La forme subclinique de l'anémie infectieuse du poulet complique le diagnostic différentiel - La Semaine Vétérinaire n° 1216 du 04/03/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1216 du 04/03/2006

Pathologie aviaire

Formation continue

FILIÈRES

Auteur(s) : Karim Adjou

L'absence de symptômes caractéristiques de cette forme peut conduire à confondre cette affection avec la maladie de Marek, celle de Gumboro, les adénoviroses ou certaines intoxications rares.

L'anémie infectieuse aviaire est une maladie virale immunodépressive particulièrement répandue dans le monde, qui affecte l'espèce Gallus. Elle se caractérise par une anémie aplasique et une atrophie lymphoïde généralisée. Elle entraîne des pertes économiques non négligeables par les retards de croissance et les mortalités qu'elle engendre, d'où l'importance de bien la connaître.

L'anémie infectieuse aviaire est causée par un circovirus, virus nu à ADN, de 19 à 24 nm de diamètre. Il a été mis en évidence pour la première fois au Japon en 1979. Les connaissances actuelles montrent qu'il existe un seul sérotype, qui n'affecte que l'espèce Gallus (poussins en filières ponte et chair). La réplication s'effectue dans le noyau des cellules hématopoïétiques.

Le virus est particulièrement résistant dans le milieu extérieur. Il survit à une température de 56 °C pendant une heure. Toutefois, une chaleur de 100 °C pendant quinze minutes le détruit complètement. Il est également sensible au formol.

La sensibilité à la maladie est élevée vers l'âge de deux à trois semaines

La contamination se fait le plus souvent par voie verticale. Elle survient une à six semaines après l'infection des reproducteurs. Le taux de transmission verticale au poussin via l'œuf peut atteindre 7 %. Il faut compter entre trois et six semaines pour que l'ensemble de l'élevage soit contaminé. La vaccination des reproducteurs évite ce type de contamination et diminue la période critique pour la descendance, car les anticorps maternels protègent les jeunes poussins.

La transmission horizontale est possible, mais peu fréquente. Elle s'effectue d'un animal à un autre, probablement par voies respiratoire et orale à la suite d'une ingestion d'aliment, d'eau, via la litière contaminée ou par le biais du matériel d'élevage. Cette contamination est la conséquence d'une forte pression virale.

La forme aiguë est connue sous le nom de « maladie des ailes bleues »

La sensibilité à la maladie est élevée vers l'âge de deux à trois semaines. L'incidence et la gravité de l'anémie infectieuse dépendent de la présence d'anticorps maternels, de la maturation immunologique, de la virulence du sérotype et de la race de poulet.

L'anémie infectieuse du poulet peut se rencontrer sous deux formes. La première, dite aiguë, est connue sous le nom de “maladie des ailes bleues” (voir photo 1). Elle est caractérisée par de la dermatite gangreneuse, des hémorragies sous-cutanées, de l'anémie et de la prostration, avec une mortalité élevée pouvant parfois aller jusqu'à 60 %.

La forme subclinique, beaucoup plus répandue, se traduit par une atteinte de l'état général, des retards de croissance et une immunodépression entraînant l'apparition d'affections secondaires cliniquement variées comme les réoviroses, la maladie de Marek, la maladie de Gumboro et les maladies respiratoires chroniques. Le diagnostic de cette forme inapparente est assuré par des techniques sérologiques (Elisa). Les sujets qui survivent peuvent se rétablir complètement.

Anomalies hématologiques et atrophie lymphoïde sont des signes évocateurs

Le signe clinique spécifique de cette affection est l'anémie, qui atteint son pic au 14e jour postinfection. A ce stade, la valeur de l'hématocrite diminue considérablement, pour se situer entre 6 et 27 %. Par ailleurs, des formes immatures d'érythrocytes, de leucocytes, de granulocytes et de thrombocytes sont observées dans le sang périphérique. Ces anomalies semblent provenir des effets toxiques du circovirus sur les cellules souches hématopoïétiques de la moelle osseuse.

L'examen histologique des organes lymphoïdes révèle une atrophie lymphoïde, avec parfois des lésions de nécrose généralisée et la présence de cellules avec des corps d'inclusions intranucléaires éosinophiles dans différents organes (thymus, rate, pancréas, rein, bourse de Fabricius, etc.). Leur nature reste inconnue à ce jour. Lors d'anémie sévère, la moelle osseuse du fémur devient pâle, voire jaunâtre en raison d'une accumulation importante de cellules adipeuses (voir photo 2).

