Un tiers de l’arsenal essentiel aux chevaux est indisponible - La Semaine Vétérinaire n° 1209 du 14/01/2006
La Semaine Vétérinaire n° 1209 du 14/01/2006

Pharmacie équine. Bruxelles liste 71 substances indispensables aux équidés

Actualité

Auteur(s) : Éric Vandaële

Un projet de règlement européen propose une longue liste de substances jugées indispensables au traitement des équidés. L’expérience y remplace la connaissance.

Fin décembre 2005, après plus d’un an de discussion, la Commission européenne diffuse, pour consultation publique jusqu’au 17 février prochain, le projet d’une liste de soixante et onze substances jugées « essentielles » au traitement des équidés(1), même s’ils ne sont pas exclus de la consommation humaine. Aucun de ces médicaments indispensables ne doit avoir de limite maximale de résidus (LMR) fixée dans une denrée issue d’une espèce animale quelconque. En effet, toutes les substances qui bénéficient d’une LMR, dans n’importe quelles denrée et espèce animale, peuvent déjà être utilisées chez les chevaux, en appliquant, dans le cadre de la cascade, un temps d’attente minimal de vingt-huit jours. Avec cette liste, l’objectif n’est donc pas d’autoriser des substances dont l’emploi n’a jamais été interdit chez les équidés…

L’extrapolation des LMR est reconnue à toutes les productions animales

Par exemple, la gentamicine possède des LMR fixées seulement chez les bovins et les porcs, les solutions injectables ne sont donc pas indiquées chez les chevaux. Néanmoins, l’administration de ces formulations est déjà autorisée chez les équidés, y compris pour ceux destinés à la consommation humaine. La gentamicine ne fait donc pas partie de la liste des substances essentielles sans LMR que la Commission européenne projette d’autoriser aux équidés. Non pas que la gentamicine ne soit pas requise lors de certaines infections, mais elle n’a jamais été interdite d’emploi chez les équidés en cas de nécessité.

La liste des soixante et onze substances essentielles aujourd’hui interdites en productions animales faute de LMR comprend donc une cinquantaine de médicaments humains et une vingtaine de médicaments vétérinaires destinés aux chiens ou aux chats, voire aux chevaux de sport exclus de la consommation humaine… Elle a été examinée plusieurs fois par les experts de l’Agence européenne du médicament et, une fois définitive, sera directement applicable en France, sans nécessiter une retranscription en droit national.

Pour la première fois, ce projet de règlement met donc fin au principe qu’un animal destiné à long terme à l’abattage ne peut jamais être traité par un médicament « interdit en productions animales par absence de LMR ». Le temps d’attente minimal à respecter (six mois) est long. Les traitements, sous la responsabilité du vétérinaire, devraient aussi être enregistrés sur le livret d’identification distribué par les Haras nationaux.

L’importation en “cascade” est inadaptée pour combler les “trous”

Cet arsenal thérapeutique « essentiel » met aussi en lumière les “trous” et les vrais problèmes de disponibilité en France. Sur les soixante et onze substances, sept (10 %) ne sont pas ou plus commercialisées dans l’Hexagone. Et pour la plupart, la procédure d’importation “en cascade” n’est pas applicable, car elle nécessite de connaître à l’avance les détenteurs des animaux. Il s’agit, par exemple, de médicaments destinés à la réanimation des chevaux lors d’anesthésie (et de problème anesthésique) ou de ceux qui permettent une palpation rectale diagnostique sans risque de déchirure. Il conviendrait évidemment de permettre aux vétérinaires d’importer ce type de médicaments autorisés en Europe, sans qu’ils aient à préciser le nom du propriétaire des animaux qu’ils auront à traiter ou à opérer en urgence… Ce que la réglementation française actuelle ne permet pas.

