Covid-19 : rien ne prouve que l’hôte intermédiaire soit le chien - Le Point Vétérinaire.fr

Covid-19 : rien ne prouve que l’hôte intermédiaire soit le chien

Tanit Halfon | 20.04.2020 à 12:05:31 |
chien errant
© iStock-Osobystist

Même si une étude suggère que le chien errant pourrait avoir joué le rôle d’hôte intermédiaire pour le Covid-19, à ce jour, le pangolin reste toujours l’hypothèse la plus vraisemblable selon le vétérinaire Eric Leroy, virologiste à l’IRD.

Une récente étude, menée un chercheur de l’Université d’Ottawa (Canada), et publiée dans la revue « Molecular biology and evolution », affirme que le chien pourrait être l’hôte intermédiaire du Covid-19. Une conclusion qui est cependant à prendre avec beaucoup de pincette, explique Eric Leroy, vétérinaire, directeur de recherche de l’Institut de recherche pour le développement à Montpellier et spécialisé dans la virologie tropicale. Explications.

« Il faut bien comprendre que ce n’est pas une étude à part entière : le chercheur n’a pas généré de nouvelles données mais a procédé à une simple analyse bibliographique. Il a ainsi répertorié toutes les séquences nucléotidiques de coronavirus disponibles – CpG - et a cherché à établir des liens entre ces différents virus. Il s’agit de séquences virales qui sont ciblées par des protéines antivirales de l’hôte - les ZAP* -, avec à la clé, une inhibition de la réplication virale. Ainsi, plus le pourcentage de ces nucléotides dans le génome est faible, et plus le virus est virulent. Il a fait le constat que le SRAS-CoV-2 présenterait un pourcentage significativement plus faible de CpG que de nombreux autres coronavirus. Ce même ratio est retrouvé chez des coronavirus pathogènes du chien, responsables de pathologies digestives. Au final, son hypothèse est la suivante : le SRAS-CoV-2 aurait été sélectionné, par pression sélective, dans le système digestif d’un canidé, un milieu dans lequel les ZAP sont plus fortement exprimées. Une hypothèse qu’il appuie aussi par le fait que certains malades du Covid-19 présentent des symptômes digestifs.

Même si le cheminement intellectuel peut être recevable, cette hypothèse est purement théorique, et surtout basée sur des données parcellaires. Il ne tient compte que d’un seul facteur alors que les mécanismes de défenses d’un organisme reposent sur une très grande quantité de paramètres. Dans l’univers du système immunitaire, le rôle de ces protéines antivirales est minime. Par ailleurs, l’existence de cette séquence nucléotidique chez certains virus n’a jamais débouché sur une stratégie vaccinale. L’analyse est tronquée.

Pour l’instant, la seule hypothèse pour les hôtes intermédiaires est le pangolin car les chercheurs ont trouvé des séquences génomiques virales très proches du SRAS-CoV-2.

Pour les carnivores domestiques, ce qui est sûr, c’est qu’ils peuvent être infectés et que l’infection semble être peu productive c’est tout. Les quelques cas de chats ou de chiens qui ont été infectés par leur propriétaire ont développé des symptômes de faible intensité voire, pour certains d’entre eux, aucun symptôme du tout. Le risque d’une transmission inverse est donc probablement nul. »

* ZAP pour Zinc finger antiviral protein. Cette protéine intervient comme un des mécanismes de défense antivirale contre les rétrovirus comme le HIV-1, mais aussi contre des virus à ARN simple brin. L’existence de ce mécanisme chez les coronavirus n’a pas été spécifiquement mis en évidence.

 

Tanit Halfon
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