Exercer en association, est-ce que cela constitue l’enfer ou le paradis ?

Toutes les associations ne sont pas idylliques

Je suis aujourd’hui à la retraite et j’ai exercé seul ou en association. Contre la loi du silence, j’aimerais que mon témoignage soit constructif et puisse orienter les jeunes confrères.

Je regrette qu’aucune formation ne nous soit dispensée sur les différentes formes juridiques des sociétés. Cela serait très utile au moment de la création d’une association. Nous ne sommes pas formés non plus à la gestion des conflits, alors qu’il existe pourtant des cellules ad hoc, avec conciliateurs et médiateurs, dans chaque entreprise. Or toutes les associations ne sont pas idylliques. Elles offrent de nombreux avantages dont le principal est de pouvoir décompresser en faisant confiance à ses associés, ainsi qu’une qualité de vie exceptionnelle. Elles permettent également de progresser à plusieurs, en chirurgie ostéo-articulaire, par exemple.

En fin de carrière, je me suis retrouvé seul, avec 365 jours de garde par an, ce qui n’est pas évident. Je regrette que chacun soit parti de son côté. Cela nous a tous conduits à faire d’énormes efforts personnels. J’ai ainsi dû réinvestir en construisant une clinique neuve. Une association regroupe le plus souvent tout un éventail d’âges. Les objectifs professionnels et les ambitions diffèrent à trente et à cinquante ans. C’est là le problème fondamental. Ces divergences d’intérêt, associées à des petits conflits de personnes, peuvent facilement conduire à un échec, ce qui fut malheureusement mon cas.

Contribuer ensemble à sauver un animal, grâce à nos diverses compétences, est un vrai plaisir

Travailler en équipe est pour moi la seule façon d’exercer mon métier. Discuter des différents cas rencontrés et pouvoir bénéficier des compétences de chacun, élargir mes connaissances et continuer à me former, ne pas me sentir seule face à des clients de plus en plus exigeants et parfois difficiles, répartir les tâches, notamment administratives, et gérer le quotidien, ou encore jouir de moments de loisirs sont les bénéfices de l’association. Un peu théorique pensez-vous ? En pratique, les caractères les plus trempés s’affrontent parfois et les discussions sont animées, mais au moins chacun peut donner son avis et tempérer l’autre. Parfois, la charge de travail semble mal répartie. En fait, se rendre compte du travail des autres est difficile. Les petites habitudes de mes associés m’agacent un peu parce que moi, bien entendu, je n’en ai aucune…

Toutefois, ce n’est rien à côté du plaisir d’avoir contribué tous ensemble, grâce à nos diverses compétences, à sauver la vie d’un animal. Se faire mutuellement confiance et avoir une vision commune de la façon d’exercer notre métier est aussi très important. Alors, entourée de mes quatre associés depuis bientôt trois ans, sans oublier nos auxiliaires, c’est presque le paradis.

Etre associé me permet de voir grandir mes enfants

Exercer en association me semble aujourd’hui indispensable. Cela offre un partage du travail qui laisse à chacun du temps pour ses loisirs et sa vie familiale, des pans importants de la vie de la nouvelle génération que je représente.

Même si j’exerce ce métier avec la plus grande passion, j’ai envie de voir mes enfants grandir et je ne souhaite pas consacrer ma vie entière à mes patients à quatre pattes.

Avec les gardes, les clients irrespectueux qui se présentent à la fermeture pour une “urgence” de plusieurs jours ou ceux qui exigent d’être reçus immédiatement, notre travail devient vite synonyme d’esclavage. L’association divise cette charge et la disponibilité tant souhaitée par nos clients est respectée, elle permet aussi de répartir les frais et le travail administratif. Les investissements matériels sont grandement facilités, les cas complexes sont affrontés à plusieurs. Nous sommes pour la plupart généralistes et avons des limites : comment se spécialiser en passant vingt-quatre heures sur vingt-quatre dans la structure ?

Cependant, l’association peut vite virer au cauchemar, essentiellement pour des raisons financières. En effet, il est difficile de diviser le bénéfice en parts égales si l’un des associés travaille beaucoup moins pour diverses raisons.

Mais, puisque les exigences d’horaires et de performances sont de plus en plus importantes, l’association et les spécialisations m’apparaissent comme une voie inéluctable. Les clés de la réussite d’une bonne entente résident alors dans deux principes simples : la communication et le respect de ses associés.