Parésie chez un Beauceron mâle - Le Point Vétérinaire.fr



Un Beauceron mâle non castré de trois ans est présenté au service de chirurgie pour une parésie chronique des membres pelviens.

1. Historique


Depuis trois semaines, le chien présente une boiterie des membres pelviens. Une radiographie du rachis lombaire réalisée par le vétérinaire référent montre un rétrécissement de l'espace intervertébral L2-L3.
Une corticothérapie (prednisolone 1mg/Kg/j en deux prises) a permis une amélioration partielle et transitoire des symptômes. Suite à une aggravation de l'état clinique, l'animal est référé au service de chirurgie de l'ENVN pour suspicion de hernie discale.

L'examen clinique montre alors :
- Une ataxie modérée des membres pelviens,
- Un déficit proprioceptif et moteur modéré des membres pelviens,
- Une amyotrophie des muscles lombaires et des quadriceps fémoraux,
- Une hyperthermie modérée (39,6°C),
- Une douleur abdominale caudale,
- Une douleur rachidienne thoraco-lombaire,
- La palpation transrectale montre une prostate de taille augmentée et douloureuse,
- Une bandelette urinaire montre une leucocyturie marquée, une protéinurie modérée et une hématurie modérée,
- Une coloration rapide sur culot urinaire montre la présence de bacilles en quantité importante.

Un diagnostic d'atteinte centrale médullaire localisée en T3-L3 est donc établi, associé à une atteinte du bas appareil urinaire et à un syndrome fébrile.
Pour l'atteinte médullaire, les principales hypothèses sont :
- Une spondylodiscite,
- Une hernie discale,
- Un processus traumatique (hématome méningé, luxation vertébrale, fracture vertébrale) ou une atteinte néoplasique (tumeur médullaire ou vertébrale) paraissent peu probables au vu des commémoratifs et de l'évolution des symptômes.

Pour l'atteinte du bas appareil urinaire, les principales hypothèses sont :
- Une prostatite,
- Une cystite.

Une radiographie du rachis lombaire en vue de profil est présentée ainsi qu'une échographie du bas appareil urinaire.

2. Description et interprétation des images radiographiques et de l'IRM






Radiographie

Cette image est une radiographie en vue de profil du rachis lombaire et de la jonction thoracolombaire. Les vertèbres T 13 à L 5 sont visibles.

On remarque au niveau de l'espace intervertébral L2–L3 :
- Un rétrécissement,
- Une sclérose sous-chondrale des bords des corps vertébraux,
- Une irrégularité des plateaux vertébraux liée à une ostéolyse de ceux-ci et à une ostéoprolifération.
Ces critères radiographiques sont très évocateurs d'une spondylodiscite.

Echographie

Cette image est une coupe transversale de la prostate, obtenue à l'aide d'une sonde microconvexe utilisée à une fréquence de 7,5 Mhz. Par convention, la droite de l'animal est à gauche de l'image.

On observe :
- Un aspect hétérogène diffus de la prostate avec notamment de nombreuses plages hypo- à anéchogènes de petite taille correspondant soit à des kystes soit à des abcès de petite taille,
- La présence de deux plages hypoéchogènes parenchymateuses (une dans chaque lobe, en position dorsale), correspondant certainement à des abcès prostatiques,
- Une taille augmentée de l'organe (5,5 cm de longueur, 4 cm de hauteur environ pour chaque lobe),
- La capsule et la forme globale de la prostate sont conservées.
Le reste de l'échographie abdominale montre la présence de nombreux éléments échogènes en suspension dans la vessie et une adénomégalie modérée des noeuds lymphatiques iliaques médians.

Suite aux examens d'imagerie, le diagnostic est donc celui :
- De spondylodiscite en L 2 - L 3,
- De prostatite associée à la présence d'abcès prostatiques et d'une cystite.

Des urines sont prélevées stérilement par cystocentèse échoguidée pour réalisation d'un antibiogramme.

