Les tortues sont cousines des oiseaux et des crocodiles

Si les tortues sont traditionnellement associées au groupe le plus primitif des amniotes, leurs relations avec les autres groupes de cette même famille (autres reptiles, oiseaux, mammifères) restent incertaines. Il est communément admis que les tortues sont les survivantes d’une lignée de reptiles dits “anapsides”, dont le crâne est dépourvu de fosses temporales. Les autres reptiles et oiseaux actuels sont considérés comme diapsides, car ils possèdent deux fenestrations au niveau de chaque hémicrâne. Les oiseaux n’en ont qu’une, mais les scientifiques estiment qu’elle dérive de la fusion des deux qui existaient à l’origine. Les mammifères, pour leur part, sont synapsides : ils disposent d’un seul de ces orifices.

Depuis quelques années, des études de biologie moléculaire remettent toutefois ce schéma en question. Les tortues se classeraient maintenant parmi les diapsides, avec qui elles partagent de nombreux caractères. Elles seraient des “anapsides secondaires”, c’est-à-dire ayant perdu la qualité diapside au cours de l’évolution. Ainsi, elles représenteraient un groupe frère des archosauriens (crocodiliens et oiseaux)⁽¹⁾.

Cette hypothèse sur la filiation des tortues a été récemment renforcée. Au terme d’une analyse de l’ADN nucléaire, des chercheurs ont estimé qu’elles ne constituent pas un groupe isolé des autres reptiles mais, au contraire, le groupe le plus proche des archosauriens⁽²⁾.

Une étude précédente émet aussi des suggestions sur la lignée des chéloniens⁽³⁾. Via des analyses biométriques, elle confirme que les tortues terrestres ont des mains courtes, et les tortues aquatiques des mains longues. En outre, les deux espèces de tortues les plus primitives, ayant les mains courtes, devaient vivre à terre. Le groupe d’amniotes ancêtres à carapace de tortue était donc terrestre. Il aurait donné lieu aux deux espèces fossiles et, plus tard, à la lignée, devenue aquatique, des tortues actuelles. Parmi ces dernières, seuls les testudinidés sont purement terrestres. Ils auraient donc renoué avec la vie à terre, comme leurs ancêtres, à la faveur d’un phénomène d’évolution inversée.

• (1) R. Zardoya et A. Meyer : « Complete mitochondrial genome suggests diapsid affinities of turtles », proceedings of the National Academy of Sciences USA, 1998, vol. 95, pp. 14226-14231.

• (2) N. Iwabe et coll. : « Sister group relationships of turtles to the bird-crocodilian clade revealed by nuclear DNA-Coded Proteins », Molecular Biology and Evolution, 2005, vol. 22, n° 4.

• (3) W. Joye et J. Gauthier : « Palaeoecology of triassic stem turtles sheds new light on turtle origins », Proceedings of the Royal Society of London B, 2004, n° 271.