L’homme malmène la biodiversité animale depuis près de 50 000 ans - La Semaine Vétérinaire n° 1207 du 24/12/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1207 du 24/12/2005

Menaces sur la faune

Formation continue

FAUNE SAUVAGE

Auteur(s) : Alain Zecchini

Les grands mammifères sont plus exposés à l’influence humaine.

La responsabilité de l’espèce humaine dans le déclin de nombreuses familles animales sauvages ne se réduit pas à l’époque contemporaine. Elle pourrait dater des premiers temps de l’expansion d’Homo sapiens sapiens, il y a 100 000 ans, mais elle est plus sûrement estimée à partir de 50 000 ans, lorsque la colonisation de l’Australie a commencé. Il y a 12 000 ans, la faune a été malmenée dans le Nouveau monde, puis sur des milliers d’îles océaniques.

L’homme ne serait pas le seul en cause ; l’effet néfaste des changements climatiques est une autre hypothèse possible. Lequel des deux facteurs a-t-il eu le plus d’impact sur la faune ? Aucune synchronie n’a été observée entre plusieurs vagues d’extinction et les modifications climatiques, à travers les continents. Ainsi, l’Amérique du Sud a subi des bouleversements du climat plus tôt que l’Amérique du Nord, à l’époque postglaciaire. Pourtant, les extinctions d’espèces s’y sont produites plus tardivement qu’au nord du continent.

L’extinction rapide de certaines espèces est toujours précédée par l’arrivée de l’homme

Une majorité de scientifiques reconnaissent aujourd’hui l’implication des hommes dans la disparition massive d’espèces et de familles animales au Quaternaire. En effet, les études menées révèlent que les vagues rapides d’extinction sont toujours précédées par l’arrivée de l’espèce humaine, sur tous les continents, à l’exception de l’Afrique et de l’Eurasie d’où les hommes sont partis (elles sont alors graduelles). Cette élimination de la faune est reliée à l’expansion des populations humaines, directement ou non. L’hypothèse principale invoque le “surabattage” par la chasse d’espèces alors dénuées d’appréhension naturelle envers l’homme, animal inconnu d’elles. D’autres concernent notamment la détérioration de l’habitat par des feux allumés à grande échelle pour les défrichements, l’introduction d’espèces invasives qui suppriment les espèces natives, ou encore la propagation de maladies infectieuses.

En Australie, il a fallu s’adapter à une nourriture moins nutritive

En Australie, la plupart des grands animaux ont disparu entre 50 000 et 45 000 ans, soit peu de temps après le début de la colonisation humaine. Soixante taxons ont été concernés, principalement des brouteurs, ce qui suppose que les changements intervenus dans les écosystèmes ont été à la fois importants et sélectifs. Pour les déterminer, des chercheurs ont analysé des fossiles d’œufs d’oiseaux et de dents de marsupial(1). Ils ont recherché des isotopes de carbone de la végétation ingérée par les animaux, qui se fixent dans les organes. Il apparaît qu’avant 50 000 ans, la nourriture de ces espèces était plus riche et plus diversifiée qu’après. Un oiseau inféodé à son alimentation, Genyornis, n’aurait pu s’adapter et a disparu. L’émeu et les wombats, eux, ont survécu en s’habituant à une alimentation moins nutritive. Les changements climatiques n’ont pu, à eux seuls, transformer à ce point la végétation. Les chercheurs imputent donc cette responsabilité aux incendies allumés par les humains. Ceux-ci ont conduit à l’apparition d’un nouveau type de végétation, qui perdure de nos jours, composé de prairies adaptées aux feux et de déserts buissonnants. Parallèlement, la chasse a probablement accentué le phénomène. Elle était facilitée par l’absence de défenses naturelles des principaux animaux ciblés (qui ont bel et bien été éliminés), les oiseaux géants inaptes au vol et les marsupiaux géants.

De nos jours, à l’échelle de la planète, les grandes espèces sont aussi les plus menacées. L’influence des facteurs de risque, associée à la biologie, à l’éthologie et à l’écologie de ces mammifères, a été étudiée(2). Il apparaît qu’une séparation nette s’établit entre les animaux, selon qu’ils pèsent plus ou moins de 3 kg. Les premiers sont davantage exposés à l’influence humaine. La survie des seconds dépend plus de facteurs environnementaux.

La conservation des petits mammifères dépend du maintien de leur habitat

Ces résultats impliquent que la conservation des petits mammifères doit surtout s’attacher à préserver leur habitat, tandis que celle des grands est multi-factorielle.

Le maintien de l’habitat est effectivement une question cruciale. Les espaces où vivent les mammifères se réduisent sous la poussée des défrichements et des implantations de toutes sortes. Ces phénomènes sont davantage prononcés dans les pays en développement, qui n’ont pas toujours, loin s’en faut, les ressources et la volonté adéquates pour mettre en œuvre des programmes de conservation durables.

Une analyse récente s’est attachée à évaluer la surface nécessaire, sur tous les continents, pour préserver au moins 10 % de l’habitat de chacune des 4 795 espèces de mammifères terrestres. Elle serait de 17 millions de kilomètres carrés(3). Cet objectif paraît difficile à atteindre, compte tenu du contexte démographique humain. D’autant que 80 % de cet espace est déjà dédié, peu ou prou, à l’agriculture. A l’évidence, la perpétuation des espèces animales sauvages suppose maintenant de faire des choix essentiels.

  • (1) G. Miller et coll. : « Ecosystem collapse in pleistocene Australia and a human role in megafaunal extinction », Science, 8/7/2005.

  • (2) M. Cardillo et coll. : « Multiple causes of high extinction risks in large mammal species », Sciencexpress, www.sciencexpress.org, 21/7/2005.

  • (3) G. Ceballos et coll. : « Global mammal conservation : what must we manage ? », Science, 22/7/2005.

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