3. Commentaires


Une spondylodiscite est une affection inflammatoire du disque intervertébral et des plateaux vertébraux adjacents, voire des corps vertébraux eux-mêmes. Plusieurs espaces intervertébraux peuvent être atteints simultanément.
Il s'agit le plus souvent d'une atteinte bactérienne (Staphylococcus aureus, Brucella canis, Escherichia coli notamment) mais une cause fongique bien que plus rare est également possible.

Une spondylodiscite peut également résulter de la migration d'un épillet suite à son ingestion ou à son inhalation. Dans ce cas, les espaces L2 à L4 sont les plus fréquemment atteints. Une migration à travers les piliers du diaphragme qui s'insèrent au niveau des corps vertébraux des lombaires est suspectée (la présence de lésions pulmonaires est alors souvent associée).

Les signes radiographiques lors de spondylodiscite sont de reconnaissance aisée. Cependant, lors des 15 premiers jours, l'infection étant localisée au disque intervertébral, aucune anomalie n'est visible. Puis on peut observer successivement :
- Une diminution de l'espace intervertébral,
- Une lyse des plateaux vertébraux,
- Une ostéoprolifération plus ou moins importante centrée sur les bords des corps vertébraux et qui s'étend secondairement ventralement au corps vertébraux (images à ne pas confondre avec une spondylose),
- Une sclérose sous-chondrale des corps vertébraux plus ou moins grave,
- Dans les cas les plus graves, une luxation et/ou une fracture vertébrales pathologiques peuvent survenir.
L'imagerie en coupe et notamment l'IRM permettent à la fois :
- D'établir un diagnostic plus précoce,
- D'évaluer avec précision les conséquences de cette affection.
En effet, une compression médullaire secondaire est souvent présente, elle peut résulter soit de la présence d'un tissu de granulation ou des ostéoproliférations soit d'une luxation ou d'une fracture pathologiques.
Une ostéomyélite focale peut également survenir et être diagnostiquée par IRM.

L'infection du disque intervertébral se fait par voie hématogène et dans la plupart des cas un foyer infectieux primitif peut être identifié.
Il s'agit le plus souvent d'une infection du tractus urogénital (prostatite, cystite, pyomètre, pyélonéphrite…). Une maladie parodontale marquée ou une endocardite peut en être également à l'origine.
Suite au diagnostic de spondylodiscite, il est donc nécessaire de réaliser une échographie abdominale voire une échocardiographie pour rechercher un foyer infectieux primitif.
Une fois celui-ci identifié un antibiogramme ou une hémoculture permet d'adapter avec plus de précision l'antibiothérapie.



Dr Vre Renaud JOSSIER, Assistant Hospitalier,
Service d'Imagerie Médicale, CHV ENVN

Remerciements
Dr Vre M. Fusellier, Maître de conférences, Service Imagerie médicale CHV ENVN

Formations e-Learning

Nouveau : Découvrez le premier module
e-Learning du PointVétérinaire.fr sur le thème « L’Épanchement thoracique dans tous ses états »

En savoir plus

Boutique

L’ouvrage ECG du chien et du chat - Diagnostic des arythmies s’engage à fournir à l’étudiant débutant ou au spécialiste en cardiologie une approche pratique du diagnostic électrocardiographique, ainsi que des connaissances approfondies, afin de leur permettre un réel apprentissage dans ce domaine qui a intrigué les praticiens pendant plus d’un siècle. L’association des différentes expériences des auteurs donne de la consistance à l’abord de l’interprétation des tracés ECG effectués chez le chien et le chat.

En savoir plus sur cette nouveauté
Découvrir la boutique du Point Vétérinaire

Agenda des formations

Calendrier des formations pour les vétérinaires et auxiliaires vétérinaires

Retrouvez les différentes formations, évènements, congrès qui seront organisés dans les mois à venir. Vous pouvez cibler votre recherche par date, domaine d'activité, ou situation géographique.

En savoir plus


Inscrivez-vous gratuitement à notre Newsletter

Recevez toute l’information vétérinaire directement sur votre boite mail.

Vidéo : Comment s'inscrire aux lettres d'informations du Point Vétérinaire

Retrouvez-nous sur
Retrouvez toute l’actualité vétérinaire
dans notre application