MÉDECINE CANINE ET FÉLINE
Formation
Auteur(s) : Élodie Goffart
Fonctions : Docteur vétérinaire,
praticienne dans l’Essonne
Le pyomètre est l’affection la plus grave de l’utérus des femelles des espèces canine et féline. Sa prise en charge est une urgence. Mais l’utérus peut être le siège de nombreuses autres maladies.
Comme chez la femme, les affections de l’appareil reproducteur sont très fréquentes chez les carnivores domestiques femelles, et regroupent les maladies des ovaires, de l’utérus et de la glande mammaire. Elles font l’objet de nombreuses consultations chez les vétérinaires. Cet article s’intéresse spécifiquement aux atteintes de l’utérus, dont certaines sont liées au cycle sexuel de ces animaux (encadré page 11).
Chez la chienne comme chez la chatte, l’appareil génital est constitué de deux ovaires et d’un utérus à deux cornes qui se termine par un col qui s’ouvre dans le vagin. L’utérus est donc en forme de “Y”. Sa vascularisation est assurée par deux artères utérines issues des artères vaginales, également au nombre de deux. L’utérus est composé de trois couches : l’endomètre (ou muqueuse et sous-muqueuse), le myomètre (ou musculeuse) et la séreuse. Le col de l’utérus est une structure très épaisse, musculeuse et riche en fibres élastiques.
Chez la chienne, l’ovaire se situe au milieu d’une poche de graisse appelée “bourse ovarique”. Plus l’animal est gras, plus la bourse est de taille importante. Dans cette espèce, l’utérus comporte aussi une part importante de graisse vascularisée. Chez la chatte, en revanche, aucune bourse ovarique n’est présente et l’utérus est libre de toute attache.
Ces organes génitaux sont parfois atteints de malformations.
• L’infantilisme est une déformation de l’ensemble de l’appareil génital, qui est petit par rapport à la normale, ou même absent. Cette atteinte peut être une découverte fortuite lors de la laparotomie en vue de la stérilisation.
• L’hermaphrodisme touche aussi certaines chiennes, qui possèdent un appareil génital à la fois mâle et femelle, entier ou non. Ces individus sont stériles.
Le mucomètre est une affection qui altère la fonction de reproduction de la femelle. Il est caractérisé par l’accumulation d’un liquide aseptique (absence d’infection) dans la lumière utérine. Il s’agit soit d’un hydromètre, si ce fluide est très liquide, soit d’un mucomètre s’il est fortement visqueux.
Les symptômes sont généralement frustes, voire inexistants. Le diagnostic de mucomètre est donc souvent établi incidemment lors de la stérilisation.
Les tumeurs primitives de l’utérus sont beaucoup plus rares que les tumeurs des ovaires. Elles se caractérisent par des écoulements sanguins et nécrotiques en dehors des chaleurs. À la palpation, le vétérinaire détecte une masse intra-utérine. Le frottis vaginal donne des images incohérentes. La gestation est parfois possible dans la corne non atteinte.
Le type histologique le plus fréquemment rencontré dans de tels cas est le fibrome. Le traitement consiste en une ovario-hystérectomie.
L’hyperplasie glandulo-kystique de l’utérus correspond à une prolifération anormale de la muqueuse de l’organe. Elle peut être due à une réponse excessive de celle-ci à une sécrétion d’œstrogènes en quantité normale ou bien trop importante (en lien avec un dérèglement des ovaires, des médicaments inappropriés, etc.).
Les premiers symptômes apparaissent généralement quelques semaines après les chaleurs (environ 2 mois). L’animal présente des pertes vulvaires séreuses à sanguinolentes, en quantité variable, et la vulve est tuméfiée. En outre, les propriétaires rapportent une attirance des mâles vis-à-vis de la femelle. La plupart d’entre eux pensent à tort que leur chienne est revenue en chaleur anormalement tôt. L’échographie permet de confirmer le diagnostic.
À ce stade, il est encore possible d’instaurer un traitement médical. Cependant, les médicaments risquent d’altérer la fertilité de la chienne et leur administration est donc à discuter avec le propriétaire qui souhaite conserver toutes ses chances de faire reproduire son animal. En l’absence de traitement, l’hyperplasie glandulo-kystique de l’utérus évolue en métrite ou en pyomètre.
