Covid-19 : Dons de matériel : « Merci aux vétérinaires ! » - Le Point Vétérinaire.fr

Covid-19 : Dons de matériel : « Merci aux vétérinaires ! »

Chantal Béraud | 30.03.2020 à 10:31:35 |
L'équipe du CHU Dijon Bourgogne remercie les vétérinaires
© CHU Dijon Bourgogne

Que ce soit dans une démarche spontanée ou pour répondre à la demande du Ministère de la Santé, les praticiens se sont largement mobilisés pour fournir du matériel aux hôpitaux démunis face à l’arrivée massive de malades du Covid-19 dans leurs services.

C’est un véritable SOS, lancé par l’hôpital de Montélimar qu’a reçu à 18 heures, le mercredi 18 mars dernier, Christophe Hugnet, vétérinaire à La Bégude de Mazenc (Drôme). « Ils m’ont dit que sous 24 à 48 heures, il allait leur manquer des gants, des masques, des blouses, etc., témoigne-t-il. En bref, ils n’avaient plus de matériel de protection dans leur lutte contre le coronavirus. J’ai aussitôt téléphoné à l’un de mes clients qui m’avait déjà apporté une boîte de masques périmés, datant de l’épisode du H1N1, qu’un pharmacien avait jetés et qu’il avait alors récupérés ». Ce coup de fil lui permet de mettre la main sur quelque deux cents masques supplémentaires, qu’il va alors immédiatement livrer le soir même à l’hôpital, avec une série de matériel provenant de sa propre clinique. Soit : « des combinaisons de visite d’élevage de volaille et de porc, des surbottes, des gants en latex, des gants de fouille, des blouses de vêlage. Car jusqu’à présent, l’Agence Régionale de Santé ne leur avait fourni que des blouses jetables… à manches courtes ! »

Une réponse nationale à l’appel reçu

Aussitôt après cette première livraison, Christophe Hugnet a rédigé un courriel pour l’ensemble de ses confrères vétérinaires de la Drôme, les appelant à leur tour à la rescousse, courriel que la DDPP leur a ensuite envoyé. Ce qui a permis de réunir dans cette seconde collecte collective quelque 1000 combinaisons, dix mille gants, des charlottes, du gel hydro-alcoolique…

En parallèle, à l'échelon national, le Ministère de la Santé a contacté le Conseil de l’Ordre  National des Vétérinaires (CNOV) pour lui demander « s’il était possible de lui communiquer le type de matériels d’anesthésie et de réanimation dont dispose la profession et de recenser ceux que les vétérinaires accepteraient de mettre à disposition des hôpitaux humains, si cela s’avérait crucial pour faire face à un afflux de personnes malades nécessitant une réanimation ».  Cet appel assorti d’un questionnaire à remplir en ligne,  lancé du 19 au 23 mars, avait déjà reçu, en 24 heures, 900 réponses !

Des écoles vétérinaires également mobilisées

Le communiqué du CNOV en date du 22 mars indique « qu’à ce moment-là, les vétérinaires étaient en capacité de mettre à disposition de la médecine humaine 165 ventilateurs d’anesthésie, 841 concentrateurs d’oxygène et 215 appareils de monitoring » A cela devait aussi se rajouter le matériel en provenance des écoles nationales vétérinaires. Par exemple, du côté du VetAgro Sup, lundi 23 mars, l’école a, entre autres, livré 5 respirateurs (dont deux portables), une machine d’oxygénothérapie haut débit et des masques chirurgicaux au service réanimation de l’Hôpital Lyon Sud. L’école a aussi créé une page d’actualité spéciale, dédiée à la suite de la collecte de dons et à l’actualité des soins.

Des apports plus que bienvenus…

« Le recensement effectué par l’Ordre, informe Marc Veilly, secrétaire général du CNOV, a ensuite été transmis au Ministère de la Santé. La gestion pratique qui en découle se fait au niveau régional. En plus, au niveau local, des collectes de matériel consommable (masques, gants, surblouses…) sont organisées en direct avec les hôpitaux et la médecine de ville ». Ce dont témoigne par exemple Jacinthe Lapointe, ingénieure biomédical au Centre Hospitalier Annecy-Genevois : « J’ai reçu un coup de fil pour m’avertir qu’il y avait une vétérinaire présente à l’accueil, Adeline Linsart (du CHV Saint-Martin). Je suis allée avec mon équipe chercher les concentrateurs d’oxygène qu’elle nous amenait. Les concentrateurs ont été mis en psychiatrie, où ils ne sont pas équipés en gaz médicaux*. Merci aux vétérinaires ! S’ils en ont, nous avons encore besoin de concentrateurs d’oxygène, d’appareils de monitoring, sous réserve, bien sûr, de validation des modèles qu’ils nous envoient ».

Avec une remise aux normes de la médecine humaine

La photo représente une camionnette, chargée avec quatre respirateurs. Expéditeur : le CHV Pommery, de Reims. Destinataire : le CHU de Metz-Thionville. Yannick Pérennès, directeur général dudit Centre Hospitalier Vétérinaire, explique que ce CHU a en effet contacté sa structure, après avoir reçu la liste de recensement du matériel, émanant du CNOV. « C’est du matériel, certes ancien, mais de marque allemande Dräger, couramment utilisé en médecine humaine. Leur ingénieur médical va pouvoir les remettre en parfait état de fonctionnement ». Et d’ajouter : « Pour notre personnel, participer à cette collecte apparaît comme une évidence. Notre profession ne peut pas être indifférente à ce qui se passe : il est à mon avis urgent de prendre conscience qu’il n’existe qu’une seule santé.  Le concept de « One Health » pour les hommes, les animaux mais aussi pour notre planète ! »

Une priorité vitale : aider les soignants

Sans aucunement se concerter, tant Yannick Pérennès que Christophe Hugnet formulent le même constat : « Les vétérinaires sont des acteurs naturels de la santé publique. C’est donc émouvant -mais aussi un peu inquiétant-  que la médecine humaine ait  besoin de nous ! »  Jean-Philippe Corlouer, président du Syndicat national des CHV, se montre également réaliste : « Les CHV font ce qu’ils peuvent, mais leur aide sera forcément limitée. Par exemple, pour les appareils respiratoires, nous en avons un nombre extrêmement  limité, dont une partie en plus est obsolète ou non révisé ». « En fait, conclut Christophe Hugnet, il faut espérer que cette aide des vétérinaires ne soit importante qu’au moment de ce démarrage en cours. Nous ne pouvons pour l’heure malheureusement que constater qu’il existe un décalage entre les annonces médiatisées du gouvernement, et les situations concrètes de terrain. Il faut donc espérer que des moyens nationaux de protection pour les soignants vont réellement être mis en route ».

Nous devons tous nous mobiliser !

Cependant, s’il compte sur l’État, Christophe Hugnet l’aide aussi : « Je viens d’effectuer auprès de ma centrale d’achat vétérinaire des commandes de combinaisons, des blouses de vêlage, de chirurgie… Je vais également ramener à l’hôpital de Montélimar des pompes à perfusion, des pousse-seringues pour une troisième livraison. Actuellement, le personnel soignant doit s’y occuper de trois unités de réanimation, au lieu d’une seule habituellement. La vie humaine est plus importante que tout le reste. Il nous faut impérativement aider, protéger les médecins et leur personnel car demain -et même déjà aujourd’hui- c’est notre vie, ou la vie de nos proches qu’ils ont entre leurs mains ».

 

*Dans son édition datée du jeudi 26 mars, un article du quotidien « Le Monde » lance ce cri d’alarme : « Que fera-t-on des malades psychiatriques contagieux, s’ils sont en détresse vitale ? Car il n’y a pas de service de réanimation dans les hôpitaux psychiatriques ». Et le Docteur Skurnik, président du comté d’éthique du GHU de Paris de rajouter : « On est en train de chercher des solutions un peu partout. Mais, pour l’heure, on n’a aucune directive, ni consigne claire, c’est le Far West ».

 

Photo : Les huit mille professionnels du CHU Dijon Bourgogne (avec en photo ici son équipe du service de réanimation polyvalente) disent merci pour l’aide provenant de cliniques vétérinaires dijonnaises, mais aussi pour les nombreux messages ou gestes de soutien émanant de la population (dons de repas ou de chocolats, lancement de cagnottes en ligne pour aider l’hôpital, mise à disposition de logements, etc.). Des scènes similaires ont lieu dans différents établissements de soin du pays.  

Chantal Béraud
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