Vaccination des équidés et gestes barrières pour les vétérinaires équins - Le Point Vétérinaire.fr

Vaccination des équidés et gestes barrières pour les vétérinaires équins

Source : Respe | 02.04.2020 à 12:55:07 |
Vaccination de cheval
© K Neville-Istock

Le Respe (réseau d’épidémiosurveillance en pathologie équine) et l'Avef (association vétérinaire équine française) viennent de mettre à votre disposition des consoeurs et confrères deux documents pour les guider dans leur pratique équine dans le contexte du Covid-19.

Deux notes ont été établies par le Respe et l’Avef : l’une sur la vaccination des équidés, l’autre sur les gestes barrières à appliquer lors des déplacements.

« Cette note technique est un avis scientifique permettant d'apporter un éclairage quant à l'impact santé et immunité d'un schéma calendaire vaccinal ne respectant pas les prescriptions AMM ou les réglementations en vigueur. Il s'agit ici de donner des informations scientifiques pour la réalisation de primovaccination ou de rappels vaccinaux en ces temps de confinement afin d’aider les vétérinaires à prendre une décision quant au bien fondé de l’acte de vaccination. 
La décision finale de réaliser la vaccination ou non appartient au vétérinaire qui devra établir la balance bénéfice/risque de cet acte (par exemple : respect des gestes barrières et limitations des interactions sociales dans le cadre des mesures de confinement COVID19 tant par le vétérinaire que les personnes responsables des chevaux, contexte épidémiologique et potentialité d'une épizootie, impact immunitaire, impacts législatifs et réglementaires). » 

Note technique sur les risques associes à un décalage de la date de vaccination chez le cheval (31 mars 2020)

Contexte : L’AVEF a mandaté un comité d’experts travaillant au sein du conseil scientifique du RESPE, pour donner aux praticiens des informations techniques concernant les conséquences d’un report de vaccination chez les chevaux.
Cette note technique traitera des consensus scientifiques concernant les valences essentielles pour les propriétaires de chevaux, en s’appuyant sur la littérature la plus récente. 

1) La vaccination et le contexte actuel 
En France, chez le cheval, il existe 3 vaccins principaux : grippe, rhinopneumonie et tétanos. Les deux premières maladies sont des maladies infectieuses et contagieuses de catégorie 3. Le tétanos n’est pas une maladie contagieuse.
La vaccination permet de protéger les chevaux à l’échelle d’un individu mais également d’une population et ce afin de limiter la survenue et la propagation de maladies infectieuses. 
En temps normal, les chevaux sont une population à risque du fait de leur mode de vie (plusieurs chevaux au sein d’une écurie), de leurs déplacements fréquents et de leurs rassemblements lors de courses, compétitions, ventes de jeunes chevaux, ... L’introduction de nouveaux chevaux dans une écurie est un facteur de risque également d’apparition et de propagation de maladies infectieuses notamment quand ce sont de jeunes chevaux. 
Dans la situation de crise sanitaire que nous connaissons, les compeétitions équestres et les courses hippiques sont suspendues jusqu’à nouvel ordre. De plus, les centres équestres et les écuries de sport sont fermés au public. Il y aura donc peu de mouvements de chevaux et pas de rassemblements dans les semaines à venir, ce qui réduit le risque de propagation et de transmission de maladies infectieuses pendant la période de confinement. 
De plus, la profession vétérinaire se doit de donner l’exemple en respectant au mieux les mesures de confinement et 1) en ne mettant pas en danger les personnes travaillant au contact de ces chevaux par des contacts non nécessaires et 2) en ne se mettant pas en danger eux-mêmes. 
S’il doit y avoir acte vétérinaires, il est alors impératif de respecter les gestes barrières destinés à lutter contre la propagation du COVID - 19 et les mesures de précaution qui en découlent lors de l’intervention du vétérinaire, à savoir :
- le nombre de personnes autour du cheval doit être réduit au strict minimum : le vétérinaire et une personne qui accompagne et tient l’animal lors de la vaccination ;
- les personnes intervenant doivent être équipées de gants et de masque (dans la mesure du possible) ; 
- une distance de minimum 1,5 mètre doit être respectée entre le vétérinaire et la personne tenant le cheval. Ainsi, afin de limiter le contact avec le vétérinaire, la personne pourra se tenir à droite du cheval et le vétérinaire à gauche.
 
