L’Académie vétérinaire de France fait le point sur les coronavirus - Le Point Vétérinaire.fr

L’Académie vétérinaire de France fait le point sur les coronavirus

Tanit Halfon | 09.10.2020 à 18:35:33 |
covid-19
© DR

La séance du 1er octobre a été dédiée aux coronavirus et plus particulièrement à la pandémie en cours, avec plusieurs intervenants, de la santé animale et humaine.

La séance thématique One Health du jeudi 1er octobre de l’Académie vétérinaire de France était consacrée aux coronavirus avec un focus sur le Sars-CoV-2. Les présentations ont permis de montrer la complexité de la crise, l'avancée des recherches, et de rappeler aussi que les vétérinaires connaissaient bien la famille des coronavirus.

Le rendez-vous de l’Académie était en visio.

Une multitude de coronavirus chez les animaux

C’est Sophie Le Poder, enseignante-chercheuse à l’école nationale vétérinaire d’Alfort (ENVA), qui a ouvert l’après-midi de conférences, avec une présentation dédiée aux coronavirus évoluant dans le monde animal. Les premiers coronavirus animaux ont été découverts dans les années 1930 chez l’oiseau, et il s’agit des coronavirus responsables de la bronchite infectieuse aviaire. Puis les découvertes se sont enchainées chez le porcin avec le virus de la gastro-entérite porcine, chez le chat avec la péritonite infectieuse féline (PIF)… C’est bien avant la découverte des 1ers coronavirus humains qui date des années 1960 et qui sont responsables d’infections respiratoires mineures.  Au final, de très nombreuses espèces animales sont concernées par les coronavirus, dont les chauves-souris qui révèlent presque un monde à part entière de coronavirus. Seul un nombre limité d’espèces animales ne sont pas décrites comme réceptives : les arthropodes, les poissons, les primates non humains et les petits ruminants (des coronavirus Bovine-like décrits, correspondant à des coronavirus spécifiques aux bovins qui ont la capacité d’infecter d’autres ruminants). 

Une émergence virale vraie

Pour parler du Sras-CoV-2, a été invité Jean-Claude Manugerra, vétérinaire et virologiste à l’Institut Pasteur. Il a rappelé les grandes lignes de la pandémie actuelle, et les zones encore de flou. Comme le Sras-CoV-1, le nouveau coronavirus actuel, un Betacoronavirus correspond à une émergence vraie (introduction d’un virus inconnu ou connu dans une nouvelle espèce ou modification des caractéristiques d’un virus connu). Il pourrait être issu d’une recombinaison de coronavirus de chauve-souris et de pangolin, mais aucune séquence identique n’a été retrouvée chez les animaux sauf ceux contaminés directement par l’Homme. Si son extension est passée inaperçue au départ -ce qui n’est pas surprenant dans ce genre de situation d’émergence, le berceau de la pandémie est bien chinois, et plus particulièrement le marché de Wuhan. Sa diffusion mondiale a été rapide et globale, bien plus que les coronavirus précédents. Son introduction dans un nouveau territoire n’est pas le fait d’un seul  individu mais bien de plusieurs évènements distincts. Plusieurs questions restent en suspens : celle du rôle relatif des divers modes de transmission, une vraie difficulté actuelle, pour mieux adapter les mesures barrières, et celle du réservoir. Si l’Homme est devenu le réservoir, l’éradication du virus n’est pas pour demain. A noter que le 1er cas en Europe est français, ce qui n’est pas étonnant a expliqué le conférencier, Paris est une des 3 villes européennes avec des vols directs depuis Wuhan.

Des recherches en cours, à l’échelle nationale et internationale

Face à cette pandémie, le monde de la recherche a essayé de s’organiser le plus rapidement possible, comme l’a expliqué Yazdan Yazdanpanah, membre du Conseil scientifique Covid-19, et membre du Comité analyse recherche et expertise. Avec en toile de fond,  un chef d’orchestre : le consortium REACTing (Research and Action targeting emerging infectious diseases) dont le rôle est de coordonner la recherche en cours. Ce consortium a permis de lancer rapidement plusieurs projets de recherche prioritaires, dès le mois de mars. Ont été notamment lancés plusieurs projets d’approche thérapeutiques, dont le fameux projet Discovery évaluant les traitements antiviraux, chez les patients hospitalisés, qui a montré la non efficacité de l’hydroxychloroquine. Ce projet se fait maintenant à l’échelle européenne et le 1000ième patient vient d’être inclus. Il est, de plus, intégré à un autre projet, mondial cette fois-ci, sous la supervision de l’OMS, avec 10 000 patients de 27 pays pour l’instant, et l’Europe apporte 10% des patients. Par ailleurs, il a ouvert la voie à un consortium européen, l’EU_RESPONSE, composé d’une vingtaine de pays, et financé depuis début septembre à hauteur de 15 millions d’euros par la Commission européenne.

Améliorer la coordination de la recherche

D’autres pans de recherches de traitements restent cantonnés à l’échelle nationale, et une série d’essais cliniques de plus petite taille (essais CORIMUNO-19) ont été faits avec pour objectif de screener le plus rapidement possible un maximum de traitements efficaces. Un papier va être bientôt publié. Si à ce stade, il n’y a pas encore de conclusions sur les possibles anti-viraux, les remontées terrain et essais associés ont permis de montrer l’importance des corticoïdes et anti coagulants en soins intensifs, ce qui aboutit aujourd’hui à une réduction de la mortalité et une risque moindre de passage en soins intensifs. Pour les vaccins, une centaines de vaccins sont en étude dont 3 en phase 3 d’essais cliniques.

Maintenant, il s’agit de mieux réguler les axes de recherche, et d’améliorer les outils de coordination. En effet, le début de la crise a été associé à des initiatives isolées, sans réelle vision globale, une dispersion des forces et moyens financiers, des duplications de projets, des compétitions, des recherches cliniques en excès. Pour ce faire, l’idée est d’aller vers une nouvelle agence sur les maladies infectieuses émergentes (fusion ANRS/REACTing) représentant tous les domaines scientifiques et intégrant le concept du One Health.

Dans cette recherche en cours, le One Health semble, en effet, être compliqué, comme l’a souligné une chercheuse du public, qui a témoigné de sa difficulté à collaborer avec des équipes françaises de santé humaine dans cette crise, alors que cela pose moins de problème avec des équipes étrangères.

Tanit Halfon
1 commentaire
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rubus le 11-10-2020 à 17:19:40
Bonjour
Je souhaiterais partager cet excellent article sur LinkedIn
Est ce possible ?
Cordialement
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