“LA COCOTTE”, UNE ADVERSAIRE VACHE COMME LA GRIPPE AVIAIRE - La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006

À la une

Auteur(s) : Nathalie Devos

Le contexte actuel de la grippe aviaire ne doit pas faire oublier d’autres menaces, dont la fièvre aphteuse. Des plans d’urgence existent et sont régulièrement testés. Quant aux formations spécifiques, force est de constater qu’elles sont souvent mises en place a posteriori.

L’Europe risque encore de voir apparaître des foyers occasionnels de fièvre aphteuse », avertit l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa). Le dernier foyer majeur constaté en Europe date de cinq ans, presque jour pour jour. La maladie avait alors touché le Royaume-Uni puis s’était répandue dans plusieurs Etats membres, dont la France, avant son éradication. Sa propagation avait entraîné une perte estimée à 12 milliards d’euros, doublée de graves conséquences sociales et économiques pour les communautés agricoles touchées.

Dans un avis sur le risque et les voies de réintroduction de la fièvre aphteuse au sein de l’Union(1), l’Efsa explique que le danger principal réside dans l’importation d’animaux vivants infectés, de viandes, de produits à base de viande et d’autres produits d’origine animale contenant le virus de la fièvre aphteuse. Son groupe scientifique sur la santé animale et le bien-être des animaux (AHAW) identifie les régions du monde dont les importations constituent une menace majeure (voir carte en page 32). Selon lui, il s’agit principalement de l’Asie du Sud et du Sud-Est, de la Chine et, dans une moindre mesure, de l’Afrique orientale et de la région du Sahel, sans oublier certains pays à l’est de l’Europe, notamment la Turquie (où un foyer a récemment été identifié dans l’Ouest).

L’Efsa souligne par ailleurs que l’émergence de la souche de fièvre aphteuse Asia 1, présente en Asie centrale et en Chine, est une préoccupation particulière qui est à prendre en compte pour adapter les programmes de contrôle déjà établis, dans le but de combattre de nouvelles souches.

1 à 5 % des voyageurs ramènent quelque 5 kg de produits potentiellement contaminés

« Si les contrôles stricts d’importation en place au sein de l’Union permettent de protéger les animaux des élevages européens, il est impossible de faire cesser, donc difficile de vérifier les importations illégales aux frontières de l’Europe. L’incitation au profit et la demande d’aliments ethniques et exotiques difficilement disponibles au sein de l’espace communautaire constituent des motivations supplémentaires d’importations illégales, qui augmentent la pression sur les mécanismes de contrôle », souligne le groupe AHAW. Par ailleurs, la multiplication des déplacements dans les zones endémiques accroît aussi le risque d’importations illégales de produits animaux susceptibles d’être contaminés. « Sur la base des saisies pratiquées aux postes frontaliers, entre 1 et 5 % des voyageurs introduiraient une moyenne de 5 kg de divers produits d’origine animale au sein de l’Union. Un grand nombre d’entre eux proviennent de zones où la fièvre aphteuse est endémique. » Lors de l’épisode de fièvre aphteuse enregistré outre-Manche en 2001, le foyer primaire, situé à Heddon on the Wall (au nord de l’Angleterre), a été imputé à l’incorporation par l’éleveur, dans l’alimentation des porcs, de restes de graisses animales insuffisamment cuites provenant d’une chaîne de restaurants asiatiques de Newcastle (les personnes travaillant dans ces établissements auraient voyagé auparavant). Le groupe AHAW émet des recommandations pour prévenir la récurrence de la maladie en Europe. Il suggère en particulier d’investir dans des approches de contrôle de la fièvre aphteuse à la source, dans les zones où elle est endémique. Cela comprend des programmes de contrôle régionaux, un partenariat de surveillance à l’échelle mondiale pour réduire le risque d’apparition de la maladie dans l’ensemble des régions et la promotion d’un commerce sûr des produits issus des animaux d’élevage. Le groupe AHAW considère qu’un tel dispositif pourrait permettre l’éradication de la fièvre aphteuse, « mais il pourrait s’agir là d’un engagement à long terme ».

La fièvre aphteuse, l’une des dix-sept maladies contagieuses dotées d’un plan d’urgence

En France, la fièvre aphteuse est l’une des dix-sept maladies réputées contagieuses dotées d’un plan d’urgence(2) en cas de suspicion et de confirmation (voir encadré ci-dessous). Ces plans sont préparés au niveau national et déclinés à l’échelon départemental. Ils font l’objet d’exercices de simulation(3) afin de les tester (voir article en page 31).

