L’alpha-casozépine est présentée comme un anxiolytique sans effet secondaire - La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1217 du 11/03/2006

Comportement. Un décapeptide lutte contre le stress des chiens et des chats

Actualité

Auteur(s) : Eric Vandaële

Un supplément nutritionnel d’un hydrolysat de caséine présente la même efficacité que les benzodiazépines.

L’alpha-casozépine est une substance qui présente des effets psychotropes ou neurotropes, mais qui ne doit surtout pas être considérée comme un médicament psychotrope. » Tel semble être le consensus auquel sont parvenus Michaël Messaoudi (médecin psychopharmacologue), Claude Béata (vétérinaire comportementaliste et président de l’association Zoopsy) et les promoteurs de cette molécule (Schering-Plough en France dans le domaine vétérinaire).

Dans la catégorie des suppléments nutritionnels (sans AMM), Schering-Plough a ainsi présenté, le 28 février dernier à Paris, à des praticiens pour la plupart formés à la pathologie du comportement, la déclinaison vétérinaire de l’alpha-casozépine : les gélules Zylkène® dosées à 75 et 225 mg de cette molécule.

L’alpha-casozépine est un décapeptide « 100 % naturel » puisqu’il dérive de l’hydrolyse trypsique de la caséine αS1. C’est pourquoi il est commercialisé sous le statut de « supplément nutritionnel » chez l’homme depuis quelques années, et, désormais, chez les chiens et les chats. Contrairement à d’autres compléments d’origine naturelle, la formulation de la substance chimique, comme décapeptide dérivé de la caséine du lait, est parfaitement connue et dosée par chromatographie liquide à haute performance (l’aminogramme est le suivant : Tyr-Leu-Gly-Tyr-Leu-Glu-Gln-Leu-Leu-Arg).

Une efficacité similaire au diazépam sans les effets secondaires

Face à ce type de produit naturel, la première interrogation concerne son efficacité. Est-elle réelle ou s’agit-il d’un effet placebo ? Indéniablement, les résultats des essais chez des animaux de laboratoire (rats principalement), présentés par Michaël Messaoudi, ne laissent pas de place au doute. Dans des modèles expérimentaux validés de reproduction expérimentale de stress, cet hydrolysat de caséine, à raison de 15 mg/kg par voie orale, présente chez le rat un effet anxiolytique équivalent à celui de diazépam (Valium®) dosé à 3  mg/kg per os.

Si ce décapeptide possède une efficacité identique à celle des benzodiazépines, présente-t-il alors les mêmes effets indésirables collatéraux ? Pas du tout. Là aussi, les résultats chez des animaux de laboratoire et les études précliniques chez l’homme ne font apparaître aucun effet indésirable. Contrairement au diazépam et à de nombreux psychotropes, cet hydrolysat de caséine ne présente ni effet d’accoutumance (nécessitant d’augmenter les doses), ni de dépendance (nécessitant un sevrage progressif), ni de somnolence (l’activité comportementale est normale), ni de désinhibition (pas d’effet néfaste sur le comportement), ni de myorelaxation, ni d’amnésie rétrograde. D’une manière générale, le profil toxicologique est, sans surprise, globalement favorable, y compris en toxicité subchronique ou sur la fonction de reproduction à raison de 150 ou 600 mg/kg (soit des doses environ dix à quarante fois supérieures aux posologies thérapeutiques vétérinaires). Chez l’homme, des volontaires (sains) ont ingéré des doses de 800 mg/kg/j sans effet indésirable, alors que la dose thérapeutique est de 3 mg/kg.

L’absence d’effets collatéraux constitue évidemment un atout pour la prescription en première intention de cet anxiolytique, alors que les vétérinaires hésitent souvent à avoir recours aux médicaments psychotropes dans la crainte d’effets indésirables tels que somnolence, désinhibition chez un animal agressif, etc.

Chez le chien et le chat, le traitement concerne surtout l’anxiété ou le stress chronique

Le mode d’action de ce décapeptide n’est pas encore vraiment élucidé. Il est certain qu’il présente une affinité partielle pour les récepteurs Gaba. Pour Claude Béata, qui emploie et développe ce produit depuis six ans dans sa clientèle, son action chez les chiens et les chats s’apparente davantage à un effet sérotoninergique que gabaergique. De même, la pharmacocinétique reste à explorer dans le détail, notamment pour expliquer le passage de la barrière hématoméningée. Cette dernière deviendrait « perméable à la molécule active lors de stress », avance Michaël Messaoudi.

Néanmoins, chez le rat, le décapeptide agit en environ une heure. Une relation effet-dose est établie. Chez l’homme, le chien et le chat, les traitements concernent surtout des troubles anxieux ou de stress chronique, en cures d’un ou deux mois. Toutefois, selon Claude Béata, ce produit peut être essayé en vue de prévenir les effets de stress aigus (feux d’artifice, transport en voiture, orages, etc.) par l’administration d’une dose double la veille ou quelques heures avant le stress prévisible.

Chez les chiens et les chats anxieux, notre confrère a suivi de nombreux essais cliniques, dont certains contre placebo et en double aveugle (voir tableau). « Il est important de ne pas sous-doser », souligne-t-il. La dose préconisée va de 15 à 20 mg/kg/j. Chez le chien, « la dose de 7 mg/kg/j n’est pas plus efficace que le placebo ». En revanche, à 20 mg/kg/j, les essais montrent un effet clinique statistiquement significatif par rapport à l’administration d’un placebo sur les divers signes du stress et de l’anxiété canine : le comportement alimentaire, le sommeil, les mictions, le léchage et les téréotypies, l’exploration, les états agressifs, l’attachement. L’action, rapide, est observée en environ sept jours et durable dans les essais sur vingt-huit jours. Les essais contre placebo ont été réalisés en deux prises quotidiennes, mais « notre expérience montre qu’il n’y a pas de différence avec l’administration en une seule prise ».

Schering-Plough présente Zylkène® en flacons de trente gélules dosées à 75 mg ou 225 mg. Le coût du traitement journalier d’un chat ou d’un chien de 5 kg revient aux alentours de 0,5 € TTC (prix public) et celui d’un chien de 15 kg à 1 €. Pour le laboratoire, Zylkène® est un produit « antistress » de première intention, efficace et sans risque, à prescrire avant d’envisager le recours à un médicament psychotrope.

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