La castration chez la vache : état des lieux - La Semaine Vétérinaire n° 1534 du 05/04/2013
La Semaine Vétérinaire n° 1534 du 05/04/2013

Formation

PRODUCTIONS ANIMALES/BOVINS

Auteur(s) : SYLVIE CHASTANT*, PAUL PÉRIÉ**

Fonctions :
*unité de reproduction, ENV de Toulouse. Article tiré d’une conférence présentée lors des journées de la SNGTV en mai 2012.

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En février 2012, les praticiens abonnés au Bulletin des GTV ont été interrogés sur leur pratique de la stérilisation chez la vache. Sur les 196 qui ont répondu, un quart d’entre eux seulement réalisent effectivement cette intervention, et de manière plutôt occasionnelle (moins d’une vache par an pour 51 % des confrères). La plupart des bovins concernés sont des vaches laitières. Les principaux objectifs cités sont la suppression des chaleurs, l’amélioration de la production laitière et l’engraissement.

LES MODALITÉS ACTUELLES

Les résultats de l’enquête montrent que les praticiens français stérilisent les vaches par voie vaginale. La paroi du vagin est généralement sectionnée à l’aveugle, à l’aide de ciseaux de Mayo. D’autres instruments sont parfois utilisés, comme un bistouri à lame cachée, un vaginotome de Rudolph, des ciseaux de Krebs, un Stériclip(r), voire un couteau à huîtres. En majorité, le pédicule ovarien est ligaturé soit par la technique boulon-élastique, soit par la pose d’élastiques Elastrator(r). En dehors de la phase de préparation, cette technique ne prend que quelques minutes à un praticien expérimenté.

En Australie et en Amérique du Sud, la stérilisation des vaches est réalisée à grande échelle afin de limiter les gestations non programmées dans les élevages extensifs. La voie vaginale est également utilisée et les pédicules ovariens sont sectionnés selon la technique de Willis (non pratiquée en France)? à l’aide d’une tige en inox.

Des méthodes non chirurgicales existent également, telles que l’emploi d’implants d’agonistes de la GnRH (desloréine, Suprelorin(r)), mais elles ne sont pas utilisées sur le terrain.

RISQUES DE L’OVARIECTOMIE CHIRURGICALE

Comme cette procédure est réalisée chez des animaux sains avec des objectifs économiques, les risques doivent être limités. Malheureusement, les données disponibles dans la bibliographique sont rares et concernent généralement des protocoles non utilisés en France.

Deux études se sont intéressées à la technique boulon-élastique (Berthelier, 2007 et Du Roizel Marlier, 2004) ne rapportent aucune mortalité. Cependant, le nombre d’animaux inclus est restreint. L’inconfort, évalué via le score de douleur, semble modéré.

La rémanence ovarienne est rarement observée : dans l’étude de Berthelier menée en 2007, aucune activité ovarienne n’est notée à l’abattoir chez les vaches qui ont subi une castration avec la technique boulon-élastique. Le taux de rémanence est estimé à 4 % avec la technique de Willis (Garber et coll., 1990). Néanmoins, les données chiffrées sont rares.

EFFET SUR LA PRODUCTION LAITIÈRE

La production de lait diminue en phase postopératoire immédiate, puis retrouve son niveau normal dans un délai de trois à dix jours, selon l’opérateur et l’animal. Une étude menée en France en 2004 par Du Roizel Marlier a comparé la production laitière de vaches castrées (striction du pédicule ovarien par voie vaginale) et non castrées, élevées dans les mêmes conditions et au même stade de production. La durée de lactation est augmentée en moyenne de 85 jours chez les vaches stérilisées. Un gain de 630 kg de lait est obtenu (gain de 3,5 kg/j). Une étude conduite par l’Inra en 2012 confirme ces résultats avec une ovariectomie par la technique boulon-élastique. À l’inverse, aucune différence notable n’est rapportée concernant les taux butyreux et protéiques entre les vaches castrées ou non.

Le niveau de production laitière dépend du nombre et de l’activité des cellules épithéliales mammaires. En début de lactation, le pic de production est principalement dû à une augmentation de l’activité sécrétrice. Puis, le nombre de cellules diminue (mort cellulaire) : la production de lait décline. En fin de lactation, les alvéoles sont remodelées en raison de la dégradation de la matrice extracellulaire. La castration, via la suppression de la sécrétion d’œstradiol et de progestérone par les ovaires, aurait pour effet une réduction de la dégradation de la matrice et une diminution de la mort cellulaire à l’origine d’une persistance de la lactation.

EFFET SUR LA PRODUCTION DE VIANDE

Le gain moyen quotidien (GMQ) diminue au cours des quinze jours qui suivent l’intervention, puis se stabilise. D’après les études réalisées sur une période d’engraissement, il serait identique, voire diminué, chez les vaches castrées par rapport à celles non castrées. Les carcasses possèdent les mêmes caractéristiques et le prix de la viande est comparable. Bien que la viande issue de vaches stérilisées bénéficie d’une bonne réputation, aucune étude ne démontre la supériorité de ses qualités organoleptiques.

Les implants de stéroïdes, utilisés massivement aux États-Unis, augmentent le poids de la carcasse et l’efficacité alimentaire. Une étude menée par Meyer, en 2005, compare le rendement de carcasse chez les génisses gestantes et non gestantes afin de déterminer si les stéroïdes physiologiques, sécrétés en abondance lors de la gestation, ont la même influence. D’après ce travail, le rendement de la carcasse est inférieur chez les vaches gravides. En dehors des implants de stéroïdes interdits en Europe, il n’existe pas actuellement de méthode alternative pour améliorer le GMQ.

SYLVIE CHASTANT, unité de reproduction, ENV de Toulouse. Article tiré d’une conférence présentée lors des journées de la SNGTV en mai 2012.

L’ovariectomie permet d’améliorer la production laitière sans modifier les taux protéique et butyreux. Elle n’a aucun effet sur les qualités bouchères du bovin.

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