RENSER LES AGRESSOINS POUR MIEUX LES PRÉVENIR - La Semaine Vétérinaire n° 1197 du 08/10/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1197 du 08/10/2005

À la une

Auteur(s) : Alexandra Beck

Comme tous les professionnels au contact du public, les vétérinaires sont parfois confrontés à l'impulsivité de certains de leurs clients, pour des motifs plus ou moins compréhensibles, mais qui ne justifient toutefois jamais le recours à la violence. Des solutions techniques et d'organisation permettent de se prémunir contre ces incidents. Des projets ordinaux et associatifs sont en cours, pour recenser les violences et aider les praticiens à les gérer.

Quel praticien n'a jamais été agressé, verbalement ou pire, physiquement, par l'un de ses clients ? Tout confrère interrogé a au moins un épisode en mémoire à raconter. Cela va de la “simple” incivilité, quotidienne, à l'agression verbale, voire à la franche empoignade. Les menaces proférées à l'encontre d'un vétérinaire («  Je me vengerai ! ») ou même une prise en otage par un client sorti de ses gonds ne sont malheureusement pas du domaine de la fiction, mais bien de la réalité. Toutefois, même les insultes verbales, fréquentes, ne doivent pas être banalisées, car il reste inadmissible qu'un praticien soit agressé dans le cadre de son exercice, au service de ses clients et de leurs animaux.

Parmi les motifs qui irritent la susceptibilité des clients figurent le montant des frais à régler (qui génère parfois des refus de paiement), l'attente de l'intervention du vétérinaire (en pratique rurale par exemple, ou en salle d'attente), leur haut niveau d'exigence qui conduit à une attitude odieuse, les propriétaires estimant que le vétérinaireauneobligationdeservice, etc. Les demandes de falsification de papiers (notamment sur la race d'un animal dans le cadre de la loi sur les chiens dits dangereux, sur son âge pour des recours contre les vices rédhibitoires, etc.), de production de documents antidatés et de prescriptionscontestablessontautantde situa­tions loin d'être rares, qui génèrent du stress et peuvent aboutir à de l'agressivité.

Avec l'expérience, les confrères apprennent à mieux répondre aux agressions

Comment peuvent se prémunir les praticiens, pour limiter le risque d'être agressé ? L'attitude affichée lorsqu'un client hausse le ton compte pour une bonne part dans la tournure que prend l'événement. Comme en témoignent de nombreux confrères, l'expérience joue beaucoup. Elle permet notamment d'apprendre à relativiser les menaces, à ne pas nécessairement les interpréter comme des attaques personnelles et surtout à apaiser la situation. Il reste que les praticiens sont parfois démunis face à une menace et ne savent pas nécessairement comment se “couvrir”, sans se montrer perdants.

Un exemple fréquent est celui des conflits générés par le refus du client de payer les frais, qu'il juge trop élevés. Les motifs d'ordre financier seraient en effet à l'origine de plus du tiers des agressions (voir en page 12 de ce numéro). Dans ces cas-là, à court d'arguments, certains confrères ou consœurs ont recours à la confiscation de l'animal, qui n'est rendu à ses propriétaires qu'en échange du règlement. «  Le Conseil supérieur de l'Ordre juge cependant cette pratique déplorable en termes d'image pour un vétérinaire (irrespect de l'animal considéré comme une simple monnaie d'échange, mépris des relations affectives entre le maître et l'animal, etc.). Face à ce cas de figure, si le tact et la mesure ne suffisent pas à gérer la situation, l'Ordre préconise de saisir le juge (procédure d'injonction de payer). Par ailleurs, il peut être utile d'avertir officiellement le client qu'il ne sera plus admis dans l'établissement et devra faire appel à un autre vétérinaire », explique Michel Baussier, secrétaire général du Conseil supérieur de l'Ordre.

Régulièrement, des praticiens victimes de l'agressivité de certains clients se tournent vers les listes de discussion vétérinaires sur l'Internet, notam­ment celle de l'association Vétos-Entraide. Les réponses quasi immédiates envoyées par leurs confrères et consœurs aident à apaiser la tension induite par l'événement.

Instaurer un filtre téléphonique élimine une partie des appels incivils

Le fait d'exercer seul, et de surcroît d'assurer desgardes (nuits, week-ends), multiplie les risques. Certains mettent en place des solu­tions simplesdetriagetéléphoniquequi••• ••• éliminent une partie des appels incivils. Cette solution a été adoptée par les services d'urgence en médecine humaine, mais également par quelques structures vétérinaires, pendant les heures de garde ou pour ceux qui exercent à domicile. La pratique montre que le simple fait d'instaurer une “barrière” téléphonique (par exemple en indiquant sur le répondeur de la clinique un numéro à rappeler en cas d'urgence) permet de filtrer une bonne partie des appels.

«  Il est important d'avoir une procédure stricte. L'agressivité est notamment augmentée par l'anonymat dont les personnes malintentionnées pensent bénéficier. De ce fait - et cela me sert aussi pour ceux qui téléphonent et ne viennent pas -, je signale toujours aux interlocuteurs qui appellent en numéro masqué qu'il me faut leurs noms et numéros exacts. Si j'ai un doute, je rappelle. Cependant, une solution pratique à ces problèmes peut être de passer par des sociétés de secrétariat téléphonique, surtout quand il faut assurer un important service de garde », témoigne un confrère.

Imposer un passage par le commissariat, comme certaines pharmacies ?

La solution mise en œuvre par de nombreuses pharmacies, qui renvoient systématiquement vers le commissariat en dehors de leurs heures d'ouverture (nuits, week-ends, jours fériés), peut également servir d'exemple à la profession vétérinaire. Ce passage obligé par la police présente un caractère dissuasif non négligeable pour les éventuels clients malintentionnés. «  Depuis qu'un confrère nîmois s'est fait agresser physiquement dans son cabinet suite à une urgence “bidon”, une procédure est en place dans cette ville : le numéro des vétérinaires de garde est transmis aux policiers et uniquement à eux. Les clients sont invités à se rendre au commissariat, lequel les renvoie vers le praticien qui assure la garde après un examen de leurs papiers. Il s'agit d'un dispositif compliqué pour les clients qui ont l'impression de suivre un jeu de piste, mais cela est beaucoup plus reposant pour les vétérinaires. D'autant que le jeu de piste en question filtre un certain nombre de fausses urgences », témoigne une consœur nîmoise.

Equiper les zones d'accueil de systèmes de télésurveillance

L'installation de dispositifs modernes de sécurité constitue une autre option, largement répandue chez les pharmaciens par exemple, pour protéger leurs locaux (voir l'article en page 35). Selon un sondage réalisé en août 2003 sur le site Planete-vet.com auprès de 221 confrères et consœurs, les deux tiers des cliniques vétérinaires n'étaient équipées d'aucun dispositif particulier de sécurité. Parmi celles qui l'étaient, 20,44 % disposaient d'un système interne, 5,78 % étaient reliées à un service de sécurité ou à la police et 8,44 % combinaient les deux.

Ces solutions doivent-elles être généralisées dans les établissements vétérinaires ? Pour Véronique Bianchetti (vice-présidente du Conseil supérieur de l'Ordre), «  cette question est préoccupante et il convient d'identifier les pistes à poursuivre. Le frein à ces dispositifs serait la nécessité de préserver le secret professionneL. Néanmoins, dans les zones d'accueil, il est possible d'installer des systèmes de télésurveillance. Par ailleurs, il est vivement conseillé aux praticiens qui assurent seuls les gardes de nuit d'avoir sur eux une alarme (comme celle dont sont équipées certaines personnes âgées). Dans ce cas, je crois qu'il faut aussi prendre contact avec les services de police municipaux. Le stade ultérieur serait de ne recevoir que les personnes que la police envoie, comme cela se pratique dans certaines régions pour les médecins et les pharmaciens. Le sujet sera évoqué lors du prochain conseil de l'Ordre, ainsi que pendant la réunion des conseils régionaux ce mois-ci ».

Dans tous les cas, l'Ordre encourage d'ores et déjà les praticiens à lui signaler les agressions ou les incivilités dont ils sont victimes, via leurs conseillers régionaux. En évitant le silence, cette démarche contribuera à ne pas sous-estimer ces violences (même verbales) et permettra de les quantifier.

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à nos Newsletters

Recevez tous les jours nos actualités, comme plus de 170 000 acteurs du monde vétérinaire.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Abonné à La Semaine Vétérinaire, retrouvez
votre revue dans l'application Le Point Vétérinaire.fr