Sur les soixante-quatre substances restantes, treize (20 %) – dont trois antibiotiques – sont réservées à l’usage hospitalier ou à une prescription hospitalière restreinte. La position du ministère français de la Santé, qui refuse toujours l’accès des vétérinaires équins aux médicaments pourtant jugés “essentiels” à leur médecine en Europe, s’en trouve fragilisée. Les fonctionnaires de ce ministère ne sont, semble-t-il, ni vraiment de bons cavaliers, ni confrontés aux mêmes difficultés que les praticiens… La liste des médicaments hospitaliers qui pourraient être accessibles aux confrères est toujours bloquée par cette administration, alors que l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) l’a approuvée depuis plus de deux ans.

Des médicaments vétérinaires interdits sans LMR deviennent autorisés aux équidés

La liste européenne concerne aussi une vingtaine de médicaments vétérinaires, interdits en productions animales et qui deviendraient autorisés chez les équidés. Il s’agit notamment de l’acépromazine, de la griséofulvine, du métoclopramide et d’anesthésiques jusque-là réservés aux chiens et aux chats, le propofol ou l’association tilétamine-zolazépam. En outre, la guaïfénésine (Myolaxin®), un myorelaxant spécifiquement équin, jusque-là interdit aux équidés non exclus de l’abattage, devrait pouvoir être utilisée chez tous les chevaux (avec un temps d’attente de six mois).

La notice d’emploi de ces médicaments devra probablement être revue pour éviter de rendre schizophrènes les praticiens et leurs clients, car aujourd’hui cette notice les interdit faute de LMR et demain l’Union européenne les autorisera.

Pour chaque substance essentielle, des indications et des justifications sont mentionnées dans le futur règlement, mais sans aucune posologie. Pour la plupart, les justifications ne sont étayées que par « la plus large expérience clinique », ou « le traitement habituel de choix » ou encore « le traitement de recours ». A l’évidence, l’expérience clinique des praticiens équins est acceptée pour remplacer le manque d’études cliniques et de données démonstratives.

  • (1) Le projet de règlement européen, avec la liste des soixante et onze substances, est téléchargeable sur le site planete-vet.com, rubrique “actualités”.

    Pendant la période de consultation publique, qui s’achèvera le 17 février 2006, les observations peuvent être retournées à la Commission, par mail de préférence, à l’adresse Karin.Krauss@cec.eu.int

Quels médicaments pour quels équidés ?

Les substances sans LMR sont normalement interdites d’emploi chez les animaux destinés à produire des denrées alimentaires, y compris les équidés. Mais la refonte de la réglementation communautaire du 30 avril 2004 a prévu pour ces derniers de distinguer deux cas.

• Cas 1 : les équidés sont formellement exclus de l’abattage (et identifiés ainsi sur leur livret d’identification). Ils sont considérés comme des animaux de compagnie, par exemple les chiens ou les chats. Ils peuvent être traités par toutes les substances médicamenteuses avec ou sans LMR (article 10, point 2, de la directive 2001/82).

• Cas 2 : les équidés non exclus de l’abattage peuvent être consommés. Ils bénéficient alors de l’arsenal thérapeutique suivant :

- toutes les substances bénéficiant d’une LMR (quelles que soient la denrée et les espèces dans lesquelles elle est fixée) ;

- les substances sans LMR qui sont dites « essentielles » au traitement des équidés (article 10, point 3). C’est la liste de ces 71 substances qui est diffusée aujourd’hui par la Commission européenne. Le temps d’attente avant l’abattage est alors de six mois. Ce projet pourra être revu, selon une procédure simplifiée, à la demande d’un Etat membre et non d’un industriel ou d’un lobby.

E. V.

Le cas de la chondroïtine

L’Agence européenne du médicament et la Commission ont curieusement accepté que la chondroïtine fasse partie des médicaments essentiels aux équidés. Jusqu’à présent, la chondroïtine était plutôt prise comme un composant « actif » des suppléments nutritionnels (sans autorisation de mise sur le marché). La considérer comme un médicament reviendrait alors à exiger le dépôt d’un dossier d’AMM pour ces produits. Cela conduirait non pas à leur reconnaissance officielle, mais probablement à leur disparition. L’effet serait donc contraire à celui recherché par cette inscription.

E. V.
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