LES SOINS DU SABOT CHEZ LES ÉQUIDÉS - Ma revue n° 1666 du 01/03/2016 - Le Point Vétérinaire.fr
Ma revue n° 1666 du 01/03/2016

Dossier

Auteur(s) : Pierre Leveillard

Fonctions : Docteur vétérinaire,
ancien chagé de cours au
Groupement d’intérêt public
santé animale (Gipsa).

Le vétérinaire et le maréchal-ferrant interviennent tous les deux dans la gestion des maladies du pied. L’auxiliaire contribue à leur bonne coordination et à l’information du propriétaire.

Le vétérinaire n’est pas le seul acteur professionnel sur le terrain du pied des équidés. L’auxiliaire devra tenir compte du fait que le maréchal-ferrant, qu’il ne connaît pas toujours, peut émettre des avis ou intervenir. La synchronisation entre ces deux professionnels principaux est fondamentale. Elle requiert organisation et diplomatie. L’ASV devra donc redoubler de prudence dans ses conseils, sans méconnaître ce domaine très préoccupant pour les professionnels et les amateurs de chevaux. Quelles sont les réponses à apporter ? Exemples pratiques avec cette série de questions de propriétaires.

Mon vétérinaire et mon maréchal-ferrant ne sont pas d’accord : qui écouter ?

Beaucoup de propriétaires se plaignent de la mauvaise communication, voire de la concurrence, entre ces deux professionnels. Et, pourtant, leur coopération est fondamentale pour le bien-être des chevaux et la tranquillité de leurs propriétaires. Le vétérinaire expérimenté déploie des moyens d’exploration importants, notamment d’imagerie médicale : radiographie, échographie, imagerie par résonance magnétique (IRM), etc. Il peut prescrire des médicaments ou faciliter certains examens douloureux et donner un avis sur la biomécanique. Le maréchal-ferrant est tout aussi expérimenté dans ce domaine et apporte tout son savoir-faire dans le parage et dans le ferrage. Plusieurs modèles de fiches de communication ont été établis entre les deux professionnels, lorsque leur rencontre “au pied” du cheval n’est pas toujours possible.

Mon cheval a été diagnostiqué “naviculaire”. Le vétérinaire m’a prescrit des médicaments et une ferrure orthopédique. Je préfère augmenter les doses de médicaments car j’ai beaucoup plus confiance dans la médecine que dans la maréchalerie

C’est une erreur : l’augmentation des doses ou du nombre de médicaments, outre qu’elle est rarement utile et ne doit jamais être pratiquée en automédication, ne compensera jamais le soulagement apporté par une ferrure adaptée. Les deux méthodes sont complémentaires et synergiques avec un exercice contrôlé. En effet, le concept simple de maladie de l’os naviculaire (petit sésamoïde ou sésamoïde distal) a été largement élargi depuis le perfectionnement de moyens d’examens complémentaires (échographie et surtout IRM). Il est aujourd’hui question de syndrome podotrochléaire ou même de syndrome de douleurs palmaires (ou plantaires) du pied. Cela signifie que l’os n’est pas seul en cause, mais que les cartilages, les tendons, les articulations et les ligaments jouent un rôle dans la genèse de la douleur. Voilà pourquoi la biomécanique est primordiale dans la gestion de ces chevaux. Pour n’en donner qu’un seul exemple, certains d’entre eux présentent une dominante de tendinite distale du tendon perforant, et la gestion de l’angle de la pince et de la bascule du pied devient alors essentielle, surtout pour des chevaux évoluant sur des terrains durs.

J’ai un cheval qui souffre énormément d’une lacune médiane et d’une pourriture de la fourchette de l’antérieur droit : existe-t-il des traitements généraux, en injection ou par voie orale ?

A priori non. Le traitement est essentiellement local. Après un bon parage, vous devrez appliquer des anti-septiques locaux avec des protections (cotons ou ferrure protectrice), et cela probablement toute la vie du cheval. Car même avec une très bonne hygiène du pied, ces troubles guérissent mal, mais ils sont tout à fait gérables. Lorsqu’ils sont chroniques, il s’agit souvent d’un problème de fonctionnement du pied, parfois améliorable par une ferrure adaptée. Une bonne hygiène du pied peut être favorisée par l’application d’onguents divers qui “nourrissent” la corne et, surtout, évitent l’adhérence des impuretés par leur imprégnation grasse.

Mon cheval de 6 ans est très panard. Je vais demander au maréchal-ferrant de le redresser par une ferrure correctrice. Qu’en pensez-vous ?

Vous pouvez, bien sûr, lui en parler, mais il est peu probable qu’il vous encourage dans cette voie. En effet, chez un cheval adulte, les ferrures doivent s’adapter à la conformation et à la locomotion du cheval, et non l’inverse. L’important est de ne pas aggraver le défaut par négligence ou ignorance.

En revanche, chez les poulains jeunes dont les cartilages ne sont pas soudés, les ferrures orthopédiques peuvent avoir un bon effet correcteur de certains défauts d’aplomb. Ce type de soins, appliqués très régulièrement et sous surveillance rapprochée, permet parfois d’éviter le recours à la chirurgie, lorsqu’il existe. Plus l’animal est pris en charge tôt et plus les chances de réussite augmentent, même si la difficulté technique de ferrer des animaux jeunes complique la tâche du maréchal-ferrant. Les cartilages de croissance du bas du membre du poulain se ferment vers l’âge de 6 mois.

Pourriez-vous me vendre des antibiotiques ? Mon cheval démarre un abcès du pied que je voudrais “tuer dans l’œuf” pour éviter les soins que j’ai eus à faire la dernière fois

Tout d’abord, il est interdit de vendre des antibiotiques pour un cheval sans prescription, elle-même précédée d’un examen de l’animal par le vétérinaire prescripteur ! De plus, je peux vous rassurer : l’usage des antibiotiques n’est absolument pas indiqué dans ce cas. En effet, les abcès du pied sont presque toujours dus à une inoculation par un corps étranger (appelée vulgairement “clou de rue”). Ce dernier se trouve souvent dans l’abcès, et seule son élimination mécanique par débridement de la sole (plus rarement de la paroi) du sabot permettra de soulager le cheval immédiatement et de le guérir ensuite. Le maréchal-ferrant peut pratiquer ces soins, mais je vous engage aussi à vérifier que votre cheval est bien vacciné contre le tétanos. Effectivement, cette plaie initiale peut exceptionnellement être la voie d’introduction de la bactérie responsable de cette maladie, dont les conséquences sont dramatiques. Si l’animal n’est pas correctement vacciné, l’administration d’un sérum antitétanique s’impose.

Je voudrais un cicatrisant pour mon cheval qui présente une seime qui remonte jusqu’à la couronne et le fait boiter

L’utilisation de cicatrisant a un effet très réduit, mis à part qu’il peut favoriser l’assouplissement de la corne. En effet, il s’agit d’un tissu mort qui ne cicatrise pas. La corne peut seulement être remplacée au cours de la pousse (avalure de la paroi). En revanche, en cas de fente, celle-ci peut se prolonger si les contraintes à l’origine du défaut persistent ou s’aggravent. Il convient donc de prendre l’avis de votre maréchal-ferrant, qui vous proposera une solution adaptée. Certaines seimes sont si graves qu’elles provoquent des saignements et de fortes douleurs. Il importe donc de s’en occuper avant que cela prenne de telles proportions. Les mêmes précautions que précédemment s’imposent pour le tétanos.

Nous soignons mon poney pour une fourbure depuis une semaine et le vétérinaire ne m’a pas parlé de faire intervenir le maréchal-ferrant. Est-ce normal ?

Il existe effectivement des ferrures adaptées aux chevaux fourbus. Mais leur mise en œuvre est difficile et il convient toujours de peser le bénéfice par rapport au risque. De plus, la mise en place d’une telle ferrure est toujours délicate, le poids devant être reporté sur l’autre côté durant toute l’opération de ferrage, ce que beaucoup de chevaux fourbus redoutent en raison de la douleur ressentie. Le moment venu, le vétérinaire prendra votre avis et celui du maréchal-ferrant pour programmer cette opération, s’il pense qu’elle peut être favorable à l’évolution du cheval, probablement après un bilan radiologique. Il existe des solutions alternatives (sable, coussins plantaires, par exemple) qui permettent de dépasser la phase aiguë, très douloureuse en général.

Je viens d’acheter un poney de race connemara, âgé de 4 ans. Je le soigne pour une maladie de la ligne blanche qui ne guérit pas bien et récidive régulièrement, malgré les soins attentifs que j’y apporte. Ne pourrait-on pas faire un prélèvement pour connaître les germes en cause et ajouter un traitement antibiotique adapté ?

Les prélèvements bactériologiques auxquels vous pensez, complétés par des antibiogrammes, sont très souvent décevants dans ce type d’affection. Si vous appliquez déjà les mesures d’hygiène et de maréchalerie habituelles, je vais en parler au vétérinaire, car une affection génétique (autosomale récessive) a été découverte depuis peu dans cette race. Le test génétique peut être fait sur l’ADN des crins. Et, en cas de positivité, vous auriez la possibilité de faire une action en garantie auprès du vendeur, puisque le défaut serait obligatoirement antérieur à la vente.

L’auteur remercie son frère Denis, maréchal-ferrant, pour sa relecture, ses suggestions et ses photos.

Vétérinaire et maréchal-ferrant : deux professions qui communiquent

Les vétérinaires et les maréchaux-ferrants doivent unir leurs efforts pour assurer une bonne santé et une locomotion confortable aux équidés. La multiplication des congrès et des formations associant les deux professions atteste de cette volonté de coopération et des efforts des professionnels dans ce sens. Une communication sans faille et de bonnes connaissances des principales affections podales permettront aux auxiliaires vétérinaires de montrer aux clients l’intérêt de leur structure pour les soins des pieds et de la ferrure, et de les conseiller utilement sur chacun des interlocuteurs et leurs rôles respectifs.

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