Le plan d’urgence français relatif à la fièvre aphteuse a été actualisé en 2003, à la suite de l’expérience acquise lors de l’épisode de 2001(4). Il comporte onze chapitres : les mesures à prendre lors de suspicion, l’enquête épidémiologique, le dispositif mis en place en cas de confirmation, l’abattage des animaux, la destruction des cadavres, les mesures de biosécurité, le repeuplement des foyers, les zones soumises à des mesures de restriction, la vaccination, le recouvrement du statut indemne et la justification de la fin de l’épizootie. Des entraînements sont en outre prévus cette année, précise la Direction générale de l’alimentation (DGAL). Deux sont des exercices de terrain réalisés au niveau départemental en Haute-Marne (en mars) et dans le Puy-de-Dôme (en octobre). Le troisième sera effectué à l’échelon régional dans l’Eure et le Calvados (en septembre).

Des réseaux d’alerte regroupant éleveurs, vétérinaires, DDSV, DGAL et laboratoires

Pour les maladies dotées d’un plan d’urgence comme la fièvre aphteuse, un réseau d’alerte permet le dépistage précoce. Il comprend les éleveurs, les vétérinaires sanitaires, les Directions des services vétérinaires (DSV), la DGAL, des groupes nationaux d’experts et les laboratoires de diagnostic (laboratoire agréé ou laboratoire national de référence) En cas de suspicion, un arrêté de mise sous surveillance de l’exploitation est pris. Cela permet de délimiter un périmètre interdit autour du foyer. Des enquêtes épidémiologiques sont ordonnées pour retrouver les animaux ou les produits animaux sortis de l’exploitation avant la suspicion et susceptibles d’être contaminés. Elles peuvent évidemment conduire à prendre de nouveaux arrêtés de déclaration d’infection pour les exploitations épidémiologiquement liées. La vaccination est aussi possible(2). Le ministre de l’Agriculture doit alors préalablement saisir la Commission européenne ou, en cas d’urgence, lui notifier sa décision de la mettre en œuvre. Il convient en outre, avant de la pratiquer, de recueillir l’avis du Comité consultatif de la santé et de la protection animales, sauf si le caractère urgent ne le permet pas. Les infractions aux dispositions établies dans les plans d’urgence sont sanctionnées par des amendes de 4e ou de 5e classe, soit 1 500 €.

Le rôle phare des vétérinaires dans l’application des plans d’urgence est évident. Trois confrères (Jean-Marie Gourreau, François Moutou et Joël Francaert) ont dispensé des formations “fièvre aphteuse” en 2001 et jusqu’en 2003, à destination des membres des DSV, des étudiants et au sein de l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’Agriculture (Infoma). Par la suite, un cédérom sur la maladie a été réalisé par l’Afssa, la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) et la DGAL, à l’usage des vétérinaires sanitaires. Mais si de telles initiatives sont à souligner, il est regrettable que la formation des vétérinaires de terrain vis-à-vis de certaines maladies ne soit organisée que lorsqu’elles sévissent déjà. La grippe aviaire actuelle en est une parfaite illustration.

  • (1) Avis du 16/2/2006 (www.efsa.eu.int/press_room/press_release/1358_fr.html).

  • (2) Décret n° 2006-180 du 17/2/2006 relatif aux plans d’urgence liés à certaines maladies réputées contagieuses.

  • (3) Des informations sur les exercices réalisés par les Etats membres sont disponibles à l’adresse www.oie.int/fr/info/fr_prepaurgence.htm

  • (4) Plan d’urgence contre la fièvre aphteuse, note de service de la DGAL du 10/3/2003.

  • Source : Le Point Vétérinaire n° 214, avril 2001.

Quelques rappels sur la maladie

La fièvre aphteuse touche les artiodactyles (ruminants et suidés). Sa période d’incubation varie de deux à huit jours, avec un maximum de quatorze jours. Elle se caractérise par de la fièvre, de l’abattement, de l’anorexie, l’apparition de vésicules buccales et podales et une chute de la production laitière. Les bovins boitent et salivent abondamment. Le taux de morbidité peut atteindre 100 % dans un foyer. En revanche, la mortalité est toujours faible, sauf chez les jeunes animaux qui meurent brutalement. Des boiteries chroniques, de l’infertilité, une chute définitive de la production laitière comptent parmi les séquelles.

N. D.

Maladies dotées d’un plan d’urgence

Dix-sept maladies réputées contagieuses (MRC) bénéficient d’un à plan d’urgence : la maladie de Newcastle, l’influenza aviaire, la fièvre aphteuse, les pestes porcine classique et africaine, la maladie vésiculeuse des suidés, la peste équine, la fièvre catarrhale du mouton, l’anémie infectieuse du saumon, la peste bovine, la peste des petits ruminants, la maladie hémorragique épizootique des cerfs, la clavelée et la variole caprine, la stomatite vésiculeuse, la dermatose nodulaire contagieuse et la fièvre de la vallée du Rift.

N. D.
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