2) Les vaccins chez le cheval 
• Grippe 

La vaccination contre la grippe est obligatoire pour tous les chevaux participant à des rassemblements avec deux injections de primo-vaccination (2 injections à 21-92 jours d’écart). Le premier rappel se fera 5 à 7 mois plus tard et rappel tous les 6 à 12 mois ensuite. Les chevaux de sport participant à des compétitions internationales doivent être vaccinés dans les 6 mois précédant la compétition. 
Un certain nombre de publications font état de la durée de l’immunité de la vaccination contre la grippe en précisant que des rappels annuels ne sont pas forcément suffisants et ce, notamment chez les jeunes chevaux (Gildea et al. (2019) Annual booster vaccination and the risk of equine influenza to Thoroughbred racehorses.Equine Vet J.doi: 10.1111/evj.13210). Une autre étude présente les résultats de l’immunité de jeunes chevaux vaccinés avec différents vaccins grippe. Le seuil de protection était atteint pour une durée de 3 à 6 mois en fonction des vaccins utilisés (Dilai et al. (2018) Impact of Mixed Equine Influenza Vaccination on Correlate of Protection in Horses.Vaccines (Basel). 4;6(4)). 
Au vu de ces différents éléments, il est obligatoire de vacciner les chevaux tous les ans et recommandé de les vacciner plus fréquemment (tous les 6 mois) contre la grippe. 
Chez des animaux adultes vaccinés très régulièrement (tous les 6 mois) contre la grippe, le rappel de vaccination peut être reporté de 4 à 8 semaines sans impact majeur sur la protection vaccinale. Les chevaux adultes vaccinés de multiples fois peuvent faire face à un délai du rappel de leur vaccination (Paillot et al. (2017) Equine Vaccines: How, When and Why? Report of the Vaccinology Session, French Equine Veterinarians Association, 2016, Reims, Vaccines, 5, 46; 2-11). Pour les chevaux participant à des compétitions internationales, il suffira de les re- vacciner avant leur première échéance sportive après le confinement en respectant un délai d’au moins 7 jours entre le vaccin et la compétition. 
Notre recommandation est d’attendre pour re-vacciner ces chevaux là. 

Chez des animaux adultes, vaccinés régulièrement (tous les ans), et au vu des conditions mentionnées ci-dessus (pas de mouvements de chevaux ni de personnes dans les établissements équestres, pas de rassemblements des chevaux), le rappel de vaccination peut être reporté sans augmenter de manière significative le risque de crise sanitaire majeure pendant la période de confinement. Néanmoins, il sera nécessaire, lors de la sortie du confinement, de re-vacciner ces chevaux en respectant les 2 injections de primo-vaccination. 
Pour les chevaux de loisir, de sport non impliqués dans des compétitions, notre recommandation est d’attendre, dans la mesure du possible, pour les re-vacciner sachant qu’il faudra reprendre une primo-vaccination complète avant de sortir de leur lieu de détention lors de la reprise des activités. 
Pour les chevaux de course et de sport qui devront être à jour de leur vaccination pour reprendre leurs activités, notre recommandation est d’effectuer leur rappel de vaccination en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut (§ 1)). 
Chez des animaux jeunes, non encore vaccinés et au vu, là encore, des conditions mentionnées ci-dessus (pas de mouvements de chevaux ni de personnes dans les établissements équestres, pas de rassemblements des chevaux), la vaccination peut être reportée sans augmenter de manière significative le risque de crise sanitaire majeure. Néanmoins, il sera nécessaire, lors de la sortie du confinement, de vacciner rapidement ces chevaux en respectant les 2 injections de primo-vaccination. Il ne sera, bien entendu, possible de les emmener sur des concours et/ou rassemblements que lorsque ces 2 injections auront été effectuées.
Notre recommandation est : 
-  d’attendre pour vacciner la majorité de ces jeunes chevaux ;
-  pour les chevaux de course (trotteurs et galopeurs) qui devront être à jour de leur vaccination pour reprendre leurs activités, notre recommandation est d’effectuer leurs injections de primo-vaccination en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut. 
Si les animaux jeunes sont en contact avec des chevaux à vacciner, notre recommandation est de vacciner l’ensemble du groupe. 
Chez les juments en activité de reproduction, il est recommandé de maintenir les protocoles de vaccination en vigueur. 

• Rhinopneumonie 
La vaccination contre la rhinopneumonie est obligatoire chez les chevaux de course (galopeurs et trotteurs) et fortement recommandée chez les chevaux de sport ou de loisir.
La France a connu une épidémie de rhinopneumonie en 2018 (Sutton et al. (2019) Molecular Surveillance of EHV-1 Strains Circulating in France during and after the Major 2009 Outbreak in Normandy Involving Respiratory Infection, Neurological Disorder, and Abortion.Viruses 2019, 11, 916). Parmi les facteurs déclenchant de cette crise, la faible vaccination de la population équine Française a été pointée du doigt avec moins de 30% de la population vaccinée. La rupture de vaccins contre la rhinopneumonie 18 mois avant cette crise est probablement également un des éléments à considérer. Avec le respect des mesures sanitaires, la vaccination est le seul rempart contre la rhinopneumonie actuellement (protection de la population équine) même si la protection vaccinale n’est pas démontrée contre la forme nerveuse (Khusro et al. (2020) Equine Herpesvirus-I Infection in Horses: Recent Updates on its Pathogenicity, Vaccination, and Preventive Management Strategies, Volume 87, 102923).

Chez des animaux adultes vaccinés trés régulièrement (tous les 6 mois) contre la rhinopneumonie, le rappel de vaccination peut être reporté de 4 à 8 semaines sans augmenter de manière significative le risque d’infection. Pour les chevaux participant à des courses, il suffira de les re-vacciner avant leur première échéance sportive après le confinement en respectant un délai d’au moins 7 jours entre le vaccin et la compétition. Notre recommandation est d’attendre pour re-vacciner ces chevaux là. 

Chez des animaux adultes, vaccinés régulièrement (tous les ans), et au vu des conditions mentionnées ci-dessus (pas de mouvements de chevaux ni de personnes dans les établissements équestres, pas de rassemblements des chevaux), le rappel de vaccination peut être reporté sans augmenter de manière significative le risque de crise sanitaire majeure pendant la période de confinement. Néanmoins, il sera nécessaire, lors de la sortie du confinement, de re-vacciner ces chevaux en respectant les injections de primo-vaccination. Notre recommandation est d’attendre pour re-vacciner ces chevaux là sachant qu’il faudra reprendre une primo-vaccination complète lors de la reprise des activités. 
Pour les chevaux de course qui devront être à jour de leur vaccination pour reprendre leurs activités, notre recommandation est d’effectuer leur rappel de vaccination en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut (§ 1)). 
Chez les juments gestantes qui doivent avoir un rappel de vaccination (1 rappel en début de seconde moitié de la gestation ou vaccination à 5, 7 et 9 mois de gestation, en fonction du vaccin utilisé), il n’est pas conseillé de reporter la vaccination sans s’exposer à une recrudescence des avortements. 
Notre recommandation est de re-vacciner ces juments gestantes. 

Chez les juments en activité de reproduction, il est recommandé de maintenir les protocoles de vaccination en vigueur. 

Chez des animaux jeunes, non encore vaccinés et au vu, là encore, des conditions mentionnées ci-dessus (pas de mouvements de chevaux ni de personnes dans les établissements équestres, pas de rassemblements des chevaux), la vaccination peut être reportée sans s’exposer à une crise sanitaire majeure. 
Notre recommandation est :
- d’attendre pour vacciner la majorité de ces jeunes chevaux ;
- pour les chevaux de course (trotteurs et galopeurs) qui devront être à jour de leur vaccination pour reprendre leurs activités, notre recommandation est d’effectuer leurs injections de primo-vaccination en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut. 
Si les animaux jeunes sont en contact avec des chevaux à vacciner, notre recommandation est de vacciner l’ensemble du groupe.

Pour la grippe et la rhinopneumonie, il est recommandé dans la mesure du possible : 
- de surveiller les animaux pour maitriser leur risque de contamination (pas de contact avec un animal dont le statut vaccinal n’est pas connu ni maitrisé pendant la période du confinement),
- de restreindre les contacts à des personnes ne gérant que les chevaux de cet élevage, centre équestre, écurie afin de limiter les risques de contamination indirecte 
Si le vétérinaire considère que l’effectif ou le voisinage immédiat court un risque élevé de contamination (cheval de l’effectif présentant de la fièvre et des signes respiratoires ou avortements ou signes nerveux), la vaccination sera envisagée selon les protocoles en vigueur, en veillant à ne pas mettre en danger ni l’équipe soignante ni le propriétaire, en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut (§ 1)). 
Il est bien évident que les chevaux malades ne doivent pas être vaccinés.

Tétanos :
En France, la vaccination contre le tétanos n’est pas obligatoire mais fortement recommande?e.
Les recommandations de l’American Association of Equine Practitioners (AAEP) pour la vaccination contre le tétanos chez le cheval sont les suivantes (American Association of Equine Practitioners. Core Equine Vaccination Guidelines. https://aaep.org/guidelines/vaccination- guidelines. Accessed August 15, 2017) : 
-  Chevaux adultes, déjà vaccinés contre le tétanos : vaccination annuelle ou tous les 2 à 3 ans en fonction des vaccins utilisés. Les chevaux présentant une plaie ou devant subir une chirurgie et dont le rappel de vaccination date de plus de 6 mois, doivent être re-vaccinés au moment de la blessure ou de la chirurgie. 
-  Chevaux adultes, non vaccinés contre le tétanos ou dont on ne connaît pas le statut vaccinal : 2 injections de primo-vaccination à 4 à 6 semaines d’intervalle. La protection contre le tétanos est généralement atteinte 14 jours après le deuxième rappel. Rappels annuels ou tous les 2 à 3 ans en fonction des vaccins utilisés. 
-  Juments gestantes déjà vaccinées contre le tétanos : vaccin annuel 4 à 6 semaines avant le poulinage afin de protéger la mère et d’augmenter la concentration d’immunoglobulines dans le colostrum. 
-  Juments gestantes non vaccinées contre le tétanos : 2 injections à 4 à 6 semaines d’intervalle puis rappel 4 à 6 semaines avant le poulinage. 
-  Poulains nés de mère vaccinées contre le tétanos : Première vaccination à 4 à 6 mois. Rappel 4 à 6 semaines plus tard. Troisième rappel à 10 à 12 mois. Rappel annuel ensuite. 
-  Poulains nés de mère non vaccinée contre le tétanos : Première vaccination à 3 à 4 mois. Rappel 4 à 6 semaines plus tard. Troisième rappel à 10 à 12 mois. Rappel annuel ensuite. 
-  Le sérum antitétanique apportera une immunité passive pour les poulains nés de mères non vaccinées et dans l’attente de l’âge de 3 à 4 mois pour être vaccinés.
Au vu de ces différents éléments, la vaccination des poulains ne devrait pas être un problème puisque devant survenir au plus tôt, 3 mois après la naissance. 
Notre recommandation est : 
- Pour les chevaux adultes, un report de la vaccination de 4 à 8 semaines est acceptable avec re-vaccination des chevaux avec une injection de rappel lors de la levée du confinement.
- Pour les juments gestantes, un report de la vaccination est également possible avec administration d’un sérum antitétanique au poulain si les juments ne sont pas correctement vaccinées. 
- Si le vétérinaire considère que l’animal court un risque élevé de contamination (cheval avec une plaie et non vacciné depuis 6 mois), la vaccination sera envisagée selon les protocoles en vigueur, en veillant à ne pas mettre en danger ni l’équipe soignante ni le propriétaire,
en respectant strictement les principes de précaution mentionnés plus haut (§ 1)). 

Fièvre du Nil occidental ou West Nile Fever :
La vaccination « West Nile » est marginale en France. De plus, nous ne sommes pas actuellement dans une période à risque.
Le protocole comprend 2 injections à 1 mois d’intervalle avec rappel annuel.
Le vaccin n’est pas obligatoire. En cas de rappel supérieur à un an, une primo-vaccination sera nécessaire.

Notre recommandation est d’attendre pour re-vacciner ces chevaux là. 

3) Le Coronavirus du cheval 
Il existe un coronavirus chez le cheval (ECoV) qui est associé à des signes cliniques tels que de la fièvre et des signes digestifs. Ce virus n’est pas transmissible à l’homme et n’a rien de commun avec le SARS-Cov-2 qui touche aujourd’hui la population humaine dans le monde entier (Schaefer et al. (2018) Investigation of an experimental infection model of equine coronavirus in adult horses J Vet Intern Med; 32:2099–2104). 

Fait le 31/03/20 
Anne Couroucé, DMV, PhD, HDR, Présidente du CST du RESPE, Professeur en médecine interne équine à Oniris

Christel Marcillaud-Pitel, DMV, Directrice du RESPE

Romain Paillot, PhD, HDR, Membre du CST du RESPE, Responsable Santé Equine Pôle Recherche LABEO
Pierre Tritz, DMV, Membre du CST du RESPE, Responsable de la commission maladies infectieuses de l’AVEF 

Source : Respe
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