Tout particulier devient éleveur professionnel dès la première portée - Le Point Vétérinaire.fr

Tout particulier devient éleveur professionnel dès la première portée

Céline Peccavy | 31.12.2020 à 08:00:00 |
Bouvier d'Appenzell
© Istock

« En l'état actuel du droit, tout particulier devient éleveur professionnel, dès la première portée, inscrite ou non à un livre généalogique officiel (LOF et LOOF), même sans numéro Siret, la notion d'éleveur amateur ayant disparu » nous rappelle un jugement récent. Décryptage.

Les faits : nous sommes en 2017 et Mme A, simple particulier, fait l’acquisition auprès des époux V de deux chiens de race Bouvier d’Appenzell. Deux achats quelque peu étalés dans le temps : le premier le 30 janvier 2017 pour la somme de 1400 euros concernant le chiot Mr et le second le 12 février 2017 pour la somme de 1.000 euros concernant le chiot Md.

Maladies : le 10 avril 2017 les deux chiens vont être diagnostiqués dysplasiques des hanches. Mr sera opéré d’une symphysiodèse puis postérieurement euthanasié. Md sera lui euthanasié avant toute opération. Le motif de l’euthanasie ? Les autres maladies développées par les chiots à savoir : problèmes rénaux, digestifs, PUPD (polyuro-polydipsie) pour Md. 

Refus d’indemnisation conduisant à la saisine de la justice : les époux V qui ne produisent qu’une seule portée par an sont persuadés d’être à l’abri des ennuis.

Deux juridictions saisies : en février 2018, c’est le Tribunal d’Albi qui est saisi. Il va donner raison le 28 mai 2018 à Mme A. En juillet 2018, c’est la Cour d’appel de Toulouse qui est saisie non pas par Mme A mais à la demande des époux V. condamnés en première instance alors qu’ils étaient persuadés de gagner et qu’ils n’avaient donc pas pris d’avocat, ils se lancent alors dans une nouvelle procédure avec cette fois-ci un avocat à leurs côtés.

Points de débats. Que ce soit en première instance ou en appel, les sujets fondamentaux sont les mêmes. Point 1 : celui qui ne produit et vend qu’une seule portée par an est-il vraiment un professionnel soumis à la garantie de conformité ? Point 2 : la dysplasie des hanches est-elle ici encore un défaut de conformité ?

Point 1 : voilà le débat qui fait rage depuis 2016, la garantie de conformité étant due seulement par le professionnel éleveur. On s’attache donc à savoir précisément qui est éleveur. Pour le déterminer, il faut s’en rapporter à l’article L 214-6 du code rural. Avant la réforme de 2016 le texte indiquait clairement qu’« On entend par élevage de chiens ou de chats l'activité consistant à détenir des femelles reproductrices et donnant lieu à la vente d'au moins deux portées d'animaux par an. »
Ce seuil est à tort encore dans tous les esprits. La méprise est d’autant plus renforcée que la réforme a mis en place des allègements de déclarations administratives au profit des éleveurs ne produisant qu’une portée LOF par an. On a pu donc voir ici et là émerger ces nouveaux éleveurs se disant « dérogataires ». Pourtant le nouvel article L 214-6 ne souffre pas l’interprétation : « On entend par élevage de chiens ou de chats l'activité consistant à détenir au moins une femelle reproductrice dont au moins un chien ou un chat est cédé à titre onéreux. » La Cour d’appel est venue mettre les points sur les i : «  En l'état actuel du droit, tout particulier devient éleveur professionnel, dès la première portée, inscrite ou non à un livre généalogique officiel (LOF et LOOF), même sans numéro Siret, la notion d'éleveur amateur ayant disparu. » Débat clos.

Point 2 : classiquement, le débat s’instaure autour des facteurs environnementaux. La Cour rappelle bien qu’on est en présence d’une maladie qualifiée de vice rédhibitoire, d’une maladie à caractère essentiellement héréditaire de type polygénique et que des facteurs d'environnement peuvent  influer sur l'apparition ou l'évolution de la maladie. Mais fait notable et ici déterminant : le chirurgien vétérinaire avait clairement pris position sur l’antériorité de la maladie et avait insisté sur son apparition alors que les chiots étaient encore très jeunes. La Cour a donc jugé que « cette affection était en germe au jour de la vente. Elle s'est révélée de manière précoce chez les deux chiots âgés à peine de 4 mois et demi lors des diagnostics réalisés par radiographies » et a appliqué la garantie de conformité.

En conclusion : des éleveurs condamnés au remboursement partiel du prix de vente (50%), au remboursement des frais vétérinaires et à l’indemnisation du préjudice moral (500 €).

Céline Peccavy
1 commentaire
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michele le 01-01-2021 à 15:43:53
l'idee est bonne. mais qu'en est il de personnes vendant 100 euros pour les frais de veto (puce ,vermifuge ,eventuellement un premier vaccin ,des chiens croisés en toute transparence ,et qui ne sauraient payer d'eventuels frais posterieurs .
Pourquoi ne pas mettre un seuil de prix de vente correspondant à des frais de veto (eventuellement sur facture) en deçà duquel l'acheteur ne peut se retourner contre le vendeur?
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