La Cour de justice européenne invalide les dérogations à l’usage des néonicotinoïdes - Le Point Vétérinaire.fr

La Cour de justice européenne invalide les dérogations à l’usage des néonicotinoïdes

Tanit Halfon

| 25.01.2023 à 12:51:00 |
© iStock-zvonko1959

Cette décision intervient alors qu’une 3ième dérogation allait être accordée pour la campagne betteravière française 2023.

Depuis 2018, la Commission européenne a interdit l’utilisation en extérieur de semences traitées avec trois néonicotinoïdes, l’imidaclopride, le thiaméthoxame et la clothianidine, pour la protection des pollinisateurs. Puis en 2020, l’approbation du thiaclopride n’a pas été renouvelée. Malgré ces interdictions, des dérogations ont été faites dans plusieurs Etats membres, sur la base de l’article 53 du règlement n°1107/2009 invoquant « un danger qui ne peut être maîtrisé par d’autres moyens raisonnables ». Ces dérogations ont amené à une situation de litige en Belgique entre l'Etat, et des associations de protection environnementale associées à un apiculture. Dans ce contexte, le Conseil d’Etat belge a sollicité la Cour de justice de l’Union européenne, dans le cadre de la procédure de renvoi préjudiciel, pour avoir son avis sur l’interprétation correcte du droit de l’Union.

Et cette dernière a tranché en faveur des associations et de l’apiculteur.

Pas de dérogation pour les produits interdits par un réglement d'exécution

« L ‘article 53 doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas à un État membre d’autoriser la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques en vue du traitement de semences, ainsi que la mise sur le marché et l’utilisation de semences traitées à l’aide de ces produits, dès lors que la mise sur le marché et l’utilisation de semences traitées à l’aide de ces mêmes produits ont été expressément interdites par un règlement d’exécution », a conclu la Cour. En clair, il ne peut pas y avoir de dérogations à l’usage des néonicotinoïdes interdits.

Cette décision va à l’encontre d’un avis rendu par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) rendu en 2021. L’Efsa avait été sollicité par la Commission européenne en 2020, afin d’évaluer si les autorisations d’urgence d’usage de néonicotinoïdes demandées par plusieurs Etats membres étaient justifiées d’un point de vue scientifique. La conclusion était que oui sur la base qu’ « aucune méthode ou produit alternatif – chimique ou non chimique – n'était disponible », ou parce qu’ « il existait un risque que l'organisme nuisible développe une résistance aux produits alternatifs disponibles. »

Pas de troisième dérogation pour la France

La France fait partie des pays ayant accordé des dérogations. La décision de la Cour de justice, intervient d’ailleurs alors qu’allait être actée la 3e dérogation pour la campagne betteravière 2023. Dans ce contexte, le gouvernement a annoncé annuler tout projet de nouvelle dérogation pour 2023. Cette 3e dérogation était censée être la dernière pour la France. En effet, rappelons que la France avait, avant la Commission européenne, pris les devants et interdit l’usage de l’ensemble des néonicotinoïdes via la loi pour la reconquête de la biodiversité du 8 août 2016, qui était entrée en vigueur le 1er septembre 2018. Cette loi avait, de plus, était étendue aux substances similaires aux néonicotinoïdes. Il avait été ensuite introduit des dérogations possibles d’abord jusqu’au 1er juillet 2020, puis jusqu’au 1er juillet 2023. « L’objectif du gouvernement, depuis la loi de 2020, était de sortir définitivement des néonicotinoïdes en 2024, a rappelé le gouvernement dans un communiqué. Fort de cet objectif, le gouvernement en lien avec l’INRAE, l’ANSES et les instituts techniques avait lancé un plan national de recherche et innovation (PNRI) sans précèdent. Ce plan a permis de coordonner un important effort de recherche, entièrement focalisé sur la jaunisse de la betterave sucrière pour apporter des solutions alternatives, déployables à l’échelle de la sole betteravière de 400 000 hectares et techniquement et économiquement viables à l’horizon de 2024. L’année 2023 constituait une année pivot en la matière. Cette décision soudaine de la CJUE vient percuter un programme de travail établi pour 3 ans et provoque des inquiétudes légitimes … » Un plan d’action va être mis en œuvre pour accompagner la filière pour cette année.

Tanit Halfon

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