Dans la bourse de Fabricius et la rate, les lésions d'atrophie folliculaire ou de la pulpe, avec des foyers de nécrose et de prolifération de cellules réticulaires, sont fréquentes. Une hypertrophie des hépatocytes et une dilatation des sinusoïdes hépatiques sont également rapportées.

Une diminution considérable du nombre de cellules lymphoïdes appartenant aux lignées de types B et T est également constatée.

La sérologie et la culture virale permettent de confirmer le diagnostic

La technique Elisa, la séroneutralisation et l'immunofluorescence indirecte sont utilisées pour la détection d'anticorps dans les troupeaux. Le diagnostic peut être confirmé par l'isolement et l'identification du virus à partir d'un prélèvement de foie ou de sang. Le virus se cultive sur des lignées cellulaires lymphoblastoïdes établies à partir de lymphomes issus de volailles atteintes de la maladie de Marek (MDCC-MSB1) et produit des inclusions intranucléaires.

D'autres techniques de dépistage commencent à apparaître, comme l'hybridation in situ, l'amplification génique (PCR) ou, plus récemment, un test moléculaire PCR-Elisa développé par une équipe de chercheurs canadiens. Hautement sensible et spécifique, il permet de détecter le virus persistant, même à très faibles concentrations. Ce nouvel outil pourra être utilisé pour la détection du virus chez les poussins malades, mais aussi chez les reproducteurs, afin d'éliminer son transfert de la poule au poussin via les œufs.

En général, l'anémie, les anomalies hématologiques et l'atrophie lymphoïde avec aplasie de la moelle osseuse sont des signes évocateurs de l'anémie infectieuse du poulet. Néanmoins, l'absence de symptômes caractéristiques lors de la forme subclinique peut conduire à la confondre avec d'autres affections aviaires incluant la maladie de Marek, celle de Gumboro, les adénoviroses et certaines intoxications rares (par exemple sulfonamides, mycotoxines, etc.). Toutefois, ces affections entraînent une déplétion lymphoïde, une atrophie de la bourse ou du thymus, mais rarement une anémie.

Vacciner les reproducteurs vers l'âge de quatorze à dix-huit semaines

Il n'existe aucun traitement spécifique pour l'anémie infectieuse. Cependant, une couverture à base d'antibiotiques à large spectre peut se révéler nécessaire pour empêcher la propagation d'autres infections secondaires.

La prévention de la maladie passe d'abord par les mesures sanitaires (hygiène, désinfection, vide sanitaire) et le contrôle du statut immunitaire des reproducteurs. La prévention médicale est fondée sur la vaccination des reproducteurs. Elle s'effectue vers l'âge de quatorze à dix-huit semaines avec un vaccin vivant préparé soit sur un œuf embryonné, soit sur une culture cellulaire. En général, une seule vaccination avant la ponte suffit pour assurer un transfert constant des anticorps maternels.

Vacciner les reproducteurs contre l'anémie infectieuse aviaire n'est pas un luxe au regard des risques de contamination verticale et des conséquences économiques liées à cette maladie en élevage de poulets. D'où la nécessité de bien contrôler l'efficacité de la vaccination et de réaliser des suivis sérologiques réguliers pour briser la chaîne de transmission du virus.

A l'autopsie, les lésions sont spécifiques

L'autopsie des poussins atteints par l'anémie infectieuse révèle plusieurs spécificités :

- le sang est plus ou moins liquide et le plasma est pâle. L'hématocrite est inférieur à 27 % (le taux normal est de 35 %) ;

- des hémorragies ponctiformes ou en plaques, sous-cutanées ou intramusculaires, siègent principalement au niveau du bréchet, des cuisses et du myocarde ;

- une atrophie de la bourse de Fabricius et du thymus est observée ;

- la moelle osseuse du fémur perd sa couleur rouge et s'infiltre de gras qui donne l'aspect jaune pâle ;

- le foie est hypertrophié, de couleur jaunâtre et friable ;

- des néphrites sont parfois notées ;

- une dermatite apparaît en cas de complications bactériennes ou virales (maladie des ailes bleues).

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr