vulnérabilité des individus.

Et comme le martèlent les experts de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et de la Food and Agriculture Organisation (FAO) depuis que l’épizootie touche le Sud-Est asiatique (2003), plus le virus circule de façon endémique, plus la probabilité qu’il mute et se transmette facilement d’homme à homme est élevée, donc le risque d’une pandémie humaine réel.

1,9 milliard de dollars de dons pour lutter contre le H5N1 promis en janvier dernier

Le virus deviendra-t-il endémique en Afrique, à l’instar de ce qui se passe en Asie ? Finira-t-il par coloniser l’ensemble de la planète ? Nul ne peut le prédire. Mais si, dès fin 2003, le virus avait été correctement combattu à sa base, chez les volailles d’Asie du Sud-Est, la situation ne serait peut-être pas celle que nous connaissons. Pourtant, lors de la conférence de Pékin, en janvier dernier, des promesses de dons à hauteur de près de 1,9 milliard de dollars avaient été faites pour aider les pays touchés à faire face à la maladie. A ce jour, les aides ne sont toujours pas parvenues sur le terrain en Afrique, et l’Union européenne serait le plus mauvais élève. Les pays riches réitéreront-ils l’erreur commise en Asie ou comprendront-ils – enfin – que se “défiler” risque d’entraîner un effet boomerang ?

  • (1) Cirad : Centre de coopéation internationale en recherche agronomique pour le développement.

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