Œufs et fœtus restent souvent coincés dans l'appareil reproducteur des reptiles en captivité - La Semaine Vétérinaire n° 1197 du 08/10/2005
La Semaine Vétérinaire n° 1197 du 08/10/2005

Troubles de la mise bas chez les reptiles

Formation continue

Faune sauvage

Auteur(s) : Norin Chai

Les dystocies sont fréquentes chez les reptiles captifs. Si la correction des conditions de vie et le traitement médical (ocytocine, calcium) restent sans effet, une intervention chirurgicale est nécessaire.

Les causes de dystocie chez les reptiles restent souvent incertaines. Les dystocies obstructives peuvent être dues à une malformation des œufs, à d'anciens traumatismes osseux (colonne vertébrale ou bassin), à la compression des œufs par des fécalomes ou des urolithes, etc. Elles se rencontrent généralement chez les chéloniens (voir photo 1). Les dystocies non obstructives peuvent faire suite à des conditions d'entretien non conformes (température, humi­dité, substrat, photopériode, abri, etc.) ou à une absence de site de ponte. Le stress peut entraîner secondairement une hyperprogestéronémie inhibant la contraction des oviductes juste avant la ponte. Les autres origines incluent des problèmes nutritionnels, métaboliques, traumatiques, une faiblesse générale du spécimen (associée ou non à une affection concomitante, infectieuse ou pas), une non-fécondation (l'absence de mâle), un impubérisme des femelles, une compétition entre femelles (pour un même site de ponte ou pour un même mâle), etc.

La gestion d'une dystocie comprend des traitements hygiéniques (rétablissement des paramètres environnementaux, réhydratation, etc.), médicaux (injection de calcium, d'ocytocine) ou chirurgicaux, ou bien une association des trois.

La chirurgie est indiquée lors de rétention d'œufs préovulatoire

La gestion chirurgicale des dystocies est assez fréquente, notamment chez l'iguane vert (Iguana iguana). Quel que soit le reptile, il existe deux types de rétentions d'œufs. La rétention préovulatoire est liée à une absence d'ovulation et à un engorgement des ovaires en follicules mûrs devenus énormes (voir photo 2). Elle ne peut être traitée que par ovariectomie. La rétention postovulatoire résulte d'une stase temporaire ou définitive des œufs dans les oviductes. Elle est gérée par des injections d'ocytocine ou, en cas d'échec, par une ovario-salpingectomie.

Trois jours avant l'intervention, l'animal reçoit 10 mg/kg d'enrofloxacine et 0,1 mg/kg de méloxicam par voie intramusculaire tous les jours. Au préalable, une diète de quarante-huit heures est mise en place. L'anesthésie est fixe (propofol à la dose de 8 mg/kg par voie intraveineuse ou, à défaut, kétamine à la posologie de 50 mg/kg par voie intramusculaire), avec ou sans relais gazeux (isoflurane). L'animal est placé en décubitus dorsal sur une source de chaleur.

Lors de cœlio­tomie et d'ovariectomie, une inci­sion para­médiane est réa­lisée en évitant la veine abdo­minale mé­diane ventrale. Les ovai­­res sont loca­lisés et retirés vers le haut, avec pré­cau­tion. Cha­que vaisseau sanguin visualisé est ligaturé (fils résorbables, décimale 2 ou 3).

Une ovario-salpin­gectomie débute par une ovariectomie. Plusieurs ligatures sont posées en masse sur chaque groupe de vaisseaux du mésosalpinx irriguant les oviductes. Chaque oviducte est ligaturé par transfixion effectuée au niveau du cervix (jonction entre l'oviducte et l'urodeum).

Dans les deux cas, la cavité cœlomique et la peau sont suturées en deux plans (avec des points simples éversants en U et des fils résorbables de déci­male 2 ou 3).

La rétention d'œufs chez les tortues captives est plus fréquente entre avril et août

Chez les tortues captives, la rétention d'œufs a une fréquence saisonnière : chez Testudo sp., 50  % des cas sont observés entre mai et juin et 90  % entre avril et août.

Les manifestations cliniques, parfois frustes, se résument à une anorexie accompagnée secondairement d'une apathie. Parallèlement, il est possible d'observer une modification du comportement avec une nervosité élevée, une difficulté respiratoire, un prolapsus de l'oviducte, etc. Si la rétention persiste, la salpingite peut évoluer en nécrose des parois entraînant une péritonite et une septicémie. Le pronostic est alors assombri. En général, l'ocytocine est efficace chez les chéloniens, administrée par voie intramusculaire ou intracœlomique (plus de 90  % d'efficacité). La ponte qui en résulte est impérieuse. Elle débute environ trente minutes à une heure après l'injection. La dose varie, selon les auteurs, de 5 à 30 UI/kg. L'administration parentérale de calcium permet de prévenir les risques de prolapsus de l'oviducte induits par l'ocytocine. Lors de rétention basse, certaines manœuvres permettent de libérer un œuf bloqué dans le cloaque. Il convient alors de casser la coquille et de retirer précautionneusement les débris à la pince, ou bien d'aspirer l'œuf si la coquille est molle. Pour une rétention haute, il est nécessaire de recourir à une cœliotomie si le traitement médical est inefficace. Deux abords sont possibles : la voie principale, transplastrale (voir photo 3), et la voie inguinale qui est la seule envisageable chez les espèces à plastron réduit (Chélydridés).

La voie transplastrale impose l'ouverture de la carapace à l'aide d'une scie circulaire

Trois jours avant l'intervention chirurgicale, la tortue reçoit 10 mg/kg d'enrofloxacine et 0,1 mg/kg de méloxicam par voie intramusculaire tous les jours.

L'anesthésie est fixe (propofol, 10 mg/kg par voie intraveineuse, ou kétamine, 5 à 10 mg/kg, associée à de la médétomidine, 0,1 mg/kg par voie intramusculaire) complétée ou non par un relais gazeux.

L'animal est “calé” en décubitus dorsal sur une source de chaleur. Une fenêtre rectangulaire est tracée à l'aide d'une scie circulaire. Elle enjambe les plaques fémorales et abdominales. Le tracé est doucement approfondi en biseau (biseautage vers l'intérieur pour bien recaler ultérieurement le volet osseux) jusqu'à atteindre les tissus mous. La poussière osseuse est régulièrement enlevée à l'aide d'une compresse humidifiée à la Vétédine® diluée, permettant parallèlement de dissiper la chaleur. Par un mouvement de levier, le volet osseux est détaché de ses accroches musculaires et retiré. Il est alors possible de visualiser la musculature abdominale et la membrane cœlomique sur laquelle se situent deux larges veines abdominales de part et d'autre de la ligne médiane. Une incision ventrale de la membrane permet d'accéder à la cavité cœlo­mique. Les mesovariums sont disséqués de proche en proche. La partie vaginale est ligaturée (fils résorbables de décimale 2 ou 3, voir photo 4). La cavité cœlomique est fermée par un surjet (fils résorbables de décimale 1,5 à 2). La plaque est replacée sur son site d'origine. L'ensemble est stabilisé avec de la résine époxy, colle Araldite®.

Il convient de pallier les conséquences de l'anorexie par une réhydratation intrapéritonéale (20  ml/kg/j d'un mélange tiédi composé pour moitié de NaCl isotonique et pour l'autre moitié de glucose à 5  %) ; un bain quotidien de vingt minutes dans de l'eau tiède ; 10  ml de Réanimyl® administrés par sonde œsophagienne une fois par jour pendant cinq jours, puis tous les deux jours pendant dix jours ; dix gouttes de Tonivit®, deux fois par semaine, pendant quatre mois.

En raison de leurs organes allongés, les serpents nécessitent de grandes incisions

Avant la salpingectomie, le serpent subit une diète de quatre-vingt-douze heures. Le protocole anesthésique réside en l'administration intraveineuse ou intracardiaque de 8 mg/kg de propofoL. Un autre protocole consiste à administrer de la kétamine à la dose de 70 mg par voie intramusculaire ou de 50 mg/kg par voie intraveineuse. L'animal est placé en décubitus dorsal sur une plaque chauffante.

L'incision cutanée est réalisée entre la première et la deuxième rangée d'écailles sur une longueur suffisante. Le plan musculaire est incisé. Avec l'index, le praticien juge de la position des côtes. Cela permet de localiser le point d'ouverture de la cavité cœlomique. L'oviducte est visualisé et incisé. Les fœtus ou les œufs sont retirés. Un surjet simple est réalisé sur l'oviducte. La cavité cœlomique et le plan musculaire sont suturés ensemble (fils résorbables de décimale 1,5 à 3,5 selon la taille du serpent). Des points simples en U sont posés sur la paroi cutanée.

Une réhydratation intrapéritonéale est réalisée (20  ml/kg/j du mélange tiédi de NaCl isotonique et de glucose à 5  %).

La salpingectomie implique également une ovariectomie. Dans ce cas, le praticien doit souvent inciser plus crânialement et disséquer les mesovariums de proche en proche. Une simple ligature sur l'oviducte suffit généralement.

Quels que soient le reptile et l'intervention chirurgicale réalisée sur l'appareil génital, l'animal est ensuite hospitalisé dans un terrarium à une température de 30 à 32  °C. Il reçoit une antibiothérapie préventive (enrofloxacine à raison de 10 mg/kg/j par voie intramusculaire pendant dix jours), ainsi qu'un traitement antalgique (méloxicam à la posologie de 0,1 mg/kg par voie intramusculaire pendant cinq jours).

Pour en savoir plus

• C. Arvy, B. Fertard : «  Pathologie des tortues. Etude synthétique », BulL. Soc. Herpt. de France, numéro spécial, 2001, n°  100, p. 80.

• D. Denardo : «  Dystocias in reptile medicine and surgery », in D. R. Mader (ed.), pp. 371-372.

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