Les métrorragies sont des hémorragies d’origine utérine dont les causes sont multiples : physiologique (période d’œstrus), tumorale, mauvaise évolution de l’utérus après une mise bas, kyste ovarien sécrétant, torsion d’une corne utérine.
Le diagnostic repose essentiellement sur le recueil de l’historique reproducteur de l’animal (âge, date des dernières chaleurs, mise bas, etc.) et une échographie. Le pronostic dépend de la cause sous-jacente.
Si elles ne sont pas traitées, les métrorragies peuvent aboutir à une anémie, potentiellement mortelle en l’absence de prise en charge. Une péritonite est également possible, conduisant à la mort de l’animal. Le traitement chirurgical (ovario-hystérectomie) est toujours la meilleure option, à conseiller en première intention si l’animal n’est pas destiné à la reproduction ou en cas de récidive.
Les métrites sont des inflammations de l’utérus, souvent d’origine infectieuse, qui surviennent le plus fréquemment après une mise bas, même si celle-ci s’est bien passée. Les agents pathogènes responsables sont classiques : staphylocoques, streptocoques, Escherichia coli. Certaines causes favorisantes sont connues, comme une mauvaise évolution de l’utérus après la mise bas, une mise bas compliquée ou très longue, la mort ou la nécrose des fœtus, un avortement provoqué ou spontané.
Les signes cliniques sont d’abord locaux (écoulements vulvaires, odeur nauséabonde, œdème ou congestion vulvaire, vaginite, douleur à la palpation abdominale), puis généraux (fièvre, abattement, désintérêt pour les chiots ou les chatons, anorexie). Il est alors urgent de traiter, sous peine d’évolution vers une péritonite, une intoxination ou une septicémie engageant le pronostic vital de la femelle.
Le diagnostic est clinique, gynécologique et échographique. Une numération et une formule sanguines repèrent une éventuelle lymphocytose. L’analyse biochimique permet d’exclure une insuffisance rénale associée.
Le traitement médical est possible, s’il est instauré rapidement. Des antibiotiques sont prescrits pendant plusieurs semaines. Néanmoins, l’avenir reproducteur de l’animal reste compromis, et il n’est pas garanti qu’il pourra mettre bas une nouvelle portée en bonne santé. Si l’animal n’est pas destiné à la reproduction, la chirurgie (ovario-hystérectomie) est le traitement de choix.
Le pyomètre est une forme particulière de métrite, avec l’accumulation d’une grande quantité de pus dans l’utérus. Il est souvent consécutif à une hyperplasie glandulo-kystique de l’utérus non traitée. En effet, l’épaississement de la muqueuse, après les chaleurs, est particulièrement favorable au développement des bactéries. Le col de l’utérus, ouvert pendant les chaleurs, peut laisser passer des agents pathogènes. En particulier, en cas de diarrhée, la vulve est contaminée par les fèces liquides et les bactéries remontent dans l’utérus par voie ascendante.
Il existe deux formes de pyomètre : à col fermé ou ouvert. Dans le premier cas, le col fermé empêche l’évacuation de l’exsudat vers l’extérieur (photo ci-dessous). Une très grande quantité de pus va alors s’accumuler pendant des mois dans les deux cornes utérines, qui augmentent de volume, parfois de manière spectaculaire. La quantité de pus accumulé peut avoisiner plusieurs kilos chez des chiennes de grand format ! La difficulté d’établissement du diagnostic repose alors sur le fait que, contrairement à la plupart des maladies utérines, il n’y a pas de pertes vulvaires. Les symptômes sont donc plutôt généraux, tels que de la fièvre, une anorexie, un abattement marqué, une distension abdominale et une polyuro-polydipsie. Les analyses révèlent une lymphocytose sévère car le pyomètre est en train d’évoluer en septicémie. La complication majeure à ce stade est l’insuffisance rénale. En effet, les reins sont très fortement sollicités pour éliminer les bactéries et, ces maladies touchant préférentiellement des chiennes âgées, l’appareil rénal est parfois déjà défaillant. En conséquence, l’animal passe d’un état d’insuffisance rénale chronique, parfois non diagnostiquée, à une insuffisance rénale aiguë de pronostic sombre. L’échographie permet de différencier une gestation d’un pyomètre à col fermé : les cornes sont très dilatées par du liquide purulent et aucun fœtus n’est visible.
Lors de pyomètre à col ouvert, les symptômes généraux sont toujours présents, mais il se produit également des écoulements vulvaires parfois intermittents, d’aspect très variable (odeur, couleur, consistance allant du sanguinolent au très purulent) (photos ci-contre). Le diagnostic différentiel inclut les autres cau?ses de pertes vulvaires (vaginites, tumeurs vaginales nécrosées, cystite, néphrite), d’augmentation du volume abdominal (gestation, ascite, tumeur abdominale, obésité, rétention urinaire) et de polyuro-polydipsie (traitement aux corticoïdes, hypercorticisme, hyperthyroïdie, diabète insipide, potomanie).
Les chiennes âgées de 7 à 9 ans sont les plus concernées par le risque de pyomètre. Cependant, les femelles qui ont subi un traitement progestatif ou œstrogénique par voie orale ou injectable peuvent être touchées plus tôt, vers l’âge de 4 à 5 ans. C’est la principale raison pour laquelle ces traitements sont progressivement tombés en désuétude, la plupart des vétérinaires ne les prescrivant plus aujourd’hui.
Les agents pathogènes impliqués dans un pyomètre sont le plus souvent banals : colibacilles (60 % des cas), staphylocoques, streptocoques, entérobactéries.
Le pyomètre, à col ouvert ou fermé, est toujours une urgence vitale. Il convient de le traiter rapidement, sous peine d’évolution vers une septicémie, une insuffisance rénale aiguë ou une péritonite en cas de rupture de l’utérus. Le traitement médical peut être tenté à des stades précoces de la maladie ou chez des animaux jeunes, et en l’absence de complications, mais il est souvent inefficace. Les antibiotiques diffusent mal dans l’utérus, organe supposé protéger les fœtus, mais qui protège aussi les bactéries !
L’utilisation des prostaglandines pour vidanger l’utérus est risquée. En effet, en cas de dilatation importante des cornes, une rupture utérine est possible, entraînant alors une péritonite d’évolution le plus souvent fatale.
Le traitement de choix est donc l’ovario-hystérectomie en urgence. Cette chirurgie est délicate et il est essentiel de prévenir la rupture utérine, ce qui est parfois difficile en raison de l’extrême fragilité de l’organe très distendu. Une réanimation médicale précautionneuse est indispensable. La réhydratation en est la base, accompagnée, si nécessaire, du traitement de l’insuffisance rénale et des autres désordres métaboliques. L’hospitalisation de l’animal est la plupart du temps inévitable. Le pronostic est réservé jusqu’à 48 heures après la chirurgie, surtout en cas d’insuffisance rénale associée.
Chez la chienne, au début du cycle de chaleurs, qui dure environ 3 semaines, l’hormone folliculo-stimulante (FSH) est libérée. Comme son nom l’indique, elle stimule la croissance des follicules. Sous l’influence d’une autre hormone, l’hormone lutéïnisante (LH), l’ovulation se déclenche. Un corps jaune reste alors dans l’ovaire, qui sécrète de la progestérone, l’hormone indispensable au maintien de la gestation, s’il y en a une. Les chaleurs des chiennes reviennent habituellement tous les 6 mois (avec des disparités importantes selon les races et les individus).
Dans l’espèce féline, le cycle sexuel est saisonnier. La période sexuelle commence habituellement en février et dure jusqu’en octobre. Les cycles se succèdent et l’ovulation est provoquée par la saillie. L’œstrus (chaleurs) ne se manifeste pas par des écoulements vulvaires, mais uniquement par des modifications comportementales : miaulements forts et répétés, attitude de lordose, recherche de partenaire1.
Les maladies de l’utérus sont fréquentes dans les espèces canine et féline, et sont bien connues des vétérinaires. Cependant, une diminution des cas rencontrés dans la pratique est observée depuis une dizaine d’années. Cela est dû à l’augmentation des habitudes de stérilisation des chattes et des chiennes avant la puberté, dès l’âge de 6 mois. Les propriétaires, de plus en plus conscients des nombreuses affections susceptibles de toucher l’appareil reproducteur de leur animal, sont désireux de tout faire pour les éviter. Les assurances de santé animalière encouragent elles aussi cette stérilisation précoce : les primes d’assurance sont moindres pour les femelles stérilisées, par rapport aux femelles entières.
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