L’homme est le premier prédateur des grands singes d’Afrique et d’Asie

L’alerte est donnée depuis un certain temps déjà, mais la situation empire pour les grands singes (gorilles, chimpanzés, bonobos en Afrique ; orangs-outans à Bornéo et Sumatra).

Les massifs forestiers où ils vivent sont réduits, dégradés, à la fois par les communautés villageoises et par les entrepreneurs. En Afrique, les besoins des premières se traduisent par l’accroissement exponentiel, aux dépens de la forêt, des cultures, des pâturages et des extractions diverses (bois de chauffe, charbon de bois, fruits, champignons, plantes, notamment médicinales). Les compagnies forestières défrichent les parcelles qui leur sont allouées et, pour y accéder, tracent des routes et des pistes. Ce sont autant d’espaces retirés à la faune sauvage. Les populations de grands singes peuvent donc de moins en moins se renouveler et s’isolent les unes des autres. L’impossibilité d’échanger les gènes occasionne une perte de vigueur, qui peut à terme se révéler létale.

Les grands singes sont victimes du commerce illégal de la viande de brousse

Beaucoup de compagnies forestières sont également impliquées dans l’abattage de la faune pour la viande de brousse. Elles ajoutent leur part à celle, prépondérante, des filières de trafiquants qui fournissent les villes en viande sauvage. Ce commerce illégal éliminerait au moins 5 % des effectifs des gorilles tous les ans et de 5 à 7 % des chimpanzés au Congo. Parallèlement, tous ces primates continuent à être tués à destination de la médecine africaine traditionnelle, et pour les pratiques de magie (surtout les bonobos). Les maladies déciment également les effectifs des grands singes. Elles peuvent être transmises par l’homme, notamment à l’occasion des activités d’écotourisme, ou bien provenir d’autres animaux. Le virus Ebola est en première ligne. Il a largement réduit les populations du bassin du Congo entre 2000 et 2003. Dans le sanctuaire de Lossi (Congo), il a causé la mort de 56 % des gorilles et 89 % des chimpanzés durant cette période. En outre, les troubles politiques et ethniques, les guerres, ne laissent pas beaucoup de chances à la faune en général et aux grands singes en particulier.

En Indonésie, les crânes d’orangs-outans sont vendus 70 dollars

Le grand singe asiatique, l’orang-outan, n’est pas mieux loti que ses cousins africains. Le commerce illégal de viande de brousse opère aussi ses ravages. Un marché parallèle s’est développé depuis les années 1980, celui des crânes d’orangs-outans, comme trophées. Un grand nombre d’animaux sont également tués par les agriculteurs, en représailles de leurs ponctions sur les récoltes. D’autres animaux sont abattus pour leurs organes, utilisés en médecine traditionnelle, pratiquée dans tous les pays d’Asie, et particulièrement en Chine.

Les forêts qui hébergent l’orang-outan disparaissent rapidement sous la poussée de l’exploitation du bois, des cultures de riz, de canne à sucre, des plantations de palmiers à huile. Au vu de toutes ces pressions, le bilan démographique ne peut qu’être défavorable. Les primatologues estiment que la majeure partie des populations d’orangs-outans disparaîtra d’ici à moins de vingt ans si des efforts réels de conservation ne sont pas mis